Fidèle à son franc-parler légendaire, Abdelkader Drif réitère ses positions vis-à-vis de la Sonatrach en précisant qu'elle doit délaisser le sigle MCA si elle ne décide pas de reprendre la section football. Liberté : La récente sortie médiatique de Mohamed Djouad excluant le retour de la section football du MCA à la Sonatrach vous a fait réagir. Une réaction qui n'a pas été du goût de l'actuel président du MCA… Drif Abdelkader : Je voudrais préciser qu'il est erroné et injuste de croire que nous demandons le retour à la Sonatrach. Nous voulons, et c'est là notre divergence fondamentale, en particulier avec Djouad, le retour de la section football à son sigle d'origine, le MCA. Tout le monde sait que cela fait 30 ans que la Sonatrach gère le club, mais également son sigle. Loin de nous l'idée de dénier à la Sonatrach les droits moraux sur le sigle, et ce n'est pas M. Djouad qui va nous dénier, à nous anciens dirigeants vivants ou morts, les nôtres. S'il y a de la sagesse, en tout cas, de notre côté, elle existera une fois la section réintégrée à la sonatrach et l'unicité du club retrouvée, si cette société estime pour elle indispensable de continuer à gérer le sport par le truchement de ce sigle, aucun Mouloudéen ne trouverait cela anormal. Bien au contraire, nous en serons fiers. Seulement, dans ce cas précis, il est important de tenir compte des avis des Mouloudéens non structurés dans l'administration Sonatrach sur la gestion du club. Tous vos appels et démarches n'ont pas, jusque-là, trouvé d'échos auprès des instances concernées. N'êtes-vous pas découragé par tant d'indifférence des autorités ? Pas du tout. D'ailleurs, je vous informe qu'une lettre officielle signée par les deux fondateurs de l'association El-Mouloudia (MM. Drif et Marif, ndlr) a été remise, en mains propres, à Mlle la DJS. Pourquoi la DJS ? Parce que c'est elle qui a dirigé cette “tchektchouka” qui a abouti à un directoire. Notre démarche est très claire : nous estimons que la puissance administrative, représentée par la DJS sous le couvert du MJS, est en train de jongler avec la loi. Il lui a été donc demandé d'agir auprès de la Sonatrach pour faire cesser cette illégalité, n'en déplaise à M. Djouad, président du MCA, même si j'ai cru comprendre que ce dernier reprend notre argumentation en reconnaissant l'inconformité des statuts régissant l'association qui devrait “jeter” le MCA dans les divisions inférieures. Aussi, une lettre recommandée a été envoyée au MJS et au Chef du gouvernement, c'est-à-dire aux organismes qui doivent sanctionner ceux qui piétinent la loi. Il est inconcevable de continuer à fonctionner avec deux chapeaux sur une même tête. Il est du devoir de la puissance publique d'intervenir pour arrêter cette mascarade. Si, encore une fois, la Sonatrach refuse de reprendre la section football, qu'allez-vous faire ? Qu'ils abandonnent le sigle. Nous refusons d'être réduits à de la charcuterie. Nous disons, non, non et non. Ce qu'a déclaré Djouad est irresponsable. C'est une énormité de la part d'un responsable d'un des clubs les plus prestigieux du bassin méditérranéen. Le sigle appartient à tous ceux qui ont l'amour de ce club. Vous avez vu qui présente les nouveaux joueurs au Real Madrid ? Alfredo di Stefano, une des figures emblématiques de cette formation. C'est une culture qui ne nous est pas étrangère. Mais chez nous, il n'y a plus de respect des valeurs. Cela dit, il est légitime que nous fassions cette revendication de vouloir sauver le MCA. Si la Sonatrach veut continuer à gérer le MCA, mais avec ses 14 sections, nous n'en serons que ravis. Dans le cas contraire, qu'ils remettent le club à la rue. Chiche ! Pourquoi en voulez-vous à Djouad ? J'ai toujours défendu Djouad en déclarant que c'est le président légal du MCA. Mais, je crois qu'il a ôté son costume de président pour revêtir celui de son maître, le ministre de l'Energie. Le président du directoire du MCA refuse, lui aussi, le retour de la section football à la Sonatrach. Pour lui, cette entreprise n'a rien apporté au club. Qu'en pensez-vous ? Un président de directoire, dont la mission est précaire, car limitée dans le temps, avec pour but précis d'organiser l'AG de son association, doit s'en tenir à cette mission. Porter un jugement de valeur sur tel ou tel problème, c'est aller vite en besogne. Sa position n'engage que sa personne, d'autant qu'elle est en totale contradiction avec la réalité, car Sonatrach a apporté au MCA, depuis 1977, un développement de la pratique sportive dans de multiples disciplines. Les dirigeants de 1977, dont feu Mustapha Ketrandji, père de l'actuel responsable du directoire, avaient remis 5 sections à Sonatrach. Aujourd'hui, elles sont 14. L'entreprise a apporté aux différents athlètes qui ont porté le maillot mouloudéen ces 30 dernières années, un bien-être certain. Omar Ketrandji doit ignorer qu'à l'époque, 8 pratiquants sur 10 sur les sections remises à la Sonatrach étaient chômeurs. Aussi, hormis le football, l'ensemble des sections a porté haut les couleurs du club, mais également de l'Algérie. Donc, je pense sincèrement que Ketrandji aurait dû tourner 7 fois la langue dans sa bouche avant de parler. Pour moi, c'est un faux débat. Savez-vous que vos positions ne sont pas partagées par les différentes sensibilités que renferme le MCA ? Pourquoi ces sensibilités concourent-elles à ce désordre ? Tout simplement parce que, à l'image des problèmes qui se posent dans tous les secteurs de la vie nationale, il y a un bouleversement qui s'est opéré, une perte de repères. Aujourd'hui, dans cette famille mouloudéenne, jadis valeureuse, ses différentes sensibilités ont épousé une démarche tout à fait contraire à l'éthique. Les compétences, si tant est qu'elles existent, au lieu d'agir dans leur domaine de prédilection, se permettent de s'occuper des choses dont elles n'ont aucune notion. Par exemple, dans les comités de ces 5 dernières années, le médecin est devenu gérant, l'appariteur, secrétaire général, le soigneur technicien et le kiné médecin. Résultat : tout cela a débouché sur un directoire, la plus grosse honte que puisse subir un club. Dans ce cas, c'était inévitable, car même le pseudo supporter est devenu décideur, alors que le véritable décideur s'est transformé en paria. En un mot, il n'y a plus d'échelle de valeurs. Je pense que si le président du directoire avait l'expérience indispensable, comme celle de son regretté père, il n'aurait pas sorti cette ineptie. Ne pensez-vous pas qu'il est impératif de dissoudre l'association El-Mouloudia pour priver le club de tutelle, ce qui faciliterait le retour à la Sonatrach ? Effectivement, l'association El-Mouloudia n'a plus raison d'être. Sa mission originelle n'était aucunement la gestion du club. Nous l'avions créée pour amener les responsables de Sonatrach à discuter dans un cadre organisé et légal avec les anciens sociétaires capables d'apporter un plus dans la vision des problèmes du club, particulièrement le foot qui a été en déficit total de titres malgré les gros moyens mis en place. Pour être plus précis, la politique de la Sonatrach qui consiste à discuter avec des franc-tireurs a montré ses limites. On a mis les gens à la rue, mais qui a récupéré les clubs ? Des trabendistes pour la plupart. Je regrette de le dire, même si je reconnais qu'il existe des gens honnêtes à la tête de nos clubs. Donc, la solution pour le MCA est celle que vous préconisez ? Il n'est pas pensable de laisser cette section foot aux mains de gens respectables peut-être, mais incompétents de mon point de vue dans la gestion du football. Notre cher ami Djouad ne peut ressentir, comme nous, ce que vaut le MCA qu'il a l'honneur de diriger aujourd'hui. Ce MCA lui a été façonné par plusieurs générations. Alors, un peu d'humilité ! En tout cas tant qu'il me restera un souffle, je ne laisserai pas charcuter le MCA. Propos recueillis par Nazim Abderrahmane