C'est la tranche d'âge située entre 18 et 45 ans qui est touchée par ce phénomène. Les problèmes socioprofessionnels et les maladies mentales sont à l'origine de l'acte. Un étudiant se suicide dans sa chambre de la cité universitaire. L'information est passée presque inaperçue. Et pour cause : ce phénomène social ne fait plus recette et est considéré, de par sa récurrence, comme un fait divers. Pourtant, les statistiques, aussi froides que les corps qu'elles représentent, sont alarmantes. Depuis le début de l'année, il y eut 33 suicides et 41 tentatives. Comme pour tous les cas de suicide depuis une dizaine d'années, les hommes passent plus à l'acte que les femmes alors que ces dernières sont plus nombreuses dans les tentatives. La tendance est ainsi respectée pour cette année. Sur les 33 cas de suicide, 26 sont des hommes alors que sur les 41 tentatives, 37 sont le fait de femmes. Les maladies nerveuses et mentales sont les principales causes du suicide, mais les problèmes sociaux et familiaux le sont aussi, même s'ils sont dominants dans les tentatives. La majorité des individus ayant mis fin ou tenté de mettre fin volontairement à leur vie sont âgés entre 18 et 45 ans. Le travail, la stabilité familiale, le mariage, le logement sont les buts recherchés par le jeune Algérien ; en cas d'échec, c'est le glissement vers le désespoir. Cette autre raison du suicide, et le passage à l'acte. Une étude de la cellule de communication de la gendarmerie met l'accent sur les problèmes sociaux et familiaux comme facteurs de désespoir et, partant, du suicide. En effet, sur les 33 cas, 24 des suicidés sont sans emploi. La pendaison reste la méthode la plus courante pour les suicidés, suivie par le saut dans le vide et l'utilisation des armes à feu. Certains se jettent carrément sous le train. Derrière les problèmes sociaux et familiaux, pression de la famille, chômage, différends avec la famille et l'entourage immédiat, suivent les troubles psychologiques et les maladies mentales comme seconde principale raison. Et enfin le désespoir que peuvent engendrer l'échec, une brutale séparation, ou le sentiment de solitude et d'isolement. La période des examens connaît une hausse des suicides chez les étudiants, lycéens et collégiens. Cette catégorie représente 20% des cas. Mais les illettrés sont plus nombreux avec un taux de 80%. Cela dit, toutes les catégories sociales sont touchées. On y trouve des médecins, des ingénieurs, des dentistes, des paysans, des avocats, des fonctionnaires… Ce qu'on ne s'explique pas, en revanche, c'est la tendance à la hausse des suicides au printemps et en automne. Le phénomène est constaté à travers tout le territoire national, mais certaines wilayas connaissent plus de cas que d'autres. Béjaïa demeure en tête depuis des années. En 2007, elle a enregistré 19 cas dont 2 femmes, suivie par Tizi Ouzou avec 11 cas, Batna avec 8 cas, Mascara avec 7 cas et Alger avec 6 cas. Le phénomène ne cesse d'évoluer avec la détérioration de la situation sociale qui engendre le désespoir, les maladies mentales et les troubles psychologiques, comme l'attestent les chiffres de ces trois dernières années. En 2006, il a été enregistré 117 cas de suicide et 109 tentatives, l'année d'après, les cas passent à 128 et 128 tentatives. L'année en cours s'annonce plus dramatique. L'étude tire la sonnette d'alarme et conclut à la nécessité de prendre des mesures d'urgence, d'organiser des campagnes de sensibilisation, ouvrir un débat pour établir un plan d'action afin de mettre fin à cette hécatombe. Djilali B.