En 9 ans depuis 1999, l'Algérie a enregistré 27 421 enfants privés de famille ou nés sous anonymat (X), pris en charge par l'Etat. Seulement 3% des pères gardent les liens avec l'enfant abandonné. Ils gardent toujours cet air triste et ce sentiment de rejet qui traîne derrière eux. Ils sont plus de 3 000 enfants par an à être privés de famille. Ils naissent sous anonymat et ils sont abandonnés aux services des DAS. Quel est leur sort ? Sont-ils à l'abri de la violence ? Quel sera leur avenir ? Des questions que Ould-Abbès, ministre de la Solidarité nationale, a soulevées lors du colloque international sur l'enfance privée de famille, qui s'est tenu hier au Centre national de formation des agents spécialisés à Birkhadem. “J'ai voulu en appeler à la mobilisation de tous et renouveler solennellement l'engagement des pouvoirs publics pour les enfants privés de famille, c'est une des priorités de mon programme. Il faut faire évoluer les esprits”, a déclaré le ministre lors de son allocution d'inauguration. À cet effet, il a annoncé qu'un projet de loi sur la recherche de paternité a été soumis au secrétariat général du gouvernement. On apprend également que cette dernière a, déjà, eu l'aval d'une dizaine de départements ministériels. “Cette loi est-elle suffisante ? Bien sûr que non, mais il est temps de bousculer les vieilles certitudes et casser les tabous ravageurs au nom de milliers d'enfants sans racines et de femmes marginalisées”, a-t-il poursuivi. Cette loi consiste à confirmer la paternité d'un enfant à travers les tests ADN. Désormais, après la promulgation de la loi, les pères présumés seront contraints de subir ces tests afin de confirmer la paternité de l'enfant ; quant à la mère, celle-ci sera protégée par le registre des traditions de la solidarité. “Les victimes sont les enfants de mères célibataires. Portés dans un contexte de violence ou de maltraitance, ils en gardent des stigmates indélébiles. En outre, à moins d'être reconnus a posteriori par leur géniteur, qu'ils soient adoptés, choyés ou maltraités, ils restent des voyageurs sans bagage, porteurs d'une histoire tronquée, menant une existence sans racines”, a-t-il précisé. En complément à cette loi, M. Ould-Abbès a annoncé l'installation d'un groupe de réflexion pour la mise en place d'un conseil national algérien pour l'accès aux origines personnelles (Cnapop). Notons qu'en 9 ans depuis 1999, l'Algérie a enregistré 27 421 enfants privés de famille ou nés sous anonymat (X), qui ont été pris en charge par l'Etat dont 15 422 placés en kafala dans notre pays, 1 632 à l'étranger et 2 956 repris pas la mère biologique. Par ailleurs, il existe trois types de placement en milieu familial : placement rétribué ou garde payante, placement non payant et kafala. Pour ce qui est des enfants placés en institution, il existe 35 foyers pour enfants assistés (FEA) qui sont répartis à travers 27 wilayas auxquels s'ajoutent 4 foyers pour les enfants orphelins victimes du terrorisme. Notre pays dispose de 22 foyers pour les enfants de 0 à 6 ans et 13 établissements pour les enfants de 6 à 18 ans, et le mouvement gère 18 structures sur le territoire. Un projet de construction de 25 nouvelles structures d'accueil sera lancé d'ici 2009. Par ailleurs, une enveloppe de 1 164 982 000 DA a été dégagée et 180 425 enfants ont été pris en charge durant les neuf dernières années. En outre, une enquête, menée cette année par le département de M. Ould-Abbès révèle que sur 14 structures d'accueil, dont 4 à l'Est, 5 au Centre et 5 à l'Ouest, la population féminine d'enfants abandonnés est plus élevée que les garçons. 27% d'enfants sont handicapés et 20% sont atteints de maladies chroniques. Pour ce qui est de leurs géniteurs, 40% d'enfants sont abandonnés par des mères célibataires, 2,9% issus d'adultère et 57,1% autres (notamment viol, femmes divorcées…). 16% des femmes qui abandonnent leurs enfants reconnaissent leurs partenaires, 55% refusent d'en parler et 28% sans aucune donnée. Par ailleurs, seulement 3% des pères gardent les liens avec leurs enfants. Pour ce qui est des jeunes adultes, l'enquête a révelé que sur les 14 centres d'accueil, il existe 474 adolescents, dont l'âge varie entre 16 à 18 ans, qui n'ont pas été pris en charge par des familles d'accueil. Nabila Afroun