Le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki, en visite hier en Iran, fait face à une pression croissante des courants chiites en Irak pour qu'il limite l'emprise militaire américaine dans son pays. M. Maliki, lui-même chiite, négocie depuis des semaines un accord qui doit établir les conditions de maintien d'un contingent américain en Irak après l'expiration fin 2008 du mandat de l'ONU qui autorise ce déploiement. Rien n'a officiellement filtré des exigences des Etats-Unis, qui soutiennent Maliki, mais les formations chiites, souvent divisées, s'accordent pour soupçonner Washington de vouloir perpétuer une présence militaire en Irak. Certains ont évoqué le risque de voir l'Irak devenir un “tremplin” pour des opérations militaire américaines contre l'Iran. La plus haute autorité chiite du pays, l'Ayatollah Ali Sistani, a fait savoir son opposition à un accord qui limiterait la souveraineté de l'Irak. Son porte-parole, Abdel Mahdi Kerbalai, a salué vendredi “la détermination des partis politiques à défendre des principes nationalistes”. Il les a encouragés à “ne pas permettre que soit violée la souveraineté du pays dans tous les domaines”. Il a ajouté que les groupes politiques ne devaient pas non plus permettre que les intérêts des pays voisins soient mis en péril à partir de l'Irak, une référence à l'Iran, sur qui plane une menace d'intervention américaine. Des spéculations reprises par la presse en Irak ont évoqué le souhait américain de maintenir dans le pays une cinquantaine de bases. Selon ces mêmes spéculations, les Etats-Unis veulent conserver le contrôle de l'espace aérien et maintenir l'immunité pour ses soldats et pour les personnels des compagnies privées de sécurité opérant en Irak. Les militaires et diplomates américains ont démenti avec véhémence l'idée que Washington veuille avoir des bases “permanentes” en Irak, mais les partis irakiens n'ont pas été convaincus. Le plus solide soutien de Maliki, le Conseil suprême islamique d'Irak (CSII), a indiqué qu'il rejetait un accord qui, à ses yeux, violait la souveraineté de l'Irak. “Washington est en contradiction claire avec le principe de souveraineté”, a assuré Djelal al-Din al-Saguir, un député de cette formation. Le chef radical chiite Moqtada Sadr, adversaire acharné de la présence américaine en Irak, dénonce depuis des semaines le principe même de cet accord et a appelé les Irakiens à se mobiliser pour s'y opposer. “L'accord avec les Américains est synonyme d'acte de guerre contre le peuple irakien”, a assuré vendredi à Bagdad un proche du jeune chef radical, Sattar Al-Batat. Face à ce mécontentement, le gouvernement Maliki a déjà laissé entendre qu'il n'était pas disposé à se soumettre à toutes les demandes américaines. Il a indiqué début juin qu'il avait une “vision différente” de celle des Etats-Unis. Le gouvernement “a réaffirmé sa volonté de protéger la sécurité, les biens et les ressources de l'Irak, et étudie tous les choix possibles pour préserver la souveraineté et les intérêts du pays”. Dès son arrivée en Iran, M. Maliki a tenu à assurer les dirigeants iraniens que l'Irak ne servirait pas de base arrière pour des attaques contre l'Iran. “Nous ne permettrons pas que l'Irak serve de base pour porter atteinte à la sécurité de l'Iran et de nos autres voisins”, a déclaré le Premier ministre irakien. DJAZIA SAFTA/AGENCES