Le ministre de l'Energie, dans une conférence de presse organisée hier à Alger, a avancé que la réalisation du gazoduc Medgaz pourrait être remise en cause. Rien ne va plus entre l'Algérie et l'Espagne suggèrent les réponses du ministre de l'Energie aux questions de la presse, en marge de la cérémonie de constitution hier de la société multinationale de lutte contre la pollution marine. D'abord, M. Chakib Khelil a indiqué que les négociations portant révision des prix du gaz livré par Sonatrach à la compagnie espagnole Gas natural, portant sur un volume de 9 milliards de mètres cubes par an, n'ont pas avancé. La partie algérienne demande une hausse de seulement 6%, applicable en deux tranches (3% applicable durant la première période, puis 3% dans un seconde période). Il s'agit d'un ancien accord qui spécifie dans l'une de ses clauses que les prix du gaz livré à l'Espagne à travers le gazoduc Duran Farell, reliant l'Algérie à l'Espagne via le Maroc peuvent être renégociés, pour tenir compte de l'évolution du marché. La partie espagnole semble jusqu'à présent très réticente à une telle révision des prix du gaz. Ensuite, le ministre de l'Energie a avancé que la réalisation du gazoduc Medgaz reliant directement l'Algérie à l'Espagne pourrait être remise en cause. En effet, la commission espagnole de l'énergie continue à imposer des conditions draconiennes à l'accès du gaz algérien en Espagne, a-t-il laissé entendre. En effet, elle exige que ce gazoduc soit en termes simples rempli à 80%, à défaut Sonatrach doit assurer que l'ouvrage ait une capacité supplémentaire suffisante. “Nous sommes en train d'analyser ces conditions”, a ajouté le ministre. Autrement dit, si ces exigences sont considérées côté algérien comme excessifs, contraire à ses intérêts, l'Algérie pourrait les rejeter et donc compromettre la réalisation de ce projet. Si tel était le cas, c'est bel et bien l'expansion des exportations gazières algériennes qui serait freinée. L'état des relations algéro-espagnoles déjà difficiles pourrait en pâtir. À ce propos, il convient de rappeler que le ministre avait déclaré que cette même commission avait limité la quantité de gaz livré et commercialisé directement par Sonatrach via ce gazoduc, correspondant à sa participation à Medgaz (36%), à seulement 1 milliard de mètres cubes par an, au lieu de près de 3 milliards de mètres cubes/an. Il avait argué que cette condition n'était imposée à aucune autre compagnie commercialisant son gaz en Espagne et que le Royaume-Uni n'avait exigé aucune limitation à l'entrée du gaz algérien sur le marché britannique (à travers la réservation par Sonatrach de capacité sur le terminal de regazéification d'Isle of Grain). Par ailleurs, M. Khelil a soutenu que le changement d'actionnaires au sein de la compagnie espagnole Endesa pose problème. Cette dernière, qui participe à hauteur de 12% au projet Medgaz, vient d'être acquise par Enel/Acciona. Sonatrach, qui doit livrer du gaz à cette compagnie via Medgaz, n'a pas été approchée par le nouveau propriétaire. L'accord sur Medgaz, a-t-il ajouté, prévoit que Sonatrach peut ne pas livrer ce gaz à la compagnie cliente, en cas de changement de propriétaire. “Enel est déjà un important client de Sonatrach à travers le gazoduc Enrico Mattei reliant directement l'Algérie à l'Italie via la Tunisie. Avoir comme client l'Enel comme client de part et d'autre (sur le marché espagnol et italien) ne risque t-il pas de poser problème ?” s'est-il interrogé, laissant entendre que cette question va être également examinée par la partie algérienne. Pas de négociations avancées avec Gaz de France et Suez Le ministre de l'Energie, du reste, a réfuté les informations parues dans la publication française La Tribune et le quotidien belge Le Soir, faisant état de négociations avancées, de rapprochement avec Suez, pour une fusion, voire un partenariat stratégique avec Sonatrach. “Nous sommes un vendeur de gaz. Nous concluons des accords avec des compagnies qui nous offrent des prix du gaz les plus rémunérateurs. Il s'agit de voir quel est notre intérêt dans de tels rapprochements”, a-t-il résumé. Le P-DG de Sonatrach, lui, a refusé de commenter la déclaration du candidat Sarkozy, actuellement président de la République, évoquant une possibilité de fusion entre Sonatrach et Gaz de France, se contentant de déclarer : “C'est une déclaration à portée politique, intéressant la partie française.” M. Chakib Khelil a indiqué, sur ce point, que Sonatrach n'a reçu aucune proposition de Gaz de France pour une prise de participation dans des terminaux de regazéification aux Etats-Unis. “La seule proposition émane de Statoil pour le terminal de Cove Point dans le Maryland”. Mise en œuvre de la loi sur les hydrocarbures : l'appel d'offres lancé fin 2007 Sur les résultats de sa visite aux Etats-Unis, il a souligné qu'il s'est entretenu avec le secrétaire d'Etat américain à l'Energie, M. Bodman. Il en ressort que l'accord de coopération avec les Etats-Unis pour le développement du nucléaire civil algérien sera signé en juin. L'Algérie envisage de signer des accords de coopération dans le domaine avec d'autres pays, notamment avec l'Afrique du Sud et l'Egypte. L'attractivité du domaine minier national sera mesuré avec les résultats de l'appel d'offres pour l'exploration qui sera lancé fin 2007, a-t-il répondu sur la réaction des compagnies associées à Sonatrach, après l'application de la taxe sur les superprofits. “Nous choisirons parmi les soumissionnaires les compagnies qui nous proposeront en contrepartie l'accès à des réserves d'hydrocarbures à l'étranger, l'accès à un marché, à une technologie”, a martelé le premier responsable du secteur, après avoir annoncé la mise en œuvre de la nouvelle loi sur les hydrocarbures au second semestre. “Tous les décrets d'application ont été approuvés en Conseil des ministres”, a-t-il ajouté. N. Ryad