La compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, a adressé, avant-hier un recours à la Commission nationale de l'énergie (CNE, organisme régulateur du secteur en Espagne) concernant les conditions relatives au gazoduc reliant l'Algérie à l'Espagne (Medgaz). C'est ce qu'a déclaré, hier, le ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, en marge de la conférence de presse portant sur la situation nationale de distribution du gaz, organisée au siège du ministère. L'Algérie, a affirmé le ministre, ne peut en aucun cas accepter les décisions prises par la commission espagnole de l'énergie. Pour rappel, la CNE espagnole a conditionné son autorisation à l'exercice par la Sonatrach des "droits de vote correspondant à sa participation additionnelle de 16 %", dans le capital de la société Medgaz à certains paramètres, qualifiés d'injustes par la partie algérienne. Pour rappel, le projet Medgaz regroupait au départ sept opérateurs : la compagnie Sonatrach et l'espagnole Cepsa avec chacune 20% des actions, les espagnoles Iberdrola et Endesa, les françaises Total et GDF et la britannique BP avec 12% chacune. A la suite du retrait de Total et de BP du consortium, Sonatrach s'est portée acquéreur de leurs parts, avec naturellement l'avis favorable de la Commission nationale espagnole de l'énergie. En portant à 36% sa quote-part dans le projet Medgaz, la compagnie nationale en devient majoritaire et s'ouvre le droit de disposer d'un volume de 3 milliards de m3, à commercialiser directement à travers le gazoduc Medgaz, dont la capacité annuelle de transport est de 8 milliards de m3/an. Or, la Commission espagnole a révisé à la baisse le quota vendable par Sonatrach le portant à un milliard de mètres cubes de gaz, sans tenir compte des règles commerciales conventionnelles et de sa part d'investissement. Plus draconienne est la règle dictée par la Commission espagnole exigeant que Sonatrach doit approvisionner la capacité d'alimentation du gazoduc sans prendre en compte la part qui lui revient, de manière à ce que la limitation de la capacité d'évacuation du gazoduc ne peut être en dessous des 80%. M. Khelil a reproché à l'Etat espagnol son ingérence dans le fonctionnement de la société Medgaz. Il a souligné, à l'occasion, les contradictions contenues dans ces décisions de la CNE qui d'un côté demande à Sonatrach d'"optimiser l'utilisation de la capacité de transport (…) dans le gazoduc Medgaz une fois celui-ci mis en service" et de l'autre impose des restrictions quant au volumes de gaz commercialisé par Sonatrach. Intransigeant, le ministre de l'Energie a précisé que Sonatrach, disposant des capacités équivalentes aux 36% du capital compte bien faire valoir ses droits. Il a ajouté que si le recours n'aboutit pas, alors Sonatrach conservera ses 26% dans la société et sa contribution dans la réalisation du projet se fera en fonction de ces 26%. Ce qui, inévitablement, entraînera un retard dans la mise en service et fera perdre au projet son attrait économique pour l'Algérie qui sera appelée à envisager d'autres options pour les quantités de gaz qu'elle ne pourra pas vendre. A ce titre, M. Khelil n'a pas écarté l'éventualité de vendre ces quantités ailleurs sous forme de GNL. Les rapports entre l'Algérie et l'Espagne semblent pâtir de l'incohérence ibérique. En effet, en plus des désaccords sur le Medgaz, il semble que l'on s'achemine, selon le ministre, vers l'arbitrage international concernant la renégociation sur les prix du gaz rendu à l'Espagne. Cette renégociation, entamée il y a deux ans et ne concernant que le tiers environ du gaz algérien exporté vers ce pays, vise à ajuster le prix considéré aujourd'hui par l'Algérie comme étant très bas par rapport au prix du marché. Yacine B.