L'attentat à la bombe perpétré à Larbaâ mardi dernier contre Mustapha Kertali, l'ex-“émir” de l'AIS, appelle une relecture de ce qui s'avère une “stratégie” singulière (?!!) développée par l'ex-GSPC à la faveur de la grande offensive de l'ANP, si tant est que ce qui s'apparente à un “mimétisme” relève de l'action planifiée plutôt que d'un “jusqu'au-boutisme” à tout le moins suicidaire. Mais qu'à cela ne tienne, aujourd'hui le modus operandi d'al-Qaïda au Maghreb reste significatif de perte de ses propres repères au profit de la stratégie de la nébuleuse de Ben Laden, qui peine à trouver une raison d'être en Algérie. Manifestement, l'attentat contre Mustapha Kertali se décline à un moment de réelle perte de vitesse comme un énième acte désespéré du GSPC pour reprendre l'initiative. Le profil de Mustapha Kertali, à l'évidence, privilégie l'hypothèse qui voudrait que l'ex-GSPC entend faire feu de tout bois pour torpiller le processus de paix appuyé désormais par un véritable “effort de guerre” tendant à l'éradication des dernières poches de résistance terroristes. Kertali est monté au maquis et fut nommé “émir” de l'AIS pour la région de Larbaâ. Il avait rejoint ensuite les rangs du Groupe islamique armé (GIA). Il cessa ses activités terroristes en 1997. Un coup d'éclat contre lui reste quand même un message fort contre le repentir de plus en plus manifeste dans les rangs de l'ex-GSPC depuis que l'ANP s'est redéployée sur le terrain. Il faut dire qu'avant les attentats meurtriers d'Alger, l'ex-GSPC avait une large marge de manœuvre, l'armée se contentant d'opérations ponctuelles en réaction à des incursions de groupes terroristes en dehors des villes ou à des attentats qui ciblaient des éléments des forces de sécurité. Les orientations du président de la République avaient amené l'ANP à mobiliser de gros moyens et à occuper les principaux fiefs de l'ex-GSPC en permanence. La décision de prendre pour cible le Palais du gouvernement, sans doute une orientation du commandement d'Al-Qaïda, aura donc été la chose à ne pas faire. La politique de réconciliation et l'offre d'amnistie courent toujours, alors que l'étau de l'ANP se resserre autour des irréductibles. Conséquence, les défections sont de plus en plus nombreuses. L'exemple du chef terroriste Mossâab Abou Daoud, alias Ben Messaoud Abdelkader, qui s'était rendu aux autorités de la wilaya de Djelfa au début du mois de juillet dernier, reste à cet égard très édifiant. Son témoignage et celui d'autres terroristes qui ont déposé également les armes attestent de la déliquescence de l'organisation dirigée par Abdelmalek Droukdel. Le désaccord est aujourd'hui de plus en plus manifeste entre les différents chefs de cette organisation terroriste principalement avec la radicalisation décidée par Droukdel appréhendée comme le commencement de la fin par les propres troupes du GSPC, dont nombreux sont les éléments qui cherchent l'opportunité pour se rendre aux forces de sécurité. L'attentat contre Kertali peut trouver son explication dans une sorte d'avertissement donné aux potentiels repentis sur les représailles qu'ils encourent en cas de défection. En ce sens, le choix de l'ex-chef de l'AIS relève, dirions-nous, de cette symbolique qui frappe les esprits. Les rangs du GSPC se réduisent comme peau de chagrin et les possibilités de recrutement de ce groupe terroriste se rétrécissent de jour en jour. D'autant plus que ses réseaux de soutien ne disposent plus de coudées franches. Le renfort de terroristes étrangers, tunisiens marocains, libyens… attirés au début par une propagande qui donnait le GSPC comme une organisation structurée, bien dotée en moyens humains, matériels et financiers, aura fait illusion. Car face à une toute autre réalité que celle vantée sur Internet, la majorité des légions étrangères commencèrent alors à quitter le pays, aidées en cela par une pression sans relâche exercée par les forces de sécurité dans les maquis. “Les rares recrues étrangères encore présentes en Algérie le sont parce qu'elles n'ont pas d'autre choix, ou n'ont pas encore trouvé le moyen de regagner leur pays d'origine”, témoignait Mossâab Abou Daoud. Nombre d'observateurs de la scène sécuritaire estiment que le ralliement du GSPC à la nébuleuse d'al-Qaïda est l'expression de l'échec du terrorisme en Algérie. Si l'on considère, en effet, que cette allégeance reste ce que sans doute Abdelmalek Droukdel avait estimé être le moyen pour le GSPC de revitaliser une image de plus en plus effacée, c'est ce qui peut expliquer le recours aux attentats kamikazes, au kidnapping et à l'attentat à la voiture piégée contre Kertali, plutôt connus au Proche-Orient et qui donnent cette fausse impression de puissance. Zahir Benmostepha