400 bébés-éprouvette sont nés en Algérie ces dix dernières années. Pour les spécialistes, c'est une prouesse eu égard au peu de moyens et au non-remboursement des actes par la Cnas. Trois centres de procréation médicalement assistée seront inaugurés d'ici à 2009 à Oran, Alger et Constantine. Ces trois premiers établissements publics du genre viendront renforcer les 7 centres privés existants depuis une dizaine d'années pour certains. Pour le moment, en effet, le recours à cette technique de procuration n'est possible que dans le secteur privé. L'ouverture de ces structures étatiques arrive à un moment propice, car le recours à ces techniques devient de plus en plus usuel. Les couples sans enfants n'hésitent pas à débourser des fortunes pour pouvoir avoir la chance d'être parents. Justement, cette activité médicale tolérée jusque-là par le département de la Santé nécessite désormais un cadre juridique pour lever toute équivoque. C'est dans ce contexte que le ministère de la Santé organise, depuis hier, un symposium international de deux jours sur la procréation médicalement assistée à l'hôtel Hilton, à Alger. Lors de ces travaux, d'éminents spécialistes en la matière ont abordé les différents aspects du sujet, tant sur le plan médical que sur les volets juridique, éthique et même religieux. La conservation des embryons surnuméraires reste un épineux problème, car cela se fait en dehors de tout cadre juridique. “Dans l'autorisation attribuée par le ministère de la Santé pour les centres privés de procréation médicalement assistée, l'activité de congélation du sperme et des embryons surnuméraires est clairement spécifiée. Je conserve les embryons dans l'azote liquide et en prenant toutes les précautions pour ne pas briser la chaîne de conservation. Je suis en règle car le ministère de la Santé m'a autorisé à le faire”, affirme le Dr Benbouhadja, directeur d'une clinique privée à Constantine. Si le directeur de cette clinique évoque l'autorisation du ministère de la Santé pour justifier cette pratique, il n'en demeure pas moins que tout médecin est contraint par la loi de ne réaliser que des actes médicaux contenus dans la nomenclature des actes en Algérie. Au jour d'aujourd'hui, la congélation du sperme et des embryons n'est pas encore considérée comme un acte, et ce vide juridique, renforcé par une tolérance du département de la Santé, pourrait conduire à des dépassements si des textes clairs ne viennent pas jalonner cette pratique. Que deviendront ces embryons ? Dans quelles conditions seront-ils conservés ou détruits ? Ce sont là quelques questions auxquelles l'éthique médicale et le législateur doivent apporter des réponses précises pour interdire tout dérapage. Par ailleurs, les coûts de ces inséminations artificielles ou des injections in vitro demeurent excessivement chers et, bien entendu, non remboursées par la Sécurité sociale qui ne les considère pas toujours comme acte médical. Les médecins espèrent à cet effet le remboursement de ces actes. Pour le moment, seuls les médicaments qui sont utilisés pour stimuler l'ovulation chez la femme sont remboursés pour les femmes assurées. Les praticiens du secteur privé viennent de conclure une convention pour rendre le pack de médicaments accessibles aux femmes candidates à la procréation médicalement assistée. Ce pack, composé de médicaments génériques, coûtera tout de même la bagatelle de 40 000 DA, mais entièrement remboursé. Entamée par les pionniers, voilà une dizaine d'années, la procréation médicalement assistée a permis la naissance de quelque 400 bébés en Algérie. Si l'initiative de réglementer et de développer cette technique de procréation demeure louable, il n'en demeure pas moins que des pédiatres tirent la sonnette d'alarme et interpellent les pouvoirs publics quant à la nécessité absolue de créer de véritables services de néonatologie en mesure de prendre en charge les nouveau-nés issus de cette méthode pourvoyeuse de prématurés. “On ne peut admettre que des centres privés se fassent de l'argent sur le dos des couples stériles qui doivent s'adresser, quand l'accouchement, est proche au service public. Il est urgent de créer des centres d'accouchement et de néonatologie pour ces bébés-éprouvette”, affirme un pédiatre. Depuis le premier bébé-prouvette né en France en 1978, 20 millions de bébés sont nés grâce à cette technique de par le monde. Les seules lois existantes en Algérie sur le sujet sont celles relatives aux personnes pouvant recourir à la procréation médicalement assistée. Sur ce sujet, la loi est claire et cette méthode n'est permise, selon les fetwas des oulémas, que dans le cadre du mariage excluant tout don de sperme ou d'ovaire. Les patrons des cliniques privées algériennes pratiquant les techniques de procréation assistée se targuent de pratiquer les prix les plus bas au monde, quelque 1 000 euros, avec des résultats identiques à ceux atteints par les centres européens. Pourtant, les candidats algériens à cette méthode préfèrent de loin les centres tunisiens qu'ils jugent plus performants Saïd Ibrahim