Le pillage des richesses naturelles, notamment le sable, le corail, le liège et autres, font perdre à l'Algérie des millions de dollars. Notre enquête nous a emmené un peu plus loin pour dévoiler certains agissements de personnes sans foi ni loi qui, pour s'enrichir, détruisent notre environnement au vu et au su de tout le monde. Le chêne-liège est un arbre exclusivement méditerranéen et l'Algérie est classée troisième producteur mondial de liège après le Portugal et l'Espagne. D'après les récentes statistiques établies par le département du ministère de l'Agriculture et la Direction générale des forêts, notre pays dispose de plus de 400.000 hectares de chêne-liège pour une production annuelle de l'ordre de 300.000 quintaux de liège brut. La production moyenne de liège brut était, durant les années 2000, évaluée à 80.000 quintaux et en 2009 elle n'était que 51.000 quintaux seulement. La superficie actuelle occupée par le chêne-liège est de 230.000 hectares et, dans la région d'Annaba, la Conservation des forêts de la wilaya avait estimé la campagne de récolte du liège pour le ramassage et le stockage à plus de 1 200 quintaux. L'essentiel de la superficie de liège est localisé dans les communes de Berrahal, Seraïdi, Tréat, Oued El Aneb et Chetaïbi. Ainsi ,durant l'année 2009, 300 ha avaient fait l'objet d'un reboisement au titre d'un programme de réhabilitation des superficies forestières et de plantation d'arbustes de liège dans la cadre d'un programme prévoyant 450 ha. Or, on avait enregistré une importante diminution de la production dans certaines zones forestières où les exploitants sont en recul dans plusieurs zones comme Chehiba, entre Oued El Aneb et Aïn Berber, souligne-t-on. A ce sujet, il faut savoir que les exportations, notamment vers la France, l'Espagne et les Etats-Unis, de ce produit forestier qu'est le liège, l'un des plus rares produits hors hydrocarbures, rapporte à l'Algérie l'équivalent de 300 millions de dinars par an. Sa transformation dans quelques unités industrielles publiques basées à Jijel, Skikda et Béjaïa donne des bouchons, du polystyrène, du liège aggloméré et de la matière d'étanchéité. Sur le plan du marché mondial du liège, sa production est bien convoitée occupant une place stratégique. Certains spécialistes de la filière ont fait savoir que l'Algérie accuse un grand retard dans le développement de la chaîne de la transformation du produit brut. En 2009, la production mondiale avait atteint 340 000 tonnes, dont 81 % provenaient du Portugal, de l'Espagne et de la France et 19 % seulement de pays maghrébins, à savoir l'Algérie, le Maroc et la Tunisie. Le Maroc réalise en moyenne des recettes issues des exportations de ce produit de 15 millions de dollars et notre pays chiffre seulement 4 millions de dollars. Les 400.000 ha de chêne-liège que l'Algérie dispose sont situés principalement dans la région de Constantine, la Grande Kabylie et quelques milliers hectares dans le département du Centre. Les forêts de l'Est ravagées par la mafia du liège De sources crédibles proches de l'administration des forêts, dont la mission principale est la protection et la préservation du patrimoine national, la Nouvelle République apprend que la redoutable mafia du liège est particulièrement impliquée dans l'exportation illégale de cette matière et opère avec des alliances très influentes. Sachant que le liège algérien est de qualité supérieure, son exportation illicite vers les pays étrangers rapporte des sommes d'argent faramineuses. Certains habitants des régions montagneuses Edough ont affirmé avoir vu des camions chargés de liège, apparemment volé dans la région de Seraïdi à Annaba. D'après des sources fiables, les régions exploitées illégalement sont les wilayas de l'Est, notamment Annaba, plus précisément la zone forestière de Seraïdi, Oued El Aneb, Berrahal, Aïn Berber et Chetaïbi et aussi les wilayas de Jijel et Souk Ahras. On y trouve d'importantes zones montagneuses riches en liège et où les réseaux maffieux opèrent clandestinement pour piller cette matière très recherchée avec la complicité de leurs protecteurs «concessionnaires» qui parviennent facilement à faire passer le liège par la frontière algéro-tunisienne à l'est et la frontière algéro-marocaine à l'ouest, précise-t-on encore. Les acheteurs sont essentiellement des Espagnols, des Portugais, des Tunisiens et des Marocains. Depuis l'apparition du phénomène du terrorisme, l'administration des forêts s'est retrouvée dans l'impossibilité de mener convenablement sa mission de préservation des richesses naturelles. Ayant cessé de délivrer les autorisations d'exploitation, cette situation a permis à la mafia du liège d'agir librement dans un terrain libre et hors contrôle. Les exploitants récoltent et transportent le produit brut sans autorisation préalable vers les dépôts appartenant à des barons inconnus généralement sur la scène et qui disposent de véritables réseaux. Selon nos informations, les seuls qui se font prendre dans les barrages érigés par les services de sécurité sont les transporteurs. Dans ce chapitre, plus d'une centaine d'arrestations ont été opérées par les services de sécurité dans plusieurs villes, Jijel, Béjaïa, Souk Ahras, Collo, Ouled Attia et Annaba et ont été poursuivis pour transport clandestin et exportation illégale de chêne-liège, nous a-t-on indiqué.