L'affaire judiciaire dite «Ferphos», remise au devant de l'actualité nationale avec le jugement en appel des cadres dirigeants, devrait connaître son épilogue prochainement. C'est ce qu'a décidé le président du tribunal d'Annaba siégeant en appel du représentant du ministère public. Ce dernier avait réagi au non lieu prononcé en 1re instance à la fin de l'année 2009 par le tribunal correctionnel d'Annaba au profit de l'ex-président-directeur général du groupe Ferphos ainsi que plusieurs autres de ses proches collaborateurs. De par la stature des cadres impliqués, les graves faits reprochés, l'importance du préjudice enregistré au détriment du Trésor public et des conclusions accablantes établies par les deux commissaires aux comptes, cette affaire avait fait grand bruit. Le jugement a été mis en délibéré pour un verdict prévu pour être prononcé lundi. S'appuyant sur les documents établis par les commissaires aux comptes, le président-directeur général de la Société de gestion des participations somine avait déposé plainte début 2009. Il reproche aux cadres dirigeants de Ferphos un ensemble de griefs dont le non-respect des procédures de passation des marchés publics, la dilapidation des finances et du patrimoine du groupe et l'abus de biens sociaux. Le coup avait été rude pour le P-DG du groupe Ferphos. Relevé de ses fonctions, il avait juré ne pas être impliqué dans un quelconque acte préjudiciable. Il avait affirmé : «Par respect à l'obligation de réserve, je n'ai pas voulu répondre à mes détracteurs. Tout au contraire de ce qu'ils avancent dans leurs lettres anonymes de dénonciation, j'estime avoir convenablement accompli ma mission. J'ai mis sur rail le groupe qui, annuellement, enregistre un chiffre d'affaires en constante évolution.» Après l'ouverture d'une information judiciaire, les choses allaient s'accélérer. Les documents présentés par les commissaires aux comptes accablent sérieusement le 1er responsable du groupe et ses proches collaborateurs. Les conclusions d'audit établi à la demande de la SGP avaient révélé d'inquiétantes pratiques que le P-DG pouvait difficilement ignorer. On y décèle des cumuls de responsabilités incompatibles de certains cadres, l'acquisition par ces mêmes cadres de biens immobiliers réalisés et commercialisés par Ferbat, une filiale du groupe Ferphos, des actes de corruption, une gestion des filiales intentionnellement déréglée, le million de dollars engagé en pure perte pour un projet de réalisation d'une unité d'acide phosphorique à Jijel, la disparition de 15 kg de mercure du laboratoire de l'unité Ferphos de Djebel Onk, l'établissement d'un faux bilan et l'affectation de bénéfice fictif. Ces faits, constamment récusés par les cadres mis en cause, avaient été énumérés par le président du directoire de la SGP somine lors d'une conférence de presse. Ils sont une nouvelle fois repris dans les entendus du magistrat en charge de l'appel. Avec, cependant, un fait nouveau. Le complément d'enquête judiciaire ordonnée par le parquet aurait démontré que des chiffres de comptes avaient été manipulés pour induire en erreur les enquêteurs et le juge d'instruction. Le montant du préjudice que les commissaires aux comptes ont relevé au fil de leurs investigations comptables est très important. Il est également question de bradage de biens immobiliers (villas, logements haut standing et locaux commerciaux) propriétés de Ferbat, filiale Ferphos. Dans cette affaire, qui aurait coûté son poste au président du directoire, la connivence des uns et des autres invite à repenser les poids et contrepoids dans la gestion de nos entreprises publiques. Est-il normal qu'un groupe d'entreprises publiques économiques, bâti avec l'argent du contribuable, soit allé si loin dans les privilèges accordés à des cadres de gestion ? Est-il légitime que la SGP ait tardé à ce point pour réagir à des actes commis plusieurs années auparavant ? Avec la décision de non-lieu prononcée par le tribunal correctionnel de Annaba, comment dès lors croire en la crédibilité des commissaires aux comptes. Ces derniers ne devaient-ils pas être poursuivis pour dénonciation calomnieuse et le seraient-ils au cas où le non-lieu serait confirmé ? Tout aussi énigmatique est l'affaire de Sotramine, également filiale du groupe Ferphos. Appuyant l'audit des commissaires aux comptes, le secrétaire général de la section syndicale de cette filiale des transports avaient lancé, le 7 février, un pathétique appel des plus hautes autorités de l'Etat. «Nonobstant la mauvaise gestion, notamment l'acquisition de camions et de pièces de rechange de qualité douteuse, ce directeur impose aux conducteurs de camions un contrat de travail à durée déterminée de 1 mois. Ce contrat est renouvelé au gré et en fonction de la soumission totale du recruté. Agissant pour ses intérêts personnels, le PDG de la filiale est à l'origine des risques de faillite de notre entreprise», dénonçait ce syndicaliste qui, depuis, aurait été licencié. C'est dire que le jugement en appel du P-DG du groupe Ferphos a son importance. Confirmé, le 1er verdict, portant sur l'acquittement des personnes incriminées, imposerait nécessairement des questions sur la crédibilité des commissaires aux comptes à l'origine des poursuites judiciaires lancées par la sgp.