Les deniers publics sont mal gérés, s'accordent à souligner des cadres de l'Inspection. “Au titre de l'exercice 2002, l'Inspection générale des finances, avec un effectif opérationnel de 206 inspecteurs, a réalisé 173 missions sur les 202 inscrites, soit 85,64% du programme qu'elle s'était fixé. Elle a, par ailleurs, pris en charge 66 missions émanant des saisines, des services du Chef du gouvernement, ainsi que des ministères et institutions publiques.” C'est ce qui ressort du bilan d'activité de l'IGF pour l'année 2002, présenté, hier, par le premier responsable de l'institution. Plusieurs secteurs ont été touchés. M. Abdelmadjid Amghar, chef de l'Inspection générale des finances, a cité l'agriculture, la communication et la culture, l'enseignement supérieur et la formation professionnelle, la santé et les affaires sociales, l'industrie et les mines et les institutions financières. Il affirme, en outre, que son institution a engagé une mission judiciaire relative à la fraude documentaire au niveau des banques primaires. Le premier responsable de l'IGF n'a donné aucune indication sur les résultats de la mission. Il s'est contenté de dire que les rapports de missions des inspecteurs de l'IGF sont remis au ministère des Finances et aux autres autorités ayant fait des saisines. En marge de la rencontre, des inspecteurs nous ont affirmé qu'ils ont relevé plusieurs anomalies au niveau des banques auditées, sans donner de détails. L'IGF a aussi participé, dans le cadre d'un comité mis en place, au traitement et à l'assainissement des dossiers relatifs aux contentieux nés du remboursement de la dette russe. Elle a aussi procédé à l'audit du téléthon organisé suite aux intempéries du mois de novembre 2001. M. Amghar n'a pas donné les résultats de l'audit. Les inspecteurs des finances ont, au cours des débats, beaucoup insisté sur la question de la fiabilité des chiffres collectés auprès des administrations publiques. “Ce sont des informations souvent erronées”, soutient un intervenant. Les inspecteurs des finances ont mis en exergue la “déliquescence de l'administration”. Ils ont évoqué aussi des détournements au niveau des intendances de CEM et dans le secteur des télécommunications. Il est clair, pour plusieurs inspecteurs que nous avons rencontrés à l'Ecole nationale des impôts, que “les derniers publics sont mal gérés”. Selon M. Amghar, le système de gestion des finances publiques est dépassé. Le premier responsable de l'IGF a parlé d'un nouveau dispositif budgétaire, qui s'appuie sur la globalisation et la consommation des crédits. Il doit permettre l'instauration de ce qu'il appelle “le budget programme”, de la pluriannualité contre l'annualité. M. Amghar estime que l'Inspection générale des finances doit faire sa mutation. La nouvelle approche va conditionner le rôle de l'IGF qui, dans un premier temps, doit opérer la mise en conformité de son cadre juridique et réglementaire. Il affirme que depuis 1992, les nouveaux textes ne permettent pas de faire le contrôle classique de gestion des entreprises publiques économiques, sauf si l'IGF est saisie par l'Etat qui en est propriétaire. Pour 2003, l'IGF traitera de la gestion de l'eau et du foncier. Elle a, par ailleurs, inscrit dans son programme l'évolution du Fonds national de régulation et de développement agricole. Des ateliers sur ces thèmes seront organisés aujourd'hui. M. R. Instruments de contrôle de l'Etat Des pouvoirs très limités IGF, Cour des comptes, Parlement, autant d'instruments de contrôle dont dispose la République pour évaluer l'utilisation des deniers publics mais qui continuent de disposer de pouvoirs très limités. Démonstration : la réunion des inspecteurs de l'IGF à Koléa s'est abstenue de livrer à la presse les résultats de ses différentes missions d'enquête auprès des banques, des secteurs des télécommunications et de l'éducation. Les informations sur la mauvaise gestion des deniers publics resteront ainsi dans le secret au ministère des Finances ou à la chefferie du gouvernement. La Cour des comptes ne fait pas mieux. Le rapport annuel de ses investigations est adressé au chef de l'Etat. Ce dernier dispose de toute latitude de rendre publiques ou non ses conclusions. Or, contrairement à Zeroual, le président Bouteflika ne fait pas état annuellement à l'opinion publique des résultats des recherches de la Cour des comptes. Le Parlement, lui, ne prend pas d'initiatives dans ce domaine. Drôle de République donc où le citoyen n'est pas informé sur l'utilisation de son propre argent ! N. R.