Six mille femmes violées par les terroristes, de 1991 à nos jours. Un chiffre qui laisse planer le doute, surtout que le même document indique que 1 000 à 3 000 jeunes filles ont été violées uniquement dans les maquis de Saïda, durant le mois d'avril 1998. Initiative délicate que d'aborder le sujet du viol, de l'inceste et du harcèlement sexuel. Cela reste toujours une démarche difficile, surtout en l'absence de mesures de prévention. Et si l'omerta et le poids du tabou sont moins pesants qu'ils ne l'étaient auparavant, la société algérienne, comme d'autres sociétés, a encore du mal à évoquer les violences sexuelles subies par les femmes. La Déclaration des Nations unies pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes identifie trois types d'auteurs des agressions. Il s'agit, en premier lieu, de la famille, où sont recensées les violences liées à la dot, le viol conjugal, les mutilations génitales et d'autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la femme. “La violence non conjugale est celle liée à l'exploitation. La deuxième catégorie est la collectivité, espace dans lequel les femmes sont victimes de viol et de sévices sexuels, de harcèlement et intimidation au travail, alors que la dernière est celle de l'Etat responsable de violences qu'il a directement perpétrées ou qu'il a tolérées. Cette catégorie englobe la violence engendrée par la législation d'un Etat. À ce titre, l'étude indique que l'Algérie est touchée par les trois catégories avec comme dénominateur commun, l'insuffisance des politiques développées par les autorités publiques pour prévenir ces violences et punir leurs auteurs.” Considérés comme des fléaux tabous et marginalisés, malgré leurs répercussions psychologiques et sociales, notre société refuse souvent aux femmes le statut de victime. Quelle justice a été rendue aux femmes de Hassi-Messaoud ? L'étude qui pointe du doigt le système patriarcal et les inégalités entre femmes et hommes comme principales cause du viol et de l'inceste analyse l'impact et les traumatismes engendrés par ce genre de violences. “Les mariages de jouissance imposés par les terroristes, durant les années 1990, ont été la meilleure couverture pour les viols organisés. Certaines filles et femmes violées ont été livrées, généralement, par leur père, mère et voisins pour les “moudjahidine” de la cause islamiste contre leur propre gré, comme l'histoire de la jeune mère la terroriste arrêtée à Annaba avec ses 7 enfants issus de 4 “émirs”, par les forces de l'Armée nationale populaire”. Le texte rappelle, également, le traitement réservé aux femmes violées par des terroristes et auxquelles l'indemnisation en tant que victimes de guerre a été refusée sous prétexte que la pension qu'elles recevraient chaque mois “leur rappellerait l'acte de viol et que, quelque part, cela équivaudrait à de la prostitution. Donc, la reconnaissance des femmes comme victimes de guerre n'est pas d'actualité”. 6 000 femmes ont été violées par les terroristes, de 1991 à nos jours, beaucoup d'entre elles ont été assassinées, précise le document. Un chiffre qui laisse planer le doute, surtout que le même document indique que 1 000 à 3 000 jeunes filles ont été violées uniquement dans les maquis de Saïda, durant le mois d'avril 1998. Et si, aujourd'hui, la loi du silence se brise, graduellement, quant aux violences commises par une personne étrangère à la famille, l'inceste reste le grand sujet tabou, où la famille préfère éviter le scandale. Cet état des choses pousse les auteurs des “crimes sociaux” à récidiver. Loin de refléter l'ampleur du drame, les chiffres officiels, recueillis auprès des tribunaux, avancent 25 cas de relations sexuelles entre parents, dont 20 entre père et filles, 3 entre fils et mère et 2 entre frères et sœurs. “Les chiffres de l'inceste sont voilés et tus, car la sauvegarde de l'esprit de famille, surtout si les conjoints sont unis, la peur du scandale, les représailles en cas de couples séparés sont autant de cause pour l'étouffement de ces affaires.” Le bilan des services de la gendarmerie pour l'année 2006 fait état de 215 viols ou tentatives de viol, ayant abouti à 299 arrestations sur le territoire national. Il a également été enregistré 408 attentats à la pudeur, ou tentatives avec ou sans violence sur personnes mineures et 153 viols ou tentatives de viol sur des mineurs, où 131 personnes ont été arrêtées pour 136 affaires traitées. À rappeler que les peines mentionnées dans l'article 337 du code pénal varient entre 2 et 20 ans de réclusion pour les cas d'inceste (en fonction du degré de parenté). W. L.