Cette tradition remonte au XVIe siècle lorsque, de son vivant, le saint Sidi M'hamed Benaouda, qui était à la tête d'une zaouïa fondée par lui-même, organisait cette waâda à la clôture de la saison des moissons. Fidèles à Sidi M'hamed Benaouda, qu'elles vénèrent depuis bien des siècles, les populations des tribus Flittas, regroupant plusieurs contrées des wilayas de Relizane, de Tiaret et de Mascara, étaient au grand rendez-vous depuis lundi dernier, et ce, durant trois jours, avec l'une des plus célèbres et anciennes waâdas, appelée touiza, en hommage à ce saint homme. Ainsi, de Rahouia (Tiaret) à El Matmar (Relizane) et Oued El Abtal (Mascara), les citoyens sont conviés à un couscous bien garni à la viande de mouton et arrosé de miel pur et de beurre de vache. “Cette tradition remonte au XVIe siècle lorsque, de son vivant, le saint Sidi M'hamed Benaouda, qui était à la tête d'une zaouïa fondée par lui-même et qui porte toujours son nom, se faisait réserver une parcelle céréalière par chacune des 25 tribus qui le flagornaient, dont les moissons clôturaient la saison et sanctionnaient par une offrande publique”, nous relate cet homme portant un ample burnous ébène. Ce dernier qui porte des habits aux innombrables plis savants et compliqués se distingue par un regard acéré et un sérieux imperturbable, faisant de lui un cheikh et un maître respecté de ceux qui venaient l'écouter. En substance, il affirme que le saint Sidi M'hamed exhortait ses troupes à servir les gens à satiété comme il leur recommandait d'arroser le couscous roulé à l'occasion avec des produits du terroir, notamment le miel de saison. Cependant, si cet événement, dont le point de chute est la zaouïa portant ce grand et prestigieux nom, a suscité une affluence singulière, il a aussi été caractérisé, auparavant, par une préparation soumise à des processions d'adeptes, munis d'emblèmes, de banderoles et autres étendards multicolores confectionnés à l'occasion, et sillonnant durant plusieurs jours, au rythme du karkabou, les différentes artères des localités concernées comme pour annoncer la waâda, alors qu'une nouvelle khaïma, devant abriter la waâda, est confectionnée à cet effet. Néanmoins, les organisateurs ont quelque peu dérogé à la tradition ces dernières années, et la faille se trouve incontestablement dans le camp des autorités locales, quand on sait que la manifestation est amputée de certains ingrédients qui faisaient tout son charme, à savoir l'absence de cette fantasia conduite par des dizaines de “ridjal al-carabina oul baroud” qui égayaient la fête en émerveillant l'assistance. Autrement dit, on ne voit plus, en cette occasion, comme en tant d'autres pareilles, ces cavaliers qui enfourchaient leurs magnifiques pur-sang arabes, richement décorés pour sillonner, comme à chaque waâda, les artères principales des villes. Par ailleurs, les hôtes de la communauté flittie et sa descendance n'ont pas manqué le déplacement pour le pèlerinage à la zaouïa de Sidi M'hamed Benaouda, située dans la wilaya de Relizane, où la récolte des parcelles cédées est distribuée aux adeptes du saint vénéré. En épilogue, des sages sont là pour intervenir et tenir un langage ancestral à leurs pairs qui n'auront qu'à les écouter en laissant montrer sur chaque visage une profonde envie de savoir, un désir de se démarquer de l'ignorance. R. SALEM