Les masques sont à présent tombés. L'argument des cibles militaires est fallacieux. Vicieux. Le mythe des frappes chirurgicales à vécu. Au moins quinze personnes, des civils, entre femmes, enfants et vieillards, ont péri, hier matin, sous le feu de deux missiles tirés par la les bombardiers de la coalition américano-britannique, sur un quartier populaire situé au nord de Bagdad. Les forces d'occupation viennent de signer ainsi le début de la guerre totale. Celle qui ne fait point de distinction entre les cibles civiles et militaires, pourvu qu'elles soient irakiennes. “L'intelligence”, dont les politiques et militaires US ont bien voulu affubler leurs missiles – ces machines à tuer –, tourne à présent en farce de très mauvais goût. En une tragédie humaine comparable à bien des égards à celle d'El Ameria 1991, quand les marines américains ont largué leurs engins de la mort sur ce refuge, tuant plus de 400 personnes sous les ordres de Bush “le père”. Au septième jour du déclenchement de la guerre, le fils — sous de faux oripeaux de pacificateur — semble décidé à rivaliser avec son père dans l'ignominie et le massacre de populations civiles. Faute de n'avoir pas pu encore mettre la main sur Saddam et sa garde prétorienne, les B52 s'acharnent sur la “Cité du peuple” et le marché pour permettre au duo d'enfer, Bush et Blair, de noyer son chagrin, d'avoir manqué pour une deuxième fois la cible. Hier, la nouvelle de ce massacre a rapidement fait le tour du monde. Comment pouvait-il en être autrement, puisque le président américain a presque demandé aux habitants de Bagdad d'aller se distraire sans avoir peur de quoi que ce soit ? Le fait est que même le célèbre hôtel Al Rachid n'a pas été épargné par la pluie de missiles qui s'est abattue hier sur la capitale irakienne. Non, la guerre faite au pays de Saddam Hussein n'est pas propre. Elle est sale, trop sale pour ne pas interpeller la communauté internationale ou simplement la conscience humaine. Les insoutenables images de corps carbonisés et mutilés, de flaques de sang qui ruissellent sur le lieu du drame, montrées hier par la chaîne Aljazeera, témoignent assez clairement de la monstruosité de la boucherie orchestrée par Bush et Blair. Les Irakiens, qui ont survécu aux raids meurtriers, sont sortis crier, pleurer, mais surtout prendre l'opinion publique internationale à témoin sur la réalité de cette guerre que les Américains et leurs alliés veulent mener à huis clos. Ce n'est certainement pas par hasard que le site Internet de la chaîne Qatarie, qui aura été jusque-là le témoin gênant de cette sale guerre, a été attaqué par les pirates informatiques, du reste faciles à identifier. Les masques sont à présent tombés. Le leitmotiv des Américains qui consiste à “rassurer” l'opinion mondiale sur le sort des civils n'est que discours. Un discours fallacieux. Vicieux. Pour eux, tous les Irakiens ressemblent d'une façon ou d'une autre à Saddam Hussein. Ce ne sont donc pas les Tomahawk qui en feraient la distinction… Le spectacle de la “Cité du peuple” était hier apocalyptique : bâtiments éventrés, voitures calcinées, cratères béants et, plus terrifiants encore, des corps humains méconnaissables jonchaient la place publique dans un décor hitchcockien. Et ce n'est qu'un début, avertissent les responsables militaires américains qui prévoient d'intenses bombardements sur la capitale irakienne les jours à venir. Le comble, c'est que le porte-parole du commandement US a refusé de commenter cette boucherie, en se demandant si les missiles tirés étaient les leurs ou pas. Voilà qui illustre parfaitement la stratégie américaine qui consiste à entretenir la suspicion sur les auteurs de l'attaque, dans une démarche maladroite de coller cette besogne aux troupes de Saddam Hussein. En revanche, ils ne pouvaient pas faire passer sous silence le meurtre de cinq Syriens, quand leur bus a été bombardé dimanche “accidentellement” à la frontière irakienne par les forces américano –britanniques. En tout état de cause, le massacre de 15 civils irakiens, hier, a levé le voile sur la stratégie de Bush qui consiste à traumatiser la population qui n'a pas accueilli ses troupes avec des fleurs et les youyous comme il l'espérait. H. M.