Depuis le début du Ramadhan, d'ingénieuses femmes au foyer à El-Tarf, rivalisant d'imagination pour participer d'une manière ou d'une autre aux revenus familiaux, concoctent de nombreuses préparations qu'elles écoulent auprès de jeûneurs aux yeux «plus gros que le ventre». Les différentes sortes de galette viennent en tête de ces préparations maison qui trouvent très aisément preneurs. Dans cette région de l'extrême est du pays, deux types de galette se disputent le «leadership» : rekhsis, galette très fine cuite dans un tadjine en fonte ou en terre, et le matloue (ou kh'mira), une galette à mie, montée à la levure, très appréciée aux quatre coins du pays. Cédées entre 40 et 55 DA la pièce, ces galettes sont facilement écoulées, même si certains jugent leur prix excessif. C'est en début d'après-midi qu'enfants et adolescents débarquent au marché improvisé de la rue commerçante, au centre-ville d'El-Tarf, avec leurs couffins et autres sacs remplis de galettes dorées, encore chaudes qui seront disposées sur des étals de fortune. Généralement, les clients ne sont pas très regardants sur la qualité du produit, car ils prétendent, pour la plupart, séparer le bon grain de l'ivraie. D'autres avouent «acheter ces galettes juste pour aider les familles modestes ou démunies durant ce mois de piété». Rakhsis et matloue ne détiennent pas, cependant, le monopole des produits maison vendus près des marchés. Le kalbelouz préparé également par des femmes au foyer, leur dame le pion, d'autant que les petits vendeurs s'appliquent à en céder la pièce à un prix moins élevé que celui pratiqué dans les confiseries orientales. En fait, cette pâtisserie, cédée à 20 DA la pièce, ne peut rivaliser avec celle achetée dans les pâtisseries des grandes villes, comme Alger, notamment. Le kalbelouz local est préparé à base de semoule, de sucre et d'arômes artificiels, le tout cuit dans un four surchauffé et le tour est joué. Pour son écoulement, il est fait usage des mêmes procédés que pour la galette sauf que cette fois-ci rares sont les clients qui mordent aussi facilement à l'hameçon. Mais comme par enchantement, les vendeurs arrivent tout de même à écouler leur produit au prix d'une importante dose de patience et d'un certain talent, consistant à apitoyer les passants qui finissent, une fois sur deux, à acheter quelques morceaux.