Le chef de la principale formation de l'ex-opposition chiite irakienne Mohammad Baqer Hakim est arrivé samedi à Bassorah après 23 ans d'exil en Iran et a dénoncé implicitement l'occupation américaine, au lendemain d'une réunion du Conseil de sécurité saisi par les Etats-Unis d'une résolution visant à leur laisser les coudées franches en Irak. Sans citer les Etats-Unis, il a évoqué dans un discours rassembleur et nationaliste la présence américaine en Irak : “Le peuple irakien est capable de bâtir un nouvel Irak sans l'aide d'un autre pays, capable d'assurer la sécurité. Ils doivent laisser l'Irak aux Irakiens”, a-t-il lancé à l'adresse de la coalition américano-britannique. Lors d'une conférence de presse, il a plaidé pour un Irak “moderne”, fondé sur “les principes de l'islam” et qui “accorde un rôle primordial à la jeunesse et à la femme”. “La femme doit jouer un rôle essentiel dans la construction de cette société. La femme éduquée et honorable est capable d'assumer son rôle, soit dans sa famille, soit dans sa société”, a-t-il dit. Dans le passé, l'ayatollah s'est déclaré favorable à l'instauration d'une “république islamique” en Irak où les chiites, marginalisés sous le régime de Saddam Hussein, représentent plus de 60% de la population. L'ayotallah n'entend pas participer au gouvernement intérimaire que les Américains s'emploient à mettre sur pied à Bagdad, mais son frère Abdel Aziz al-Hakim, rentré le 16 avril en Irak, représente l'Asrii au “Conseil des cinq”, où siègent le Congrès national irakien (CNI) d'Ahmed Chalabi, l'Union patriotique du Kurdistan (UPK) de Jalal Talabani, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) de Massoud Barzani et l'Entente nationale irakienne (ENI) d'Iyad Allaoui. Le "Conseil des cinq" est considéré par les Etats-Unis comme le noyau dur de la future autorité intérimaire. Des responsables américains ont remis samedi dernier des dizaines de milliers de dollars sous forme de salaires à des fonctionnaires irakiens, qui n'avaient pas été payés depuis deux mois, mais la plupart d'entre eux ont indiqué que la paie était insuffisante. Sur le plan militaire, le chef d'état-major interarmées américain Richard Myers a indiqué que la Garde républicaine de Saddam Hussein serait dissoute et que l'armée irakienne serait de taille plus réduite que sous Saddam Hussein mais cependant assez importante pour défendre le pays contre des menaces extérieures. A New York, des consultations devaient se poursuivre pendant le week-end entre membres du Conseil de sécurité sur un projet de résolution américain visant à lever les sanctions contre l'Irak et à donner aux forces d'occupation le contrôle de son économie. Le projet prône la mise en place d'un fonds d'assistance à l'Irak, alimenté notamment par les revenus pétroliers et placé sous l'autorité des “puissances occupantes”. Washington souhaite que cette résolution soit adoptée le 3 juin au plus tard, mais cette date ne pourra peut-être pas être respectée, Paris, Berlin et Moscou ayant soulevé un certain nombre de questions techniques et juridiques, notamment quant au rôle dévolu à l'Onu.