Toutes les pressions et les exactions du régime de Hosni Moubarak n'ont pas découragé le président du parti Ghad, qui entend se présenter en septembre prochain comme candidat contre le raïs. Alliant l'audace à l'habilité politique, Aymen Nour est devenu au fil des jours le plus redouté des rivaux de Hosni Moubarak dans la course à l'élection présidentielle. Son aura a dépassé les frontières égyptiennes. Son incarcération en mars dernier n'a pas été appréciée par la communauté internationale, notamment les Etats-Unis. L'on se rappelle que la secrétaire d'Etat américaine aux Affaires étrangères, Condoleeza Rice, en était arrivée à boycotter une réunion officielle du G 8 dans la capitale égyptienne, pour amener le raïs à le relaxer. Conscient que le soutien de Washington n'ajoutera rien à sa popularité, Aymen Nour, qui avait accepté de rencontrer le chef de la diplomatie américaine au cours de ce mois au Caire, prend le soin de ne pas trop s'en prévaloir. Il semble avoir retenu la leçon du tollé provoqué au sein du pouvoir et de la classe politique locale par son entrevue avec l'ancienne secrétaire d'Etat américaine, Madeleine Albright, lors de son séjour au Caire. En effet, il se défend d'être le protégé des Etats-Unis. “Je ne veux pas de l'appui américain. Je parie sur le peuple égyptien. Mais, si dans le cadre d'un dialogue, les Etats-Unis me respectent et m'appuient, je suis très satisfait”, clame-t-il très haut pour ne pas perdre la sympathie de son peuple, qui se caractérise généralement par son antiaméricanisme notoire. Sachant pertinemment que, conformément à la loi votée le 25 mai dernier, qui n'autorise que les partis politiques agréés depuis cinq ans, au moins, à présenter un candidat à l'élection présidentielle, sa formation politique, Ghad, est automatiquement exclue du scrutin de septembre prochain, car ayant été autorisée en octobre 2004 seulement, il persiste dans son discours contre le régime. “Le régime a atteint sa date limite. Moubarak n'a plus rien à offrir après 24 ans de pouvoir. Il a volé l'âme du peuple égyptien”, affirme Aymen Nour. Il exploite à fond son procès qui s'ouvre aujourd'hui pour discréditer davantage le régime de Hosni Moubarak. Il compte en faire une tribune politique afin de forcer le pouvoir à reculer. “Non à l'injustice, Ayman Nour est innocent.” “Non à la dictature, pas de nouveau mandat pour Moubarak.”, scandaient ses partisans, hier matin, à l'ouverture de son procès, rassemblés devant le tribunal de Bab el-Khalk. Un imposant dispositif de sécurité a été déployé devant le tribunal, dont un cordon d'une centaine de policiers anti-émeutes en interdisait l'accès. Son objectif secret demeure l'amendement de la Constitution afin qu'il puisse être candidat en septembre. Pour y parvenir, il s'attellera à attaquer l'Etat pour s'assurer le maximum d'appui populaire dans cette perspective. “Le but du procès est de nuire à ma crédibilité et à mon image. Mais, même les singes du zoo savent qu'il a été fabriqué de toutes pièces par les autorités”, déclare-t-il. Dans son offensive, il prend même le risque de froisser la justice égyptienne en disant : “L'Egyptien ordinaire sait que le système judiciaire dans ce pays n'est pas toujours équitable et les intellectuels ont clairement remarqué les manipulations.” Il y a lieu de signaler que, si les autorités soulignent que le procès de M. Nour n'est pas politique, l'accusé estime qu'il s'agit d'une tentative du régime de saboter sa candidature à la présidence. K. ABDELKAMEL