Tout au long de son séjour de dix jours en Algérie, onzième pays qu'elle visite depuis sa nomination, l'envoyée spéciale des Nations unies a rencontré des membres du gouvernement, des représentantes d'associations, mais aussi des victimes de violences. La rapporteuse spéciale des Nations unies sur la violence contre les femmes, Mme Yakin Ertürk, anime aujourd'hui à l'hôtel El-Djazaïr une conférence de presse, dans laquelle elle rendra compte de ses appréciations sur la situation des femmes en Algérie, au terme de sa visite qui a débuté le 21 janvier et s'achèvera ce 1er février. L'envoyée spéciale de la commission droits de l'Homme de l'ONU a rencontré, tout au long de son séjour dans notre pays, des membres du gouvernement algérien, dont la ministre-déléguée chargée de la Famille. Mme Nouara Djaffar, première interlocutrice de l'invitée de l'Algérie, a évoqué les différentes études menées, depuis un an et demi, pour connaître le niveau des violences subies par les femmes et établir des statistiques fiables sur le nombre des victimes et leur profil, ainsi que celui de leurs agresseurs. Elle lui a exposé aussi la stratégie nationale de lutte contre toute forme de brutalité contre les Algériennes, et lui a étalé les accomplissements des hautes autorités du pays en la matière, particulièrement dans le domaine législatif (révision du code de la famille et du code de la nationalité en février 2005). D'ailleurs, elle semblait apprécier positivement les amendements apportés à la loi de 1984 (autorité parentale partagée entre les deux conjoints, domicile conjugal accordé systématiquement à l'épouse divorcée qui obtient la garde des enfants…). De bonnes notes attribuées au gouvernement algérien, qui ne sont pas approuvées par les représentantes de treize associations de femmes, qu'elle a rencontrées, mardi dernier, au siège du Ciddef (Centre d'information et de documentation sur l'enfant et la femme). Ces dernières considèrent que le code de la famille révisé n'a pas changé tant que ça la condition féminine en Algérie, qui demeure préoccupante. Elles ont focalisé sur le maintien du tutorat sur la femme majeure et la polygamie. Elles ont, en outre, parlé à Mme Ertürk des difficultés que rencontrent les associations de défense des droits de femmes pour mener à bien leur mission. Vendredi, elle s'est déplacée à Blida, où elle a recueilli les témoignages des victimes du terrorisme, au siège de Djazaïrouna. Le même jour, elle a été l'invitée de l'association Bnat Fatma n'Soumer à Bougara. À ce rendez-vous, elle a eu la possibilité de s'enquérir du vécu des femmes violées, notamment par les terroristes, qui ne bénéficient jusqu'alors d'aucun statut particulier, encore moins d'une prise en charge efficiente en dehors de celle fournie par des organismes non gouvernementaux. Mme Dalila Zekkal, présidente de l'association susmentionnée, lui a présenté, à l'occasion, le projet Yadala, mis en œuvre par son organisation. Ce projet est articulé autour des aides apportées aux femmes dans le domaine juridique. Dans les huit communes de la Mitidja, touchées par la démarche (Bougara, Bouinan, Chebli, Meftah, Ouled-Slama haut et bas, Sidi-Hamed et Larbaâ), plus de 170 dossiers de victimes de terrorisme, qui n'ont pu obtenir leurs droits à cause d'embûches administratives, ont été déposés par les animatrices de Bnat Fatma n'Soumer, auprès des institutions de l'Etat. Selon Mme Zekkal, il a fallu “un long et patient travail de collecte de données, de témoignages et de documents pour entamer la procédure. Les cas concernent les indemnisations de femmes devenues par les tragiques événements responsables de famille sans ressources, des enfants nés dans les maquis et sans identité civile, ce qui les met à l'écart de toute vie publique, notamment de la scolarisation”. Elle a déploré, d'ailleurs, que les obstacles “pour faire aboutir l'enregistrement juridique des cas sont énormes et ne sont pas levés à ce jour”. La rapporteuse spéciale de l'ONU s'est rendue, hier, au centre SOS femmes en détresse, pour connaître, cette fois-ci, le sort réservé aux femmes, victimes de violences conjugales. Souhila H.