La pénurie des engrais perdure depuis la soumission, à des fins sécuritaires, de cet intrant agricole à des formalités administratives particulièrement draconiennes, imposées en vue de baliser la destination et l'usage de ces produits chimiques. Réunis avant-hier dans le cadre d'une journée d'étude technique portant justement sur la fertilisation de la pomme de terre, les producteurs de ce tubercule à Mostaganem ont inévitablement soumis aux représentants des services agricoles et de la Chambre d'agriculture de la wilaya, conviés à la rencontre, leur plus grande préoccupation de l'heure, à savoir l'indisponibilité sur le marché local des engrais nécessaires à la fertilisation de leur spéculation agricole. Une indisponibilité qui suscite l'angoisse de ces producteurs agricoles, déjà rudement éprouvés par la flambée des cours de tous les intrants nécessaires à la production de la patate, notamment la semence dont le quintal surfe largement au-delà du million de centimes. Les “patatiers” s'étant déjà engagé dans la galère par la plantation de quelque 4 000 hectares en ce “précieux” tubercule ne savent plus à quel saint se vouer, dès lors que c'est le moment précis et opportun où l'épandage de l'engrais requis s'impose. Une pomme de terre conduite sans cette fertilisation chimique se traduit inéluctablement par un important manque à gagner en matière de rendement. “Une dépréciation qui équivaudrait à l'obtention du rendement d'une culture conduite en mode extensif, soit de l'ordre des 100-150 quintaux à l'hectare, alors que les rendements généralement obtenus dans la région seraient 4 ou 5 fois supérieurs'', selon un technicien présent à la rencontre. Un revendeur de produits phytosanitaires expliquera que la pénurie des engrais perdure depuis la soumission, à des fins sécuritaires, de cet intrant agricole à des formalités administratives particulièrement draconiennes, imposées en vue de baliser la destination et l'usage de ces produits chimiques pouvant être détournés pour la production d'explosifs. Ce détournement aurait été révélé par les attentats à l'explosif perpétrés durant les derniers mois de l'année qui vient de s'achever. Outre le registre des ventes, dûment côté et paraphé par l'autorité judiciaire territorialement compétente, les fournisseurs et revendeurs des intrants agricoles en question doivent se faire délivrer des autorisations spéciales, en sus des agréments initialement requis, auprès de la direction des mines de la wilaya. “L'imbroglio” bureaucratique ne semblant pas encore au point, confusion et pénurie se sont emparées du marché des fertilisants chimiques à Mostaganem. De son côté le fellah ne daigne point assimiler cet argumentaire sécuritaire. Pour lui, dès lors qu'il s'agit de remettre une quelconque pièce d'identité au fournisseur d'intrants pour en porter filiation et références sur le registre mis en place, ce n'est qu'un subterfuge bureaucratique “inventé” pour identifier, et par conséquent, frapper d'impôts les agriculteurs. Selon un producteur, déjà “angoissé” par le prix de l'engrais même disponible — 5 000 DA/quintal —, ce sont les “petits” agriculteurs, et ils sont une majorité, qui plantent généralement de petites parcelles, qui vont le plus souffrir de cette pénurie provoquée. “Quant aux grands producteurs, ne vous en faites pas, s'ils ne disposent pas déjà des stocks d'engrais qu'il leur faut, ils sauront toujours “dénicher” le canal par lequel ils s'approvisionneront ! Quitte à mettre le prix, aussi cher sera-t-il !”, dira-t-il en conclusion. La clef de cette préoccupation, non des moindres, des “patatiers”, réunis à Sirat, à l'initiative de leur association de wilaya, semble dépasser la compétence des responsables locaux du secteur de l'agriculture. Néanmoins, ils se sont engagés à interpeller le département ministériel de tutelle. Son intervention ne peut être que salutaire pour la wilaya qui s'est forgée la réputation de la régulation du marché national de la pomme de terre. Même si les spéculateurs se frottent déjà les mains ! M. O. T.