Sarkozy, qui a promis de remplacer la “Françafrique” par l'“Eurafrique”, cherche à se replacer dans le continent au travers de la crise du Darfour. Il a le feu vert des Américains. Paris veut jouer un rôle dans la crise du Darfour. Cette ambition a certainement obtenu l'aval des Etats-Unis qui ont d'autres chats à fouetter, en Irak notamment où le chaos est inextricable. La décision de Sarkozy de déployer des troupes de l'UE et de l'ONU dans les dernières “chasses gardées” de la France en Afrique, le Tchad et la République centrafricaine, a tout l'air de procéder d'un arrangement entre Paris et Washington, d'autant que le nouveau président français ne fait pas mystère de sa détermination de remettre son pays dans le giron atlantiste. Le Soudan a, d'ores et déjà, réfuté la proposition de déploiement de troupes de l'UE et de la police des Nations unies dans les deux pays frontaliers tout en s'interrogeant sur l'explication de Paris selon laquelle ce dispositif vise à assurer la protection des civils pris dans le flot des populations fuyant le Darfour vers l'est du Tchad et le nord-est de la République centrafricaine. Le nouvel ambassadeur de France aux Nations unies, Jean-Maurice Ripert, s'est dit convaincu de voir le Conseil de sécurité approuver la proposition française mais le Conseil des ministres de l'UE ne devra se prononcer sur les forces européennes que le 17 septembre. La France a beau insister sur l'aspect humanitaire de sa proposition invoquant 600 000 réfugiés au Tchad et en Centrafrique, l'équipée est bel et bien d'ordre militaire dès lors qu'il s'agit de protéger les frontières de ces deux pays où les populations nourrissent des ressentiments à l'égard de leur ancien colonisateur. Paris dispose dans ces deux pays de l'essentiel de ses forces d'intervention établies en Afrique. En outre, et comme pour ajouter de la suspicion, le vice-ambassadeur américain à l'ONU, Alejandro Wolff, a déclaré que les Etats-Unis soutenaient la proposition ajoutant que les questions sur les relations entre l'UE, l'ONU et le gouvernement tchadien ainsi que sur le rôle de la force, son mandat et sa durée pourraient être examinées ultérieurement. Le président tchadien, Idris Deby, qui s'est opposé à la proposition de Ban Ki-moon en vue d'un déploiement d'une force militaire des Nations unies, a donné son accord à la proposition de Sarkozy, qu'il a rencontré en juin dernier à l'occasion du sommet sur le Darfour à Paris en l'absence du Soudan. Après s'être aligné sur les Etats-Unis dans la guerre en Irak et, cela va de soi, ses conséquences régionales et internationales, Sarkozy ne va-t-il pas se faire également sous-traitant dans le Sub-Sahara ? D. Bouatta