En confiant à Lakhdar Brahimi la présidence de la commission indépendante, qu'il a décidé de mettre en place, sur le renforcement de la sécurité du personnel et des locaux des Nations unies dans le monde, le SG de l'ONU rectifie le tir vis-à-vis d'Alger. À travers sa désignation du diplomate algérien, rompu aux dossiers sensibles de l'Organisation des Nations unies, Ban Ki-moon donne l'impression de mettre de l'eau dans son vin, quant à sa précédente exigence de confier l'enquête sur les attentats d'Alger à une commission indépendante, ne cachant pas son manque de confiance aux enquêteurs algériens. Bien qu'il ne l'ait pas dit explicitement. Entre l'Algérie et l'ONU, il y a un sérieux coup de froid, et il a fallu le tête-à-tête Bouteflika-Ban Ki-moon à Addis-Abbeba, en marge du sommet de l'Union africaine, pour aplanir le différend. Le Chef du gouvernement algérien, Abdelaziz Belkhadem, devait pour sa part annoncer que l'Algérie n'était plus contre une enquête onusienne, à la condition qu'elle examine l'ensemble des questions sécuritaires des représentations onusiennes de par le monde et qu'elle travaille en collaboration avec les enquêteurs algériens. Le secrétaire général de l'ONU a trouvé la parade en confiant la présidence de la commission à l'Algérien Lakhdar Brahimi. Faisant d'une pierre deux coups, Ban Ki-moon calme le jeu avec Alger et remet en valeur l'expérience algérienne en matière de lutte contre le terrorisme. En portant son choix sur le doyen de la diplomatie algérienne, le patron des Nations unies a opté pour une compétence avérée à l'échelle internationale. En effet, Lakhdar Brahimi, qui avait pris sa retraite en 2005, après avoir contribué au règlement de nombreuses crises mondiales, et pas des moindres, constitue pour Ban Ki-moon la voie de sortie honorable dans une crise qu'il avait provoquée contre un pays, l'Algérie jouissant toujours d'une grande considération au sein de l'instance onusienne. C'est dire que le choix n'est pas fortuit, en raison de la pointure de Lakhdar Brahimi, qualifié sur la scène internationale d'“homme des missions difficiles”. L'Algérien aura été le grand pompier de l'ONU, versions Boutros Boutros-Ghali et Kofi Annan. Les accords de Taef, qui ont mis un terme à la guerre civile libanaise, c'est lui. L'accord qui a normalisé l'Afghanistan en le dotant d'institutions démocratiques, c'est également lui. Il était aussi à l'origine de la mise en place d'un gouvernement d'union nationale en Irak. Il a le pedigree d'un SG de l'ONU, mais les puissances de ce monde l'ont jugé trop impartial. Lakhdar Brahimi n'a jamais caché qu'il fallait démocratiser les Nations unies pour instaurer la paix et la stabilité dans le monde. Aujourd'hui, on refait appel à ses services pour renforcer les mesures liées à la sécurité du personnel et des locaux des Nations unies dans le monde. La commission, qu'il présidera, aura à “évaluer le degré de vulnérabilité inhérent aux activités des Nations unies dans le monde afin de renforcer la confiance du personnel de l'ONU dans les mesures de sécurité et s'assurer de leur crédibilité auprès des Etats membres, de la société civile et des autres parties prenantes concernées”. Lakhdar Brahimi aura sous sa coupe des spécialistes des questions de sûreté et de sécurité qui, travaillant en toute indépendance, siégeront à titre individuel, et dont l'identité sera rendue publique prochainement. K. ABDELKAMEL