«Je reprendrais mon travail de pompier, et je demande que la caserne des pompiers d'Alger porte le nom du pompier Khelfi Amar, membre de l'ALN, tombé au champ d'honneur en 1957.» C'est la réponse donnée par le militant Georges Antoine Acampora à sa sortie de prison en 1962 à la question de savoir ce qu'il voulait faire maintenant qu'il est libre. Réponse lourde de sens et d'enseignements ! Ce fils de Bab El-Oued, après avoir lutté pour l'indépendance de l'Algérie, n'a pas ménagé ses efforts pour l'édification de son pays. Le militant Georges Acompora vient de nous quitter des suites de maladie à l'hôpital de Aïn Naâdja, dans la nuit de samedi à dimanche. Certains diront que c'est une pure coïncidence mais le hasard n'est jamais fortuit. Georges Acompora est décédé quelques heures après l'hommage rendu, samedi, à un autre militant algérien. Il s'agit du Fernand Iveton, exécuté le 11 février 1957, à la prison de Barberousse, vingt-et-unième victime du bourreau attitré Maurice Meyssonnier. Arrêté en août 1956, Georges Acampora a été torturé et emprisonné à la prison Barberousse pour être ensuite condamné à mort. Au début de 1959, il a été transféré à la prison d'El-Harrach, après avoir bénéficié d'une grâce et condamné aux travaux forcés à perpétuité avec 181 autres militants de la cause algérienne condamnés à mort. Né en février 1926, à Bab El-Oued, Georges Acampora n'a pas cessé de conjuguer le verbe à l'action pour apporter son édifice à l'idéal auquel il a consacré sa vie. Bon élève, Georges Acampora a dû quitter les bancs de l'école, à l'âge de 14 ans. De parents d'origine italienne, Georges est le dernier des six frères et sœurs d'une famille dont le père, Augustin Acampora, marin-pêcheur chez un patron français, éprouvait des difficultés à nourrir. Georges Acampora rejoint le monde du travail pour aider sa famille à subvenir à ses besoins. Il débute comme ouvrier pêcheur en transportant sur ses épaules d'adolescent les cageots de poissons d'Hussein Dey à Belcourt, pour les vendre au marché. Après avoir travaillé chez Spinoza comme apprenti tourneur, puis chez Fotioadis, à proximité de la gare d'Agha, en tant que tourneur. Parcours d'ouvrier sous le joug colonial et comme l'écrit le poète et homme politique martiniquais Aimé Césaire «il n'y a pas de colonialisme sans racisme». Georges Acampora, militant communiste, a consacré son âme et son esprit à l'indépendance de l'Algérie. A propos de cette étape historique du peuple algérien, Georges Antoine Acampora a déclaré en mars 1991 que «le mouvement national a canalisé tous les patriotes sur l'objectif de l'indépendance de l'Algérie», précisant que «les communistes algériens ont participé à ce large mouvement de libération nationale». L'expérience acquise de son service militaire, Acampora l'a mise au profit de la lutte pour l'indépendance. Comptant parmi les militants constituant les groupes de chocs, Acompora a pris part à l'attaque du commissariat de la Redoute. Vu son expérience d'ouvrier tourneur, Georges Acampora avait aussi comme mission de réparer des mitraillettes et de rectifier les culasses dans les ateliers des pompiers. Des actions d'un fervent militant algérien, prêt au sacrifice pour que vive l'Algérie libre. Sur ce qu'a été son rôle après l'indépendance, Georges avait eu à indiquer que «personnellement, j'ai participé après l'indépendance aux brigades de travail volontaire pour la réforme agraire. Nous avons aidé les paysans à occuper les grandes propriétés laissées vacantes par le départ des colons. Nous avons participé bénévolement au reboisement des régions entières brûlées au napalm par l'aviation militaire française.» Ce grand combattant et militant d'une profondeur humaine inouïe sera enterré aujourd'hui, à 14h, au cimetière de Bologhine. Il continuera à veiller sur son quartier de Bab El-Oued qu'il n'a jamais quitté même durant les durs moments qu'a vécus l'Algérie durant les années 1990.