La confusion et le chaos règnent toujours en Egypte, au lendemain des affrontements sanglants entre les forces de sécurité et les dizaines de milliers de manifestants qui veulent rééditer la Révolution en réclamant aujourd'hui le départ du chef du haut conseil de l'armée, symbole du pouvoir post-Moubarak. Signe que rien n'a vraiment changé depuis la chute du régime. Pour ceux qui croyaient que tout allait se résoudre après le départ de la caste Moubarak, au pouvoir depuis trente ans, ils en ont eu pour leur compte. Pis, la perte d'autorité dans le pays et l'instabilité endémique du gouvernement (c'est le troisième en sept mois) risquent d'entretenir un climat d'insurrection qui va finir par profiter aux forces les plus réactionnaires et de favoriser une solution à l'iranienne, c'est-à-dire à travers une révolution islamiste portée par la rue. Il ne sera pas alors étonnant de voir les salafistes et les Frères musulmans, en prédateurs rompus, se placer à l'avant-garde de ce second soulèvement pour exiger, non pas le départ du gouvernement, ni même du chef des forces armées comme le réclament officiellement les manifestants, mais la tenue des élections dans leur délai. Un scrutin qu'ils sont assurés de remporter. Et l'armée n'a d'autre choix que de céder, pour éviter le pourrissement qui profite évidemment aux islamistes. Les deux cas sont une catastrophe pour l'Egypte et un mauvais signe pour ce qui se dessine dans le Monde arabe où l'on continue d'alimenter le feu et d'ourdir des plans de guerre. Voilà l'aboutissement d'un mouvement généreux initié, au départ, par des activistes de gauche qui croyaient au changement pacifique et à la révolution démocratique.