Tlemcen, l'ancienne capitale des Zianides, a réussi, cinq décennies après le recouvrement de l'indépendance nationale, à retrouver son lustre d'antan et à se réconcilier avec son histoire, sa culture, ses traditions et son art qui ont toujours fait sa réputation et sa renommée. La région de Tlemcen a longuement souffert des affres de la colonisation et des tentatives d'éradication de toute une histoire liée à une identité culturelle bien ancrée dans la société. Les atteintes à ces pans entiers de l'histoire de ville sont nombreuses, à l'exemple de la destruction de la Medersa Tachfiniya qui fut en son temps un véritable pôle de rayonnement culturel, scientifique et une destination incontournable pour bon nombre d'érudits, de savants et d'étudiants venus de diverses contrées. C'est le cas également de la mosquée de Sidi Belahcene, un joyau de l'architecture arabo-andalouse, transformée en dépôt de fourrage durant cette même période et la citadelle d'El-Mechouar, symbole d'une civilisation deux fois millénaire, transformée également en caserne et ses palais complètement détruits par un système colonial voulant coûte que coûte acculturer et déposséder tout un peuple de son identité. L'acharnement sur ces lieux de culte et de culture a été tel que des pierres tombales ont été utilisées comme dalots pour des réseaux d'assainissement. Elles furent découvertes à l'occasion de fouilles effectuées par l'Agence nationale de recherches archéologiques, lors des travaux de rénovation et de restitution du palais royal. Reconquérir sa stature d'antan 50 ans après le recouvrement de l'indépendance nationale, la capitale des Zianides s'est reconstruite progressivement pour revenir à la place qui fut la sienne depuis des siècles. Le couronnement des efforts des pouvoirs publics à vouloir redonner à Tlemcen son statut de capitale historique et culturelle s'est concrétisé l'année écoulée avec sa consécration comme capitale de la culture islamique. Ce choix n'a pas été fortuit ou le fruit du hasard mais la conséquence d'une longue marche de l'histoire ancienne ou récente, l'histoire d'El-Makkari, d'Ibn Khamis, de Sidi Daoudi qui fut le premier dans le monde musulman à commenter Sahih El-Boukhari au 10e siècle, de cheikh Senouci avec ses ouvrages théologiques qui restent à l'heure actuelle une référence en matière de «Aâkida» (foi) ou encore Mohamed Dib et sa fameuse trilogie. Une consécration qui a permis au monde de découvrir cette cité qui n'a point perdu de son identité et de sa culture. 50 ans après, la cité a progressivement retrouvé ses espaces culturels sans lesquels l'action culturelle ne peut connaître une dynamique et une relance qui font d'elle aujourd'hui une capitale culturelle par excellence. Dans les années 70, Tlemcen s'est dotée d'une Maison de la culture qui porte aujourd'hui le nom d'Abdelkader Alloula, l'une des figures marquantes du mouvement théâtral national de la période post-indépendance. Les 53 communes que compte la wilaya ont vu la réalisation d'au moins un centre culturel, où les enfants et les adultes peuvent s'adonner à leurs «hobbies». Aujourd'hui, la cité des Zianides, devenue capitale de la culture islamique, s'est complètement métamorphosée en se dotant d'infrastructures culturelles d'envergure internationale. Les pouvoirs publics ont investi des sommes colossales pour doter cette ville millénaire de projets à la hauteur de son statut et de sa stature de ville d'art et d'histoire. Parmi ces infrastructures, on relèvera le Palais de la culture Abdelkrim-Dali, qui constitue actuellement la plaque tournante de l'action culturelle locale, nationale voire internationale. Conçu dans un style architectural arabo-mauresque, ce nouveau temple culturel dispose de toutes les commodités nécessaires, à l'instar des salles de conférences, des salles d'exposition outre la salle des spectacles d'une capacité de 2 500 personnes. Des infrastructures d'envergure En face de ce palais se dresse majestueusement le Centre d'études andalouses. Il servira d'annexe pour le Centre national d'études préhistoriques, anthropologiques et historiques. Conçu dans le même style que le palais de l'Alhambra en Espagne, ce centre contribue à dépoussiérer le patrimoine immatériel que recèle Tlemcen et les autres régions du pays. Il permettra également de se réapproprier l'histoire et la culture algériennes et de développer les sciences humaines de sorte à sauvegarder l'identité nationale. Entre autres projets culturels réalisés à Tlemcen figure en bonne place la Bibliothèque régionale de lecture publique, un autre joyau architectural doté de toutes les commodités et qui sert à promouvoir et à encourager la lecture et l'activité littéraire de manière générale. Faut-il rappeler qu'au titre de la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique», pas moins de 400 ouvrages ont été édités pour la seule année 2011. Au quartier d'El-Koudia, le théâtre de verdure ainsi que les halls d'exposition constituent une autre fierté pour la région puisqu'ils permettent d'abriter des activités culturelles, artistiques d'envergure internationale. Conçus selon les normes internationales, les halls d'exposition d'une superficie totale de 10 000 m2 abritent des expositions thématiques ainsi que des Salons de livres et autres, tandis que le théâtre de verdure met à la disposition des artistes et organisateurs d'évènements un espace convivial adéquat pour les grandes soirées musicales ou artistiques. Il a d'ailleurs abrité en 2011 divers festivals internationaux dont notamment le Festival international du diwan et celui des danses populaires. La culture muséale a également connu à Tlemcen un essor très important grâce notamment à la création du musée d'art et d'histoire de la ville de Tlemcen sur le lieu même où la France coloniale avait érigé le siège de la commune. Cet espace culturel ainsi que les autres, comme le musée des manuscrits, implanté dans l'ex-siège de la Medersa Khaldounia, à El-Eubad, à proximité du complexe religieux de Sidi-Boumediene, le musée d'archéologie de la medersa franco-musulmane qui enregistre actuellement d'importants travaux d'extension et la mosquée, située à l'intérieur du Mechouar, transformé en musée également. Ces infrastructures reflétant l'histoire de la région ont pu attirer plus de 500 000 visiteurs en l'espace d'une année (2011) ; c'est dire l'engouement d'un public avide de se réapproprier son histoire ou tout simplement son identité. Le palais royal ainsi que la cinémathèque sont les autres projets à conforter Tlemcen dans son statut de capitale culturelle par excellence. Ces joyaux, l'un permettant de voir de près le génie des bâtisseurs zianides et l'autre permettant aux cinéphiles de se réconcilier avec le 7e art. Maghnia, avec son magnifique centre culturel, Sebdou, avec son centre culturel et sa salle de cinéma totalement rénovés, Remchi, Nedroma et les autres villes de la wilaya ne sont pas en reste de cette relance culturelle puisqu'elles ont aussi bénéficié d'infrastructures à même de promouvoir diverses activités culturelles, qu'elles soient théâtrales, cinématographiques, d'art plastique ou encore relevant du patrimoine immatériel et qui font la particularité de la wilaya comme la danse «Alaoui» à Sebdou ou le carnaval «Ayrad» à Béni Snous. Ces acquis et bien d'autres permettront à Tlemcen de retrouver son lustre d'antan, 50 ans après l'Indépendance nationale et montrent très bien l'attachement de tout un peuple à son identité culturelle qu'on voulait à tout prix anéantir.