Dans sa dernière déclaration relative à la situation de cessation de paiement à laquelle est confrontée depuis le début de cette année ArcelorMittal Annaba, le Premier ministre a affirmé que par cette démarche, le Groupe ArcelorMittal au Luxembourg veut imposer, par le chantage au dépôt de bilan, un crédit bancaire sans garantie. Un crédit auquel il n'ouvre pas droit à la lecture des bénéfices nets qu'il a engrangés de ses activités sidérurgiques en 2011. Pour le seul premier trimestre de l'année écoulée, le groupe avait enregistré plus de 2,5 milliards de dollars. Que signifie alors tout ce remue-ménage autour de cette question de cessation de paiement qui, ces derniers jours a défrayé la chronique ? D'autant que sur les ondes des différentes radios nationales et la majorité des médias, Vincent le Gouïc le directeur général ArcelorMittal Annaba (AMA) n'avait pas cessé de répéter : « dès le 8 janvier nous allons entamer la procédure de dépôt du dossier de cessation d'activité». C'est ce qu'il avait confirmé lors d'un bref entretien qu'il nous avait accordé jeudi dernier. A une question relative à une éventuelle fermeture du complexe sidérurgique El Hadjar, le même responsable avait précisé : «Pour l'heure il est prématuré de parler de fermeture du complexe sidérurgique El -Hadjar. Tout ce que je peux dire est que cette cessation de paiement est le prélude au dépôt de bilan de notre société». Sa déclaration avait été confirmée quelques minutes plus tard par Smaïl Kouadria et Boudjemaa Bouraï respectivement secrétaire général du syndicat et président du comité de participation. Hier, le directeur général de l'AMA, son avocat conseil et ses proches collaborateurs que sont le directeur du contentieux et celui des finances se sont effectivement présentés devant le président du tribunal, non pas pour déposer le dossier déclaratif de la situation de cessation de paiement de la société mais pour s'informer de la procédure à respecter à cette fin. Démarche que confirme du reste un magistrat du tribunal d'El Hadjar qui a précisé qu'aucun dossier n'a été déposé par ArcelorMittal. Ce qui porte à croire que le remue-ménage avait pour objectif de donner plus de poids à cette simple démarche de collecte d'informations. Même les représentants des travailleurs ont cru à cette grossière manœuvre. Eux qui, ces derniers jours, ont multiplié les réunions pour défendre, diront-ils, leur outil de travail. En fait, l'information a été préalablement grossie pour donner plus d'ampleur à l'action. Par le biais de sa direction générale de Annaba, le groupe luxembourgeois de la sidérurgie veut faire croire qu'il envisage sérieusement de déposer le bilan d'ArcelorMittal Annaba. D'où la déclaration de Ahmed Ouyahia qui, implicitement a parlé de chantage. C'est ce qu'ont compris également les magistrats près le tribunal d'El Hadjar. Plusieurs n'ont pas manqué de s'interroger si, avec un avocat conseil et des cadres spécialistes des questions de droit économique et financier, la direction générale avait vraiment besoin de se déplacer pour s'informer sur la constitution du dossier de cessation de paiement. Ce qui nous ramène à la proposition de Smaïl Kouadria : «A défaut de financement du plan de redressement de 500 millions d'euros, procéder à la nationalisation du complexe sidérurgique et les autres unités comme la TSS et les mines de l'Ouenza et Boukhadra» avait-il inscrit au titre de revendications. Elles sont contenues dans la plateforme que les représentants des travailleurs envisagent de remettre le 19 janvier prochain à la direction générale du groupe Sider après leur sit-in. La même plateforme devrait être remise le 24 janvier à Abdelmadjid Sidi Saïd, le secrétaire général de l'UGTA et Mohamed Benmeradi, le ministre de l'Industrie. Pour ce faire, le secrétaire général du syndicat d'ArcelorMittal a ameuté les 300 syndicalistes, les membres du comité de participation du complexe sidérurgique d'El Hadjar et des mines de l'Ouenza et de Boukhadra ainsi que d'autres représentants des travailleurs en activité dans la zone industrielle de Rouïba pour soutenir leur action. Entre temps, le géant de l'industrie algérienne qui avait fait de Annaba la capitale de l'acier, se meurt. Parce qu'obsolètes, saturées ou à l'arrêt depuis des années, les installations de production ne fonctionnent presque plus. Et même si la plainte introduite par AMA en référé auprès du tribunal d'El Hadjar a été ponctuée par une ordonnance d'évacuation du laminoir Fil et Rond occupé par des salariés d'une société sous traitante, on en est toujours à la production zéro. Pourtant, à la signature du contrat de partenariat lui offrant sur un plateau royal 70% des actifs de la société qui deviendra ArcelorMittal-Annaba, le groupe s'était engagé à augmenter la capacité de production du complexe. Comme il s'était engagé à ne pas procéder à des compressions des effectifs. Or, si le gouvernement algérien a bloqué toute réalisation de projet sidérurgique durant les 10 années précédant la signature du contrat en 2001, le groupe luxembourgeois a liquidé par des départs volontaires ou des mises à la retraite de plus de 10 000 postes de travail. Il n'a par contre rien fait pour améliorer la production. Au contraire, des 800 000 tonnes que produisait Sider au temps de sa grandeur, ArcelorMittal arrive difficilement a dépassé les 600 000 tonnes/an avec 5 300 salariés au complexe sidérurgique d'El Hadjar. C'est qu'il est grand temps pour nos décideurs de se pencher sur ce dossier de partenariat gagnant (ArcelorMittal) perdant (gouvernement algérien). Comme si cette situation ne lui permet pas de gagner trop d'argent, voilà que le Luxembourgeois veut faire le coup des Australiens ou des Egyptiens. En plus du crédit de 200 millions de dollars sans garantie qu'il veut imposer, ArcelorMittal tente de récupérer l'équivalent de 45 millions de dollars de TVA. Pour calmer le jeu, la direction AMA a, via un communiqué qu'elle a émis hier, démenti l'information faisant état d'un éventuel dépôt de bilan. «Contrairement à ce qui a été rapporté par les journaux ces derniers jours, AMA n'est pas en situation de dépôt de bilan. Le groupe ArcelorMittal travaille avec ses partenaires pour mettre en place les garanties nécessaires de façon à résoudre dans les meilleurs délais le problème de financement et permettre à la société d'assurer un retour rapide vers un fonctionnement normal. En attendant, les opérations se poursuivent sans impact immédiat attendu sur l'activité». Tout est dit dans ce communiqué.