Les objets fabriqués dans ce village, où de nombreuses entreprises familiales ont vu le jour, sont commercialisés dans des localités hors de la wilaya de Tizi Ouzou, comme M'sila, et à l'étranger, en France notamment. L'artisanat prend de plus en plus d'essor dans les petites villes et les villages de ce versant sud de la wilaya. Si dans la localité de Frikat, c'est la fabrication traditionnelle du couscous qui prend le dessus, à Aïn Zaouïa, c'est plutôt la poterie traditionnelle qui est ressuscitée. Effectivement, sur la RN30, deux enfants viennent exposer quotidiennement une variété d'ustensiles en argile, en face du CEM d'Aïn Zaouïa. Ils ont tous les deux l'âge d'aller à l'école. Samia et son frère Hakim nous apprennent des choses sur ce métier qu'ils exercent en dépit de la canicule sévissant ces derniers jours sur la région. “Ce sont des poteries que notre mère fabrique à la maison. Elle est sans profession. C'est sa mère qui lui a appris à les façonner. Elles sont tout à fait différentes de celles fabriquées par l'unité d'en face. C'est d0e l'argile rouge”, répond gentiment le garçon de manière à nous convaincre. Avant que sa sœur n'intervienne pour donner son avis sur la qualité de leurs objets : “Moi aussi, j'aide ma mère non seulement dans la préparation de la pâte à argile, mais aussi dans la cuisson et la décoration.” Plus loin, c'est un jeune homme qui tient une échoppe à proximité du barrage fixe de la Gendarmerie nationale, en face de la maison de jeunes. Cet homme n'est ni fabricant ni artisan, mais un simple revendeur. “J'achète ces ustensiles pour les revendre. C'est juste pour gagner ma vie. Il ne faut pas oublier qu'ici à Aïn Zaouïa, ce travail a pris de l'essor. Mes clients ne sont que des gens de passage”, a confié ce revendeur. À propos du travail de l'argile dans la localité, ce citoyen confirme que c'est un retour de manivelle en ces temps de vaches maigres. Il montre alors un quartier appelé Imouhouchène, situé dans ce qu'on appelle Aïn Zaouïa–Haut. Croyant avoir affaire à un potentiel client, le premier homme rencontré nous accueille avec finesse. “Bienvenue dans notre village. Ici, on ne vend pas de la camelote. C'est la véritable poterie kabyle”, nous lance-t-il d'emblée pour vanter les produits fabriqués au sein de son entreprise familiale. “C'est un travail purement traditionnel. La matière est l'argile rouge. Le façonnage, le polissage, la décoration et la cuisson sont l'œuvre de nos femmes. Elles n'ont pas besoin de produits nouveaux ni de machines”, nous explique-t-il. Et d'ajouter : “Pour nous, la poterie est sacrée. C'est surtout pour ne pas oublier notre culture. Certes, c'est plus difficile de se lancer dans cette activité avec les moyens du bord, mais c'est plus joli. La seule aide que nous demandons à l'Etat c'est de nous donner des locaux spacieux.” Les objets fabriqués dans ce village, où de nombreuses entreprises familiales ont vu le jour, sont retrouvés dans des localités hors de la wilaya de Tizi Ouzou, comme M'sila, et à l'étranger, en France notamment. Aïn Zaouïa devient de plus en plus un carrefour de la poterie traditionnelle avec l'engouement des clients venant des quatre coins du pays pour s'en approvisionner ou faire des commandes. Non loin de là, et plus précisément à Aït Ali, un village de Frikat, c'est plutôt le travail de la laine qui est reconsidéré pour devenir un gagne-pain à de nombreuses familles démunies. Sur place, nous avons eu, par le biais d'un responsable du comité de village, le contact avec l'une des femmes très réputées pour son art dans le tissage des tapis et des burnous traditionnels. “Il faut que nos jeunes filles se mettent à l'œuvre. Il n'y a pas seulement la broderie ou la couture. Je les incite toujours à apprendre à tisser. Dans le temps, la fille ne se mariait pas si elle ne savait pas tisser un burnous pour son mari”, dit na Thassaâdit, constamment derrière son métier. Joignant le geste à la parole, celle-ci montre le premier burnous qu'elle avait confectionné pour son mari, juste après son mariage, tombé au champ d'honneur, après avoir gagné le maquis pendant la guerre de libération nationale. Na Thassaâdit continue à faire ce métier non seulement parce que “c'est une marque de notre culture à sauvegarder, mais parce que cela me permet aussi de vivre”. Actuellement, ajoute-t-elle, “je constate avec étonnement que de nombreuses jeunes femmes viennent me voir pour commander des "ihouyak" (couvertures traditionnelles). C'est quelque chose d'original, mais cela revient très cher. Ce n'est plus comme avant, lorsque la laine utilisée provenaient de nos bêtes. Aujourd'hui, nous achetons cette matière au prix fort”, conclut Na Thassaâdit. O. Ghilès