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Chérif Abbas demande les archives à la France
le ministre des Moudjahidine monte au créneau
Publié dans Liberté le 21 - 07 - 2007

Le ministre des Moudjahidine a indiqué qu'il s'agit là d'un “sujet difficile”. Selon lui, les autorités algériennes continuent à les réclamer, mais “l'autre partie n'est pas prête à les mettre à notre disposition”. Cela, d'autant que des personnalités politiques françaises ayant participé à la guerre d'Algérie sont “encore au pouvoir”.
Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a décidé que la commémoration du 45e anniversaire de la fête de l'Indépendance de l'Algérie durera une année, c'est-à-dire jusqu'au 5 juillet 2008. C'est ce qu'a laissé entendre le ministre des Moudjahidine, Mohamed Chérif Abbas, lors d'une rencontre qui s'est tenue, jeudi dernier, au Musée du Moudjahid à Riadh El-Feth, à Alger, en présence des membres de la commission nationale de préparation des festivités des journées et fêtes nationales, des représentants d'organisations et d'associations nationales et des médias nationaux. Le ministre s'est excusé de ce “retard” dans l'information, puis a livré le détail du programme des festivités avant de se consacrer à la “discussion générale” avec les journalistes. Invité à commenter la visite récente en Algérie du président français, en particulier ses déclarations sur le refus du repentir, l'intervenant a fait montre d'une grande prudence, estimant qu'il est trop tôt de se prononcer sur le sujet, étant donné qu'il est “nouvellement élu”. M. Chérif Abbas a, cependant, noté que “notre position est que l'Etat français est l'ancien ennemi de l'Algérie”. Interpellé sur son attachement ou non à la question de repentance par la France, il a soutenu que “les moudjahidine sont indissociables du peuple algérien qui tient à cette repentance”. Pour le ministre, la colonisation est un fait réel puisqu'elle a engendré plusieurs maux, dont “l'analphabétisme”, “les souffrances” et “les douleurs”. Il donnera également pour preuve les essais nucléaires dont les effets continueront, selon lui, à se manifester pendant plusieurs décennies et qui demeurent, par conséquent, un sujet d'actualité. “Notre but n'est pas de remuer le couteau dans la plaie ni de faire revivre les hostilités. Nous voulons parler de réalité et de notre histoire, pour les faire connaître à nos jeunes et aux générations futures”, a-t-il ajouté. Interrogé sur les raisons du retard mis pour récupérer les archives, toujours conservées par les Français, Mohamed Chérif Abbas a répondu qu'il s'agit là d'un “sujet difficile” . Selon lui, les autorités algériennes continuent à les réclamer, mais “l'autre partie n'est pas prête à les mettre à notre disposition”. Cela, d'autant que des personnalités politiques françaises ayant participé à la guerre d'Algérie sont “encore au pouvoir”. “À mon avis, ces archives portent sur des crimes commis pendant la période de la colonisation”, a révélé le conférencier, non sans indiquer qu'il est du droit des Algériens de prendre possession de ces archives. Pourtant, le ministre des Moudjahidine a marqué un certain recul à la question relative à un dépôt d'une plainte officielle contre la France pour crimes contre l'humanité pendant la période coloniale. D'après lui, “l'Algérie est en position de force”, mais la presse nationale joue bien ce rôle-là. “La presse est en train d'attaquer moralement l'ancien ennemi. Elle a plus d'influence”, a-t-il certifié.
Concernant les réclamations des ex-pieds-noirs qui demandent à être indemnisés pour avoir perdu leurs biens en Algérie, M. Abbas les a qualifiées d'“injustes”. Sans aller jusqu'à déclarer qu'une telle démarche défensive vise à culpabiliser les Algériens, le ministre a enfin réagi et reconnu qu'”en réalité, il faut inverser les choses, car c'est aux Algériens de demander des réparations pour tout ce qu'ils ont subi pendant la colonisation”. Il a, en outre, situé le statut de “colons” des ex-pieds-noirs, rappelant que les réalisations et les ouvrages entrepris pendant la période coloniale se sont faits avec “les moyens et les ressources de cette terre qu'ils ont colonisée”.
“La génération harraga a sa propre culture”
La conférence de presse a également permis d'aborder la problématique du nationalisme à l'heure de la mondialisation, en relation avec l'indifférence affichée par bon nombre de jeunes Algériens par rapport à ce sujet.
Cette question, jugée à la fois “importante” et “gênante” par le ministre, trouverait des réponses dans “la décennie noire”, “le terrorisme” et “les empreintes douloureuses” qu'ils ont laissées, ainsi que dans “la fuite de la pensée intellectuelle”. “Le nationalisme est l'affaire de tous, de l'éducation nationale, de la culture, etc.”, a-t-il signalé. Il a, par ailleurs, relevé que “la mondialisation est imposée aux peuples”, qu'il revient à chaque Etat de faire en sorte qu'elle soit “dans l'intérêt du peuple”. Interpellé de nouveau sur la définition qu'il donne au nationalisme en 2007, le ministre a dévoilé que celle-ci ne saurait faire l'impasse sur “la citoyenneté”, “la communication vers le citoyen avec des moyens modernes” et “l'ouverture vers le monde”. C'est dans cet esprit, laissera-t-il entendre, que doit s'inscrire l'écriture de notre histoire, notamment celle de la guerre de Libération nationale, car elle est du ressort de “la responsabilité collective” impliquant toutes les institutions, les différents ministères et les médias.
En marge de la rencontre, le ministre des Moudjahidine a déclaré à Liberté que les jeunes harragas, ceux-là mêmes qui se sentent lésés en Algérie et qui partent à la recherche d'horizons leur paraissant meilleurs, “n'ont pas suffisamment de maturité pour savoir ce qu'est une nation.” Et à la question de savoir pourquoi ces jeunes ont désappris l'amour de leur pays au point d'éprouver des difficultés de se projeter dans l'avenir algérien, Mohamed Chérif Abbas s'est contenté de cette seule réponse : “Chaque génération a sa propre culture.”
H. Ameyar


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