Une trentaine de civils et 20 policiers ont été tués ces derniers jours dans deux frappes aériennes séparées de l'OTAN en Afghanistan, ont annoncé, hier, les autorités des provinces méridionale du Helmand et orientale du Nouristan. Dans le Helmand, bastion des insurgés taliban et province la plus dangereuse pour la coalition depuis le début du conflit fin 2001, des hélicoptères de l'Otan intervenus pour défendre une position attaquée ont touché deux habitations du district de Nawzad, expliquent les services du gouverneur. «Malheureusement, 14 civils innocents, cinq filles, sept garçons et deux femmes ont été tués, et six ont été blessés, trois enfants, une femme et deux hommes», selon un communiqué. Le président afghan Hamid Karzaï a qualifié de «grave erreur» et de «meurtre» la mort de ces 14 civils. Il a lancé «un dernier avertissement aux troupes et aux responsables américains» sommés de cesser leurs opérations «unilatérales». Le gouverneur du Nouristan, province montagneuse du nord-est où la rébellion est bien implantée, a de son côté indiqué que 18 civils et 20 policiers avaient été tués dans une frappe le 25 mai, sur fond d'intenses combats ayant opposé les forces afghanes et de l'Otan aux taliban qui menaçaient de s'emparer d'un district. «Les policiers ont été tués par des tirs fratricides», a affirmé Jamalddin Badar, «les civils ont été tués parce qu'ils ont été confondus avec les taliban, vêtus d'habits civils et qui, à court de munitions, se sont réfugiés dans des habitations». Dans les deux cas, la Force de l'Otan en Afghanistan (ISAF) a indiqué être «au courant» des différentes allégations et avoir envoyé une équipe d'enquêteurs, assurant que leurs conclusions seraient rendues publiques. Concernant le Nouristan, «les premières informations dont nous disposons ne font pas état de pertes civiles au cours de cette frappe», a expliqué un porte-parole, semblant implicitement ne pas exclure des victimes au sein de la police afghane. A Lashkar Gah, capitale du Helmand, un chef tribal de Nawzad, se présentant sous le seul nom d'Aslam, a affirmé que douze membres de sa famille avaient été tués dans cette frappe et dix blessés dont des enfants. Aslam, qui criait sa colère dimanche matin devant les bureaux du gouverneur, a raconté avoir vu des hélicoptères de l'Otan essuyer des coups de feu au moment où ils passaient, avant de revenir et de tirer des roquettes, tuant des «civils innocents». Les pertes civiles sont un sujet sensible en Afghanistan, où dix ans de présence militaire étrangère alimentent le ressentiment antioccidental. Un raid de l'Otan, qui avait fait quatre morts, des personnes présentées comme étant des civils par la population, avait déclenché deux jours de violentes manifestations, les 18 et 19 mai à Taloqan (nord-est) ; celles-ci avaient fait 17 morts.