L'élection de François Hollande président de la République française permet d'espérer une dynamisation des relations politiques et économiques par le biais de partenariats interentreprises de type gagnant-gagnant. Certes, il ne s'agit pas d'oublier le devoir de mémoire mais surtout de regarder vers l'avenir. Aussi s'agit-il d'inscrire nos actions communes afin de rapprocher nos intérêts politiques et économiques dans le cadre euro-méditerranéen et euro- africain afin de faire du bassin méditerranéen et l'Afrique des zones de paix et de prospérité partagée. Les échanges entre la France et l'Algérie ont plus que triplé en douze ans. La France demeure le premier fournisseur de l'Algérie et son 4e client, selon les données statistiques de 2010. Si l'on étend les comparaisons au reste du monde, l'Algérie est le troisième marché pour les exportations françaises hors pays de l'OCDE, après la Chine et la Russie, et l'Algérie est un partenaire stratégique en matière d'énergie pour l'Europe (concurrent de la Norvège et de la Russie) dont la France, comme le montrent les bonnes relations entre Gaz de France, Total et Sonatrach. Il faudrait entrevoir également le renforcement de la coopération dans les PMI/PME, les nouvelles technologies, l'agriculture et certains segments des énergies renouvelables et des services devant forcément favoriser le transfert de la connaissance. Pour l'énergie, le développement de l'énergie solaire peut donner lieu à une coopération plus intense par la promotion de multitudes activités à l'aval. Sous réserve de la levée des contraintes d'environnement, supposant pour l'Algérie de profondes réformes microéconomiques et institutionnelles, liant réformes et démocratie tenant compte de son anthropologie culturelle, une visibilité et cohérence dans la politique socioéconomique évitant l'instabilité juridique perpétuelle qui décourage tout investisseur dans le moyen et long terme, et pour la France d'éviter d'avoir une vision purement commerciale, l'Algérie et la France ont toutes les potentialités pour passer à une vitesse supérieure de coopération. Et notamment en fonction des intérêts équilibrés, notamment d'aider l'Algérie à passer d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures, principal défi entre 2012/2020, et devenir un pays pivot au sein de l'espace euro-méditerranéen et arabo-africain. Les possibilités d'affaires comme signalé précédemment sont nombreuses. L'attractivité du marché algérien découle des avantages comparatifs suivants : la proximité géographique des marchés potentiels d'Europe, d'Afri-que et du Moyen-Orient, la taille du marché intérieur estimée à environ 36 millions de consommateurs, des richesses naturelles importantes (pétrole, gaz), ainsi que d'autres ressources minérales non négligeables, peu ou pas exploitées, notamment le phosphate, le fer et l'or, des ressources humaines en grande partie jeunes, qualifiées et abondantes. Autres atouts : l'Algérie a un stock de la dette inférieur à 4 milliards de dollars, des réserves de change qui clôtureront à 205 milliards de dollars fin décembre 2012 et un programme d'investissement 2010/2014 de 286 milliards de dollars et, enfin, les liens historiques et culturels qui unissent l'Algérie et la France. Malgré une bonne évolution, ces échanges sont dérisoires comparés aux exportations et importations des deux pays car, il faut le reconnaître, les relations économiques entre l'Algérie et la France, malgré des discours de bonne intention, sont loin des attentes entre les deux pays, se limitant essentiellement aux hydrocarbures pour la partie algérienne, aux services, notamment bancaires, l'agroalimentaire, les produits pharmaceutiques et les produits issus de l'industrie automobile pour la partie française, alors que les potentialités sont énormes. Il y a effectivement des aspects politiques - qu'il appartient aux historiens algériens et français d'en faire l'écriture objective - mais également économiques (concurrence asiatique notamment) qui freinent ces échanges. Il faut être conscient que les nouvelles relations internationales ne se fondent plus essentiellement sur des relations personnalisées entre chefs d'Etat, mais sur des réseaux et organisations décentralisés à travers l'implication des entreprises et de la société civile qui peuvent favoriser la coopération, le dialogue des cultures, l'émigration, ciment de l'interculturalité, étant un vecteur dynamisant. Les affaires doivent être le fait d'opérateurs publics ou privés car, dans la pratique des affaires, il n'y a pas de «fraternité», de sentiments, et l'Algérie doit privilégier uniquement ses intérêts, comme c'est le cas de la France. Les opérateurs, qu'ils soient arabes, algériens, chinois, français ou américains, étant mus par la logique du profit maximum, iront là où, sous réserve des contraintes sociopolitiques et socioéconomiques, ils pourront réaliser le profit maximum. La dynamisation de cette coopération à travers les réseaux (il faut de nouveaux réseaux de part et d'autre qui s'adaptent au nouveau et aux nouvelles exigences) ne signifie nullement la fin de l'Etat régulateur stratégique en économie de marché concurrentielle, mais la fonction de l'Etat devant s'adapter à la mondialisation, ce que certains experts qualifient de re-mondialisation. Surtout en cette période de crise mondiale qui sera certainement de longue durée, avec cette dominance de la sphère financière sur la sphère réelle et de la détérioration d'une morale dans la gouvernance de la Cité avec cette profonde injustice sociale tant au niveau local qu'international. Avec cette crise structurelle et la poussée des pays émergents, s'impose une refonte des relations internationales au profit exclusif de l'humanité entière par une solidarité entre le Nord et le Sud. En cette ère de re-mondialisation avec les grands espaces et les effets de la crise d'octobre 2008 qui aura pour conséquence une importante reconfiguration géostratégique et économique entre 2015/2020, comme j'ai eu à le souligner dans une contribution parue à l'Institut français des relations internationales (IFRI) en avril 2011, il est dans l'intérêt de tous les pays du Maghreb d'accélérer l'intégration économique, si l'on veut attirer des investisseurs potentiels intéressés non par des micro-espaces, mais par un marché de plus de 100 millions d'habitants pour le Maghreb, de 500 millions pour l'espace euro-méditerranéen, et 1,5 milliard d'âmes à l'horizon 2020 pour le continent africain. D'ailleurs, l'avenir de l'Europe et du Maghreb est en Afrique et le Maghreb peut être ce relais puissant entre l'Europe et l'Afrique. En conclusion, il s'agit pour atteindre ces objectifs communs de dépassionner les relations entre l'Algérie et la France grâce à un partenariat équilibré et solidaire, loin de tout esprit de domination. L'histoire commune, bien que mouvementée, nous impose d'entreprendre ensemble pour une prospérité partagée se fondant sur une meilleure gouvernance et la valorisation du savoir. La coopération dans le domaine de la ressource humaine est un facteur stratégique de cette coopération.