Les soutiens inconditionnels des Etats-Unis à Israël représentent une donnée décisive dans la perte d'influence américaine au Proche et Moyen-Orient, dans les opinions publiques arabo-musulmanes d'une manière générale. À ce facteur récurant se greffe la guerre en Irak et celle d'Israël au Liban avec la complaisance des Etats-Unis. “Le mal était déjà fait”, juge Hicham Salem, un expert du monde arabe au Centre de recherche indépendant USIP (United States Institute of Peace), cite l'agence France presse. Selon l'expert, l'invasion et l'occupation de l'Irak avaient déjà renforcé la perception croissante dans la région que Washington soutiendra toujours Israël, quoi qu'il fasse. La certitude s'est réaffirmée dans le conflit israélo-libanais. Alors que la communauté internationale plaidait majoritairement pour un cessez-le-feu immédiat entre le Hezbollah et l'armée israélienne, Washington refusait pendant plusieurs semaines d'appeler Israël à suspendre les hostilités, qui ont tué plus de 1 200 Libanais, des civils, et détruit l'économie libanaise en expansion. Et lorsqu'elle s'est finalement rendue dans la région, fin juillet, la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, a comparé cyniquement les destructions israéliennes au Liban aux douleurs de l'accouchement d'un nouveau Proche-Orient démocratique ! Une sentence perçue dans la région comme la marque du mépris de l'administration américaine à l'égard des vies arabes. Du reste, Washington n'a pas attendu pour perdre ce qu'il lui restait comme crédit au Liban. Même les régimes modérés ont commencé à ruer dans les brancards, Mme Rice en sait quelque chose puisqu'elle n'est pas parvenue à leur alignement sur les Etats-Unis face à Téhéran et Damas où le Hamas dans les territoires palestiniens. Ryad, Le Caire et Amman, pour ne citer que ceux-là, savent désormais qu'ils doivent mesurer leurs soutiens à Washington en porte-à-faux avec leurs propres opinions publiques. Mme Rice avait dû renoncer l'an dernier à une deuxième visite à Beyrouth, le Premier ministre Fouad Siniora, pourtant pro-américain, lui ayant fait savoir qu'elle n'était pas la bienvenue. Pour Zbigniew Brzezinski, l'influence des Etats-Unis dans le monde arabe est de plus en plus réduite. Pour l'ancien conseiller à la sécurité nationale de Jimmy Carter et concepteur de la mondialisation, certaines des actions américaines contribuent à un risque d'explosion régionale. Il fallait le dire. D. B.