Hier, Hamas avait sous son contrôle total la bande de Gaza coupée du reste du monde. En effet, les points de passages avec Israël et l'Egypte ayant été fermés “jusqu'à nouvel ordre” par l'armée israélienne. À part quelques tirs sporadiques en l'air, les rues de la ville de Gaza étaient calmes et des habitants ont commencé prudemment à sortir dans leurs quartiers après être restés terrés chez eux du 7 au 14 juin pour se mettre à l'abri des combats d'une extrême violence qui ont fait 113 morts. Les drapeaux verts du mouvement islamiste flottent désormais sur les quartiers généraux de la Sécurité jadis contrôlés par le Fatah, un mouvement qui pendant plus de 40 ans dominait la vie politique palestinienne. Les barrages disséminés dans les rues de Gaza ont pratiquement disparu et les automobilistes circulent librement. Dans le complexe présidentiel, des activistes de la branche armée du Hamas ont emporté ordinateurs, documents et armes, ont affirmé des témoins. Ils se sont aussi emparés des voitures officielles laissées sur place. Le Hamas avait annoncé avant l'aube avoir pris le contrôle de l'ensemble de la bande de Gaza après avoir pris le contrôle de la totalité des sièges des forces de sécurité fidèles à Mahmoud Abbas, qui a dénoncé depuis la Cisjordanie un coup militaire et limogé le gouvernement d'union dominé par les islamistes. M. Abbas a aussi annoncé son intention de former un gouvernement d'urgence dont la composition est attendue dans les prochains jours. De son côté, le Premier ministre issu du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a qualifié de “précipitées” les décisions de M. Abbas, affirmant que le gouvernement qu'il dirige “va continuer à assumer ses fonctions”. Le Hamas a annoncé avoir arrêté de hauts responsables du Fatah et des services de sécurité, dont le général Jamal Kayed, directeur général de la Sûreté nationale, le général Misbah Al-Bheis, chef de la garde présidentielle, Tawfiq Abou Khoussa, porte-parole de la Sûreté nationale et du Fatah, et Majed Abou Shamala, haut responsable du Fatah. Résumant parfaitement la situation difficile dans laquelle se retrouve désormais la cause palestinienne, Abou Saïd, concierge dans une école proche, dit : “Nous avons porté le coup de grâce à la cause palestinienne de nos propres mains. Ce qui s'est passé nous a ramenés des dizaines d'années en arrière. Le monde ne reconnaîtra jamais un Etat palestinien à Gaza et un autre en Cisjordanie.” Gaza est un territoire exigu de 362 km2, situé en bordure de la Méditerranée, où s'entassent 1,5 million de Palestiniens, soit l'une des densités les plus fortes au monde. Située au sud-ouest d'Israël, limitrophe de l'Egypte, la bande de Gaza est une région côtière, longue de 45 km et large de six à 10 km, dépourvue de ressources naturelles. Elle souffre d'une pénurie chronique d'eau et est presque sans industrie. Pendant plusieurs décennies, 8 000 colons israéliens y ont vécu dans 21 colonies, sous la protection de l'armée israélienne, avant le retrait unilatéral de l'été 2005. Selon des chiffres officiels palestiniens, plus de la moitié des habitants de la bande de Gaza vivent sous le seuil de la pauvreté et au moins 45% de la population active est au chômage. K. A./Agences