Cette guerre que vient d'engager le président Bush, sans le sceau de la légalité internationale, laissera une facture salée à l'Amérique. D'autant que les Etats-Unis assumeront, cette fois, une part bien plus grande que lors de la guerre du Golfe en 1991, payée à 85 % par les alliés. Selon les experts militaires américains, cette intervention coûterait entre 50 et 150 milliards de dollars. Il y a douze ans, le déploiement de 428 000 soldats (sur 42 jours de conflit) avait coûté 61 milliards de l'époque, soit 76 milliards d'aujourd'hui. Il est donc difficile d'estimer quel sera le véritable coût de cette intervention en Irak. Tout dépendra de la durée du conflit. Les experts de la Deutsche Bank, évaluent à 45 milliards de dollars trois mois de guerre, à 73 milliards un conflit de six mois et à 121 milliards un an d'intervention. Mais il n'y a pas que le coût militaire. William Nordhaus, économiste à l'Université de Yale, table sur une fourchette de 100 à 600 milliards de dollars sur dix ans l'après-conflit, dont 75 à 500 milliards pour l'occupation et le maintien de la paix, 30 à 105 milliards pour la reconstruction de l'Irak et 1 à 10 milliards pour l'aide humanitaire. Dans une récente étude, Andrew Stoekel, président du Center for international Economics et Warwick Mckibbin, membre de la Banque centrale australienne, intègrent trois paramètres supplémentaires : des dépenses budgétaires plus élevées outre-Atlantique, un prix du pétrole en hausse, lié entre autres aux destructions de puits, et une grande incertitude qui paralyserait ménages et entreprises. Ces trois facteurs pourraient provoquer une chute de 8 à 14% de l'investissement par rapport à une situation sans guerre, et coûter de 1 à 2 points de PIB. La Bourse, dans ce climat de risque, pourrait dégringoler de 9 à 16%. Un scénario catastrophe qui mettrait au tapis la première puissance mondiale pour plusieurs années. Concernant les marchés financiers, finie l'euphorie des derniers jours. La semaine a commencé par une véritable débandade sur les places financières internationales. Lundi, déprimés par les premières difficultés anglo-américaines en Irak, les marchés européens ont ouvert le bal avant de se voir confirmés dans leur moue dépressive par l'ouverture en baisse de leurs homologues américains. Wall Street perdait 2,97% et le Nasdaq 2,92%. Résultat, à la clôture, le CAC 40 parisien chutait de 5,67%, à 2726,85 points. Londres et Amsterdam étaient eux aussi nettement dans le rouge, à respectivement –3,05% et –6,38%. A deux heures du fixing, Francfort lâchait quant à elle 5,23%. Aux risques d'une guerre plus longue que prévu, le dollar a, lui aussi, de nouveau perdu du terrain sur l'euro. Ce dernier s'échangeait à 1,0652 dollars, alors qu'il avait clôturé à 1,053 vendredi. Et, comme mécaniquement, le prix du pétrole, qui avait beaucoup baissé depuis que les hostilités ont commencé, est remonté depuis lundi. Le cours du pétrole brent continuait son ascension, hier, redoutant une perturbation de l'approvisionnement en raison de l'enlisement des forces américano-britanniques en Irak et des troubles ethniques au Nigeria. Lundi vers 11 GMT le baril de brent pour livraison en mai valait 26,68 dollars contre 24,35 vendredi. M. R.