Le successeur désigné de Poutine devrait remporter l'élection présidentielle d'aujourd'hui comme une formalité. Décrit comme “l'élève de son maître”, le nouveau président de la Russie risque d'en étonner plus d'un, promettent ceux qui le connaissent vraiment et qui le décrivent comme un homme intelligent, sous-entendu doté de l'instinct politique, et de qualité de leader pour s'imposer à la tête du Kremlin. Par ailleurs, les mœurs politiques russes n'ont, jusqu'ici jamais démenti le principe de “celui qui tient le Kremlin tient tous les pouvoirs”. En effet, il faut se garder de perdre de l'esprit que le système russe est fondé sur une présidence forte et que ce n'est pas un régime parlementaire comme le suppute Poutine, qui a annoncé occuper la fonction de Premier ministre avec une présidence de la république confinée à un simple rôle de garant, pour ne pas dire de simple représentation. À moins d'amender la Constitution, ce que Poutine avait refusé de faire pour s'ouvrir un autre mandat au nom de la stabilité institutionnelle. Evidemment, qu'il va renvoyer l'ascenseur à son mentor, mais entre fidélité, loyauté et devenir un président potiche, la marge est immense. La question est combien de temps mettra le nouveau locataire du Kremlin pour réussir à s'imposer dans cette nouvelle fonction. Dima, jurent ses collaborateurs, est “suffisamment dur” pour être président. À 42 ans, c'est le plus jeune dirigeant de la Russie et il sera également le premier président russe à avoir passé une partie de sa carrière dans le privé. À la différence de Poutine, ancien cadre du FGB (héritier du KGB) accusé de porter atteinte à la démocratie, Medvedev a souligné l'importance des libertés et de la justice. Medvedev a, par ailleurs, rué dans les brancards, rappelant durant sa campagne tous les pouvoirs du Kremlin, une manière d'annoncer qu'il ne les cédera pas. L'ancien avocat a également donné le sourire aux marchés en annonçant vouloir limiter l'intervention du Kremlin dans les grandes entreprises. À la dernière phase de la campagne électorale qui a réuni au Kremlin le tout-Moscou, après avoir remercié l'équipe Poutine, qui a procédé à un recensement exhaustif des réalisations du président sortant, Medvedev s'est laissé dire “des chiffres ennuyeux derrière lesquels se cache beaucoup de travail”. Le nouveau président connaît parfaitement les rouages et mécanismes du pouvoir pour avoir été aux premières loges. Medvedev doit effectivement sa carrière politique à Poutine. En 1999, alors que celui-ci était Premier ministre et appelé à remplacer Eltsine, il a fait venir son vieil ami à Moscou. Medvedev a été nommé secrétaire général adjoint du Kremlin, puis secrétaire général, et promu président du conseil d'administration de Gazprom. Il a alors mené une importante réforme qui a accru le contrôle de l'Etat sur le monopole gazier tout en l'ouvrant aux participations étrangères, avant de devenir Premier ministre. Avec une telle expertise et un tel parcours, il s'agit bien d'un homme qui pourra donner du fil à retordre aux scénarios de Poutine. En outre, Medvedev est très cultivé, racontent ceux qui ont étudié avec lui à la faculté de droit de l'université de Saint-Pétersbourg, la même que Poutine. Il y a enseigné lorsqu'il était expert pour la commission des Affaires étrangères de la mairie de Saint-Pétersbourg alors dirigée par Poutine. C'est là que sa carrière de politique a commencé. D. B.