Si elle se dit “soulagée” du climat dans lequel s'est déroulé le scrutin, “une victoire pour la démocratie et la souveraineté”, dit-elle, en dépit des menaces d'al-Qaïda, Louisa Hanoune, porte-parole du Parti des travailleurs (PT), ne cache pas sa “frustration” devant le nombre de sièges qui lui ont été attribués à l'issue du rendez-vous électoral de jeudi dernier, en raison essentiellement, à ses yeux, de la campagne “exemplaire” menée par le parti. “Il y a une progression du parti, certes, mais il y a des endroits où les résultats sont inacceptables”. “Ce n'est pas notre résultat !” clame-t-elle. Explication de Mme Hanoune : le grand nombre de “cas de fraude” relevés à travers de nombreux endroits du pays qui ont lésé le parti, et dont sont responsables les formations politiques, particulièrement celles de la coalition gouvernementale. “À Batna, la radio locale a annoncé qu'on a gagné un siège qui a disparu ensuite ; à Mascara, les P/APC ont fraudé ; à Sétif, les gens ont déserté les bureaux de vote pendant le match (finale de la Coupe arabe), ce qui a permis le bourrage des urnes ; à Djebahia (Bouira), le maire local a fait des siennes ; à Tizi Ouzou, des milliers de bulletins du RCD — je n'accuse pas ce parti, précise-t-elle — ont circulé ; enfin, à Rouiba, on a retrouvé des bulletins du RND et du FLN dans une urne…”, a-t-elle affirmé hier lors d'une conférence de presse au siège du Centre international de presse (CIP) à Alger. Malgré ces nombreux cas constatés, elle refuse cependant de parler de “fraude généralisée”, comme l'a fait la commission politique de surveillance des élections présidée par M. Bouchaïr, un “dérapage dangereux”, selon elle, mais des “dépassements”. “Je n'accable pas l'administration centrale, mais des militants des partis. Ce n'est pas une fraude généralisée, comme dit la commission”, estime-t-elle. Des partis, accuse-t-elle, qui n'hésitent pas à recourir à la corruption pour pousser les gens à voter. Dès lors, au PT, on demande à ce que les élections, notamment à Sétif et à Tizi Ouzou soient refaites. “Nous sommes pour que les élections soient refaites dans ces deux wilayas”, déclare Mme Hanoune. Estimant que “la composition de l'assemblée est un produit de la décomposition politique qui se généralise” et que “l'émiettement fait peur”, Louisa Hanoune considère que le message délivré par la population à travers l'abstention est “le refus des politiques adoptées par les gouvernants” et le “rejet de la décomposition”. Interrogé par Liberté s'il ne s'agissait pas donc d'un rejet de la politique menée par le président Bouteflika et par ricochet de la réconciliation nationale, Mme Hanoune a préféré focaliser ses philippiques sur les partis. “Les partis de la coalition ont été sanctionnés par-delà le programme du Président. Ce sont des partis qui étaient à l'assemblée et qui ont voté des lois libérales (…) Les discours de ces partis ont démoralisé. Je pense, il est vrai, qu'il y a des catégories de victimes du terrorisme et de familles de disparus qui attendent toujours des mesures, des solutions à leurs problèmes, mais pendant la campagne, beaucoup de gens m'ont exprimé leur désir du parachèvement du processus de réconciliation (…)” “Vous avez vu Bouteflika à Annaba, les gens sont sortis en force pour l'accueillir. Pour nous, ce n'est pas donc une sanction contre le Président, mais contre les partis”, explique-t-elle. Le PT est-il prêt à rejoindre l'Exécutif ? “Pour quoi faire ? Il faut rompre avec cette politique. S'ils changent d'orientation, ils n'ont pas besoin du PT car pour nous, c'est la majorité qui gouverne ! Mais s'ils gouvernent ensemble, nous avons des inquiétudes”, affirme, le propos sibyllin, Mme Hanoune. Elle ajoute : “Nous leur demandons de bien méditer les résultats.” “Il faut une réponse d'urgence”, conclut-elle. Le PT a gagné 26 sièges. 11 parmi les nouveaux députés sont des femmes. K. K.