Evitons l'illusion juridique, la mentalité bureaucratique étant en panne d'imagination. Un texte-loi n'est qu'un texte que peut contredire quotidiennement les pratiques sociales. Pour son efficacité, le texte juridique, quelle que soit sa forme, doit s'attaquer au fonctionnement de la société, favoriser les forces sociales acquises aux réformes et se projeter sur l'avenir en tenant compte de la future carte géostratégie mondiale. Nous ne pouvons pas ne pas reconnaître le décalage qui existe entre les potentialités que recèle l'Algérie, et elles sont énormes, et le niveau de développement, loin des attentes que le pays a atteint après plusieurs décennies d'indépendance, 98 % d'exportation d'hydrocarbures et important 70/75% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées Il s'agira de préparer l'après-hydrocarbures avec cet épuisement inéluctable des réserves du pétrole dans 14 ou 15 ans, du gaz conventionnel dans 20 ou 25 ans tenant compte des coûts croissants, de la consommation intérieure, des extrapolations d'exportations et des nouvelles mutations énergétiques mondiales, au moment où la population algérienne dépassera 40 millions sans hydrocarbures. On devra concilier, du fait des importants bouleversements géostratégiques mondiaux qui s'annoncent entre 2015 et 2020, un développement harmonieux conciliant efficacité économique, développement équilibré et solidaire, tenant compte de la protection de l'environnement et d'une profonde justice sociale, passant impérativement par une mutation systémique. Aussi, faut-il éviter l'euphorie de certains car en perpétuant le statu quo et sans changement profond, le risque réel étant l'accélération des tensions sociales différées par la distribution de la rente des hydrocarbures sans contreparties productives conduisant à terme le pays au suicide collectif. Après 50 années d'indépendance politique, 98 % des exportations sont constituées d'hydrocarbures et 70, voire 75% des besoins des entreprises et ménages importés, c'est le syndrome hollandais. Le dernier rapport de mai 2012 du FMI n'exclut pas cela à terme si les dirigeants actuels dépensent sans compter. Dès lors, l'Algérie risque un nouvel octobre 1988 comme mis en relief par le Premier ministre le 2 juin 2012 en parlant d'échec de la politique socio-économique entre 2000 et 2012 avec des violences plus fortes et par là une déstabilisation de la région méditerranéenne et du Sahel favorisant l'intervention étrangère. D'où les huit propositions suivantes. 1)- L'Algérie doit engager de véritables réformes structurelles, notamment celles du système politique, centre névralgique de la résistance au changement et à l'ouverture en choisissant clairement entre un régime parlementaire ou présidentiel afin de responsabiliser les acteurs politiques. 2)- Réaliser la réforme de la justice par l'application et l'adaptation du droit, la lutte contre la corruption qui se socialise, devenant un danger pour la sécurité nationale devant synchroniser le contrôle populaire, parlementaire et le contrôle technique. 3)- Les réformes du système éducatif, centre d'élaboration et de diffusion de la culture et de l'idéologie de la résistance au changement et à la modernisation du pays misant sur le nombre au détriment de la qualité donnant un système socio-éducatif non adapté. 4)- Procéder aux réformes du secteur des hydrocarbures, source de rente et objet de toutes les convoitises, et de l'agriculture par une nouvelle politique foncière et une politique de gestion de l'eau. 5) Facteur de cohésion sociale, il s'agira d'avoir une nouvelle gestion des stratégies sociales, devant revoir la gestion des caisses de retraite et de la Sécurité sociale. 6)- S'attaquer à la réforme du système financier qui est un préalable essentiel à la relance de l'investissement national et étranger, les banques publiques et privées étant au cœur d'importants enjeux de pouvoir entre les partisans de l'ouverture et ceux de la préservation des intérêts de la rente, étant considérée, à juste titre, comme l'indice le plus probant de la volonté politique de l'Etat algérien d'ouvrir ou non l'économie nationale à la libre entreprise. 7)- Intégrer la sphère informelle contrôlant 40 % de la masse monétaire en circulation et 65 % des segments des produits de première nécessité. 8) Adapter l'Algérie aux nouvelles mutations mondiales en analysant les impacts de l'accord d'association avec l'Europe applicable depuis le 1er septembre 2005 et son éventuel adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) dans le Maghreb, pont entre l'Europe et l'Afrique, son espace social naturel. Etant différées, alors que le principal défi des gouvernants du XXIe siècle est la maîtrise du temps, les réformes, surtout dans l'administration et les services collectifs, la crise grecque étant un épiphénomène de ce qu'attend l'Algérie en cas de perpétuel statut quo, seront douloureuses, d'où l'urgence d'une austérité partagée et d'une moralité sans faille de ceux qui auront à diriger la cité. Tout en évitant une vision de sinistrose car tout ce qui a été accompli depuis l'indépendance politique n'est pas totalement négatif, le négatif l'emportant sur le positif, avec la non-proportionnalité de la dépense monétaire via les hydrocarbures par rapport aux impacts économiques et sociaux, les responsables politiques actuels ont une lourde responsabilité historique devant les générations futures car gouverner c'est prévoir.