Le service d'oncologie du CHU de Tizi Ouzou formera, dans un premier temps, des médecins et des infirmiers exerçant dans cinq daïras de la wilaya pour les préparer à prendre en charge des malades. Il s'agit d'une opération-pilote. Le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Saïd Barkat, a demandé, lors de sa dernière visite, au chef du service d'oncologie du centre hospitalo-universitaire de Tizi Ouzou de former des médecins généralistes et des infirmiers exerçant dans les hôpitaux de daïras, pour la prise en charge des malades au niveau local. Le professeur Ferhat a d'ores et déjà arrêté un programme de formation qui débutera dès le mois de septembre prochain. Dans une première étape, des groupes de médecins originaires de cinq daïras de la wilaya de Tizi Ouzou suivront un stage sur les bonnes conduites à tenir pour l'administration des chimiothérapies. Le professeur Ferhat tient à préciser que ces médecins et ces infirmiers appliqueront les schémas thérapeutiques arrêtés par les comités constitués de spécialistes en oncologie à qui incombe aussi le diagnostic des cancers. À noter que le service d'oncologie du CHU de Tizi Ouzou soigne les malades de cette wilaya et ceux originaires de Sétif, Bordj Bou-Arréridj, Bouira et Boumerdès. Pour le moment, il n'assure que la chimiothérapie. Mais quand le nouveau centre anticancéreux de Draâ Ben-Kheda sera achevé, tous les traitements y seront assurés. La prise en charge des cancéreux en Algérie représente un grand problème de santé publique. Le droit à la santé étant garanti par la Constitution, chaque citoyen peut aspirer à des soins de qualité, mais les infrastructures existantes ne peuvent à elles seules assurer le diagnostic et le traitement de tous les cancéreux. L'Etat a entrepris depuis quelques années la réforme hospitalière, axée sur la rénovation des structures existantes et sur la construction de nouveaux hôpitaux. Plusieurs services ont repris leurs activités après leur fermeture pour travaux. Par ailleurs, les responsables du secteur de la santé cherchent à mettre en place de nouvelles stratégies pour mieux exploiter les structures et les équipements existants. Maintenant que les Algériens ont de plus en plus accès aux soins, le dépistage des maladies augmente, ce qui nécessite la mobilisation de moyens supplémentaires pour répondre à une demande toujours grandissante. Comme les structures spécialisées de santé ne sont pas extensibles à souhait, l'urgence de pallier ce manque de places oblige les responsables du secteur à trouver des solutions avec les moyens dont ils disposent. Effectivement, en matière de prise en charge des cancéreux, les centres spécialisés au nombre de cinq actuellement, et tous concentrés dans les grandes villes du Nord, n'arrivent plus à soigner tous les patients. À titre d'exemple, le service de radiothérapie du Centre Pierre-et-Marie-Curie (CPMC) d'Alger est ouvert tous les jours de 7 heures à 20 heures sans interruption. Le même établissement assure, par ailleurs, la prise en charge en matière de chimiothérapie au profit des malades hospitalisés et pour une autre catégorie de patients pris en charge par l'hôpital de jour. Le responsable de ce centre ne peut à lui seul assurer la prise en charge de tous les patients algériens qui préfèrent tous venir se faire traiter au CPMC. Tous les cancers ne sont pas radiosensibles (tumeurs pouvant être détruites par les rayons X ou le cobalt), alors pourquoi ne pas ouvrir de petits centres spécialisés dans la chimiothérapie à travers le territoire national ? Cela soulagera évidemment les centres anticancéreux qui ne prendront alors que les cas nécessitant de la radiothérapie ou de la chimiothérapie lourde. Le malade, quant à lui, ne sera plus contraint de faire de longs déplacements ; il sera pris en charge par un hôpital près de chez lui. Bien entendu, les diagnostics et les schémas thérapeutiques resteront du domaine des spécialistes. Ces derniers enverront les dossiers des malades aux “médecins correspondants” formés pour la prise en charge des cancéreux dans les structures de santé de proximité. Sur un autre volet, les malades algériens réclament le droit à des soins de qualité. Ils sont nombreux à se demander pourquoi en Algérie les nouveaux centres continuent à traiter les malades avec du cobalt, alors que ce genre d'appareils est proscrit dans les pays développés. En effet, la prise en charge du cancer a évolué et les traitements sont aujourd'hui très efficaces car, qu'il s'agisse de la radiothérapie ou de la chimiothérapie, la médecine est entrée dans l'ère de la précision. Les accélérateurs de particules permettent, en effet, de cibler la tumeur sans endommager d'autres tissus. Les nouveaux traitements de chimiothérapie ciblent, eux aussi, les seules tumeurs malignes. D'autres traitements permettent cette fois de priver les tumeurs de pouvoir s'alimenter en détruisant leurs vaisseaux sanguins. La nouvelle politique de prise en charge des cancéreux semble faire le bonheur des malades qui ne demandent pas mieux que de se faire soigner dans leurs wilayas respectives. Si l'opération-pilote menée à Tizi Ouzou s'avérait concluante, elle serait alors généralisée dans toutes les wilayas du pays. La situation des cancéreux reste néanmoins préoccupante en Algérie, et un groupe de patients est sur le point de constituer une association pour défendre cette frange de la société. Saïd Ibrahim