En quête d'un statut, depuis qu'elles se sont constituées en association et, déboutées en Algérie, les familles des victimes du terrorisme attendent avec impatience la conférence de l'ONU, prévue en septembre de l'année en cours, qui inscrira pour la première fois à son ordre du jour, le thème des victimes du terrorisme. “C'est un pas important. Avant, on n'osait même pas nous nommer ainsi”, explique Mme Flici, secrétaire générale de l'Organisation nationale des familles du terrorisme, en marge du colloque international sur le terrorisme qui s'est tenu, hier et avant-hier, à l'hôtel El-Aurassi. Les associations des familles des victimes du terrorisme espèrent que l'amorce d'un débat sur la question se soldera par l'adoption par cette organisation internationale d'un statut des victimes du terrorisme. “C'est une reconnaissance morale”, pense Mme Flici qui ajoute qu'“une fois adoptée par les Nations unies, l'Algérie sera obligée de se conformer à cette résolution internationale comme elle l'a fait pour les conventions sur les droits des femmes et des enfants”. Selon elle, si la société civile réussit à relever le défi de se mobiliser contre le terrorisme, “elle contribuera à consolider la position des victimes du terrorisme dans l'organisation des Nations unies et des autres organisations internationales et régionales et leur permettra d'exprimer d'une même voix leur position commune dans les forums internationaux et régionaux, ceci d'autant plus que l'assemblée générale de l'ONU organisera pour la première fois une conférence sur les problèmes que subissent les victimes du terrorisme et ce, dans le cadre de l'application de la stratégie mondiale pour la lutte contre le terrorisme adoptée par elle le 8 septembre 26”. Mme Flici soutient que son association proposera en temps voulu la création d'un réseau mondial des victimes du terrorisme, soulignant que son organisation rassemble à elle seule quatre-vingt mille adhérents. Elle ajoute qu'il a été recensé à ce jour cent-cinquante mille victimes du terrorisme et que tous leurs dossiers ont été traités. Chérifa Keddar, présidente de l'association Djazaïrouna — qui elle aussi espère énormément que les recommandations de la session de l'ONU sur ce thème contribuent à faire aboutir la revendication de son organisation —, rappelle que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale a fait l'impasse sur ce problème posé depuis quelques années. Mme Keddar pense que la charte a consacré le principe de la négation des victimes du terrorisme les classant au même titre que leurs bourreaux dans la catégorie de victimes de “la tragédie nationale”. “Alors que nous, nous avons toujours revendiqué notre statut de victime de terrorisme islamiste.” Même si certaines associations des familles de victimes du terrorisme, qui par opportunisme, qui croyant de bonne foi à un retour à la paix et mettre l'intérêt du pays au-devant de leurs souffrances ont adhéré à la Charte pour la paix et la réconciliation, elles ne renoncent pas pour autant à leur credo : devoir de vérité et de justice. Un démarche essentielle, estime Mme Asma Tougne, psychologue et créatrice du pôle psychologique pour les femmes en difficulté au sein de l'association “Ni putes, ni soumises”. Ayant elle même perdu un frère âgé de vingt ans, assassiné par les terroristes dans un quartier de l'Algérois, en bas de chez lui, elle considère que pour interrompre le processus de la transmission du traumatisme, la justice doit jouer son rôle de protecteur social et qu'on rende hommage aux victimes. Sinon, les enfants et les générations futures perdront leurs repères et on risque d'assister à la transformation d'une victime en un coupable probable. Nissa Hammadi