Les forces de sécurité se sont adressées directement à la jeunesse, en participant à une journée de sensibilisation organisée par un établissement de formation professionnelle de la capitale. “N'essaie pas de prendre de la drogue, car c'est bien elle qui finira par prendre ta santé, ton argent, ta dignité…” C'est sous ce slogan que les cellules d'écoute et de prévention contre la délinquance juvénile du groupement de gendarmerie d'Alger et de la sûreté de daïra de Chéraga ont organisé, hier, une journée de sensibilisation contre la toxicomanie en milieu scolaire. Le centre de formation professionnelle de Chéraga où s'est déroulée la manifestation a connu une animation particulière avec la présence en force des représentants des deux corps de sécurité. Les jeunes pensionnaires de cet établissement ont d'ailleurs suivi avec grand intérêt les différents exposés traitant des méfaits et des ravages de la drogue même si l'alerte rouge n'a pas encore sonné comparativement à d'autres sociétés. Pour mettre dans le bain les adolescents, la journée a été ouverte par la projection d'un excellent film-documentaire réalisé par les services de la communication du MDN ayant pour thème “La consommation de la drogue, une mort lente”. Le film débute par les méfaits du tabac avant d'aborder dans la seconde partie les désastres de la drogue avec des témoignages à visage découvert d'anciens drogués ayant bénéficié de traitements de désintoxication. Abondant dans ce sens, le chef de la sûreté urbaine de Chéraga rappelle que le fléau de la drogue, qui touche de plus en plus notre pays, ne date pas d'aujourd'hui dans le sens où l'Algérie a toujours servi de zone de passage et de convoiement de stupéfiants venant du Maroc et des pays de l'Afrique subsaharienne. En 1975, trois tonnes de cannabis ont été saisies et plusieurs personnes étrangères impliquées dans l'affaire. En 2002, plus de six tonnes ont été interceptées, ce qui prouve que le trafic augmente avec les années. Rappelant à l'occasion que 70% des Algériens ont moins de 30 ans et que, selon une étude menée dans le milieu des jeunes lycéens, 45% d'entre eux ont déclaré avoir consommé au moins une fois de la drogue alors que 12% le font régulièrement. Une étude faite sur un échantillon de 500 élèves. La première cause attribuée à ce phénomène reste sans conteste la démission parentale. Le jeune pénètre ce “monde” par curiosité avant de sombrer au bout de quelque temps dans l'enfer de la dépendance. La chargée de la cellule d'écoute et de prévention, l'inspectrice Wahiba Taâbane, relève que la mission qui lui est dévolue n'est pas facile compte tenu des sujets tabous pour la famille algérienne. En 2005, cette cellule a pu récupérer et réintégrer dans leur famille 12 jeunes à Chéraga. Certains d'entre eux ont même pu passer l'examen du BAC avec succès. C'est dans ce sens qu'elle lance un appel aux familles, aux jeunes présents dans la salle afin d'orienter d'éventuels cas de délinquance pour leur prise en charge. Pour sa part, Mlle Zohra Boukaoula, la psychologue de la cellule de lutte et de prévention contre la délinquance, a su intéresser les jeunes par son habituel franc-parler. Ayant constaté leur intérêt manifeste, elle franchit le pas du tabou avec une histoire tirée du vécu. Celle d'un inceste à l'origine de la dislocation d'une famille. Une relation sexuelle entre un adolescent de 18 ans et sa sœur de 17 ans qui tombe enceinte de lui. Une affaire dans laquelle le frère connaît la prison alors que la jeune malheureuse se retrouve au centre de rééducation de Birkhadem. Le garçon, sous l'effet de la drogue et profitant de l'absence de la mère, femme de ménage divorcée, abuse de sa sœur. La psychologue explique par projection du diaporama l'effet des stupéfiants sur le système nerveux en prenant comme cobaye l'araignée soumise à une dose d'héroïne et qui n'arrive pas à tisser systématiquement sa toile. Dans la foulée, elle attire l'attention des jeunes filles à ne pas succomber à des tentations souvent fatales. Le cas de ce vieux, un hadji de 54 ans est cité en exemple. Il a réussi à appâter pas moins de 23 filles dans sa villa à Bouzaréah et sur lesquelles, il a assouvi ses bas instincts allant même jusqu'à prendre des photos pornographiques dans le but de les faire chanter. “La consommation de la drogue fait commettre le pire”, dira Mlle Boukaoula. La relayant, Wahiba, un officier travaillant dans la même cellule, a tenu à rappeler l'article 267 du code pénal relatif à la violence sur ascendant et qui prévoit des peines allant de 5 à 20 ans de prison. C'est dire que la loi est dure dans ce domaine mais qui ne semble pas dissuader les récalcitrants. Le représentant des affaires religieuses insiste, quant à lui, sur la question en citant les versets du Coran rappelant ainsi les principes et les traditions auxquels appartient la société algérienne. Il préconisera même d'inclure une matière dans le système éducatif ayant trait au respect de l'ascendance. Dans un bilan détaillé de la gendarmerie sur les mineurs victimes de violences criminelles relatif au mois de février, mars et avril de l'année en cours, il a été enregistré 390 cas, notamment pour coups et blessures volontaires avec arme blanche, attentat à la pudeur et tentative d'incitation à la débauche. Le nombre de mineurs mis en cause durant les quatre premiers mois de l'année 2007 s'élève à 1 852 cas essentiellement pour coups et blessures volontaires avec arme blanche, immigration clandestine et association de malfaiteurs et vols qualifiés. De même que durant la même période, 65 affaires ont été traitées e liées aux violences sur ascendant. Comparativement, en 2006 sur 5 659 personnes arrêtées, 38 sont des mineurs. Quant aux mineurs “victimes de violences criminelles, il a été enregistré 18 882 cas dont 1 677 mineurs”. Ali Farès