Le président russe Vladimir Poutine, dans son dernier meeting pour les législatives d'aujourd'hui, recourt au spectre de l'ennemi extérieur, comme s'il doutait de son électorat et des sondages qui, pourtant, donnent vainqueur haut la main son parti. Tête de liste de son parti, il a appelé les Russes à choisir entre Russie unie et le retour à l'humiliation et à la désintégration ! Un discours digne des années soviétiques et de la guerre froide. Partant ou pas, Poutine reste incontestablement l'homme le plus populaire en Russie. Le résultat des élections parlementaires va, sans aucun doute, donner le ton pour l'élection d'un nouveau président en mars 2008, n'a-t-il cesse d'avertir, annonçant l'entrée de la Russie, dès à présent, dans une phase de renouvellement complet des pouvoirs législatif et exécutif. Le président russe quittera le Kremlin au terme de son second mandat, mais n'a fait aucun commentaire sur son successeur potentiel ni sur ses propres intentions, pendant que les appels pour qu'il reste le leader national se multiplient dans le pays. Après les législatives, il devra décider s'il reste président jusqu'au printemps 2008 ou s'il démissionne du Kremlin pour entrer au Parlement, où il pourrait alors endosser les habits de chef de la majorité parlementaire, et devenir, comme il l'a évoqué, une seule fois, Premier ministre. De toute façon, avec la victoire annoncée de Russie unie, plus de 60% des intentions de vote aux législatives, Poutine est en possession de toutes les clefs. C'est lui qui désignera son dauphin et qui choisira le chef du gouvernement au cas où il ne voudra pas de ce poste. Mais, pourquoi alors agite-t-il le spectre de la déstabilisation au sein d'une population encore traumatisée par les chocs de l'ouverture économique du pays ? Pour gagner plus et ne rien laisser à ses opposants, pourtant réduits à un toute petite poignée. Ses mises en garde contre le retour au pouvoir des libéraux, aux commandes dans les années 1990 sous la présidence de Boris Eltsine, s'adressent plutôt aux Occidentaux, les Etats-Unis et l'UE, qui n'arrêtent pas de titiller sa vision de la démocratie et son autoritarisme. En s'en prenant aux libéraux, crédités de 1% des intentions de vote, Poutine contre-attaque l'Occident qui veut, selon lui, ramener la Russie dans l'instabilité pour l'affaiblir et la contraindre à ne pas peser dans les affaires du monde. Ce qui n'est pas si faux. Washington ne s'est pas accommodé du retour du Kremlin dans la cour des grands, et les Américains ont eux aussi revisité les années de la guerre froide en se proposant d'installer des bases de missiles aux portes de Moscou. D. B.