La société algéro-franco-indienne ArcelorMittal est de nouveau confrontée à une tentative visant à perturber sa production d'acier liquide. Depuis le 20 novembre, un groupe de chômeurs d'une vingtaine d'individus interdit aux mineurs de ArcelorMittal Tébessa d'extraire le minerai destiné à alimenter le complexe sidérurgique d'El-Hadjar. A elle seule, cette mine fournissait jusqu'au début des perturbations, 6 000 tonnes/jour soit 80% des besoins/jour en minerai de fer du complexe sidérurgique d'El Hadjar. Mouvements synchronisés parce qu'il ne se passe pas un mois sans que l'on ait à enregistrer une crise socioprofessionnelle. Il y a quelques semaines, c'était celle provoquée par les fondeurs du Haut Fourneau. Ils avaient débrayé sans préavis. Puis il y a le retard des décideurs à répondre positivement ou négativement à la proposition de mise en route du plan d'investissements destiné à la réhabilitation des installations de production. Un retard pour beaucoup dont le grincement de dents des syndicalistes qui ont menacé de réagir début janvier 2012 à toute tentative de mettre leur outil de production en danger. Ont suivi deux déraillements successifs de train de minerai à l'origine de la suspension durant plusieurs jours de l'approvisionnement du Haut Fourneau en matière première. Mais voilà que la mine de l'Ouenza, propriété ArcelorMittal Tébessa, principale source d'approvisionnement du même complexe est ciblée. Les 20 jeunes chômeurs y ont élu domicile. En l'absence de toute réaction des services concernés, ils s'y sont installés pour agir en terrain conquis. «Mintaka Mouharara» s'amusaient-ils à répéter aux travailleurs de la mine qui tentaient de les sensibiliser sur la nécessité de mettre un terme à leur action. D'autant que ne voyant rien venir pour les déloger du concasseur qu'ils occupaient, les 20 chômeurs s'enhardirent. Ils interdiront à quiconque des 520 travailleurs de la mine d'accéder au concasseur, au parc autos et celui des moyens roulants, incontournables dans la production du minerai. De partielle, la paralysie de la mine de l'Ouenza deviendra totale. Tant et si bien que la direction générale a été contrainte, ce dernier mercredi de mettre au chômage technique l'ensemble de ses effectifs et de mettre à l'arrêt la production minière. «Contraints et forcés, nous nous sommes décidés à mettre au chômage technique nos 520 salariés. Bien avant, nous avons saisi la justice d'une procédure en référé et multiplié les démarches auprès des autorités locales afin qu'elles interviennent pour déloger une vingtaine de personnes extra entreprise. Vainement, puisque celles-ci se sont installées au niveau du concasseur, parc autos et engins sans lesquels on ne peut pas produire. Il en est ainsi depuis le 20 novembre dernier ,date à partir de laquelle nous n'assurons plus la livraison des 6 000 tonnes/jour de minerai au complexe sidérurgique d'El Hadjar» explique Jean Pierre Wilhelm, directeur général ArcelorMittal Tébessa. Estimant que cette situation a entraîné une perte sèche de 2,4 millions de dollars depuis son déclenchement, il a ajouté : «Cela ne peut pas durer. Si rien n'est fait dans les prochains jours, nous allons fermer la mine de l'Ouenza et demander à ArcelorMittal Annaba d'importer ses besoins en minerai». Du côté de la direction générale ArcelorMittal Annaba, l'on affirme que la situation de la mine de l'Ouenza a atteint le seuil de l'intolérable. Elle s'est déjà répercutée sur la production de l'acier liquide issu d'un minerai de mauvaise qualité car stocké de longue date, répercutée aussi en termes de quantité puisque les objectifs planifiés pour novembre et décembre n'ont pas été atteints. Ce qui revient à dire que l'accord conclu avec le syndicat le mois de mai de cette année n'est plus d'actualité. Il était, en effet prévu, que la direction générale accorde une augmentation sur les salaires de 4% au 1er décembre 2011, conditionnée par une production de l'acier liquide brut de mai à novembre qui devrait être de 590 000 tonnes ou 3% pour 540 000 tonnes. Cette augmentation serait de 2% pour 480 000 tonnes et de 1% au cas où elle serait de 460 000 tonnes. Comme il a été prévu 2% d'augmentation des salaires au 1er juillet 2012 liée à l'atteinte des objectifs à négocier en novembre 2011 au moment de l'élaboration du budget 2012. Une augmentation de 2% était également prévue le 1er décembre 2012 liée à l'atteinte des objectifs. Dans cet accord, la direction avait pris note de la volonté du syndicat, son partenaire social de maintenir à tout prix la paix sociale et à accompagner le redressement et le développement industriel pour les années à venir. Dans leurs calculs, les deux partenaires (employeur/syndicat) n'avaient certainement pas pris en compte la perturbation de leur source d'approvisionnement en minerai de fer. Ils n'avaient pas envisagé une seule fois que les autorités locales de la wilaya de Tébessa seraient incapables de faire face à des perturbateurs Conséquence : les travailleurs de la mine verront leur salaire réduit cette fin d'année et ceux du complexe sidérurgique d'El Hadjar n'auront pas droit à l'augmentation prévue. Depuis le 20 novembre à ce jour, des jeunes en ont décidé ainsi eux qui, en indus occupants de la mine, imposent leur diktat. Ils revendiquent un poste de travail qu'ils n'ont aucune chance de décrocher comme du reste, le précise le DG ArcelorMittal Tébessa qui affirme que : «Ils n'ont aucune chance d'être recrutés devant des candidats diplômés issus de leur propre localité. Nous en avons reçu 1 078 dossiers de candidats locaux à l'emploi, transmis par l'ANPE. Nous avons sollicité cette agence de la wilaya de Tébessa pour le recrutement de 76 techniciens diplômés». Est-ce à dire qu'en occupant la mine et en empêchant les 520 travailleurs d'accomplir leur mission de produire le minerai nécessaire à la production nationale de l'acier liquide, ces 20 jeunes chômeurs démontrent que force ne reste plus à la loi ?