Personne ne s'attendait à ce que le sommet de l'Organisation internationale de la francophonie à Kinshasa (Congo) soit clôturé par une surprise de taille et ce, en agréant le Qatar en sa qualité de membre associé de l'OIF. En effet, l'Assemblée de la Francophonie s'est élargie en accordant à l'Arménie le statut de membre à part entière de l'Organisation, celui d'observateur à l'Uruguay mais en faisant entrer le Qatar directement comme membre associé, ce qui a créé une polémique. L'OIF compte désormais 57 membres, dont 3 associés et 20 observateurs. L'adhésion d'un pays de la Péninsule qui n'a rien à voir avec la langue de Molière a créé une grande polémique chez la majorité des pays membres de cette organisation et a contraint les observateurs à s'interroger sur l'objectif réel de cet état de fait. L'ajout du Qatar a créé une grande polémique en raison de l'absence des raisons linguistiques, historiques ou géographiques qui permettent à ce pays de figurer dans l'espace francophone. Ce n'est pas parce que ce pays donne la parole à une personne francophone d'intervenir dans certaines manifestations ou festivités annuelles par le biais d'internet ou une station de radio, que le Qatar pourrait intégrer la famille francophone. Si c'est le cas, des milliers de pays pourraient redevenir membres de l'OIF. En ironisant, certains spécialistes ont indiqué qu'il faudrait d'ores et déjà penser à changer l'appellation de l'OIF par la «Francoqatarphonie». Les mêmes spécialistes s'interrogent si le Yémen par exemple pourrait être admis en qualité de membre si toutefois les dirigeants de ce pays sollicitent l'adhésion de leur pays à l'OIF ? A quel but et objectif et sur quel critère, l'Assemblée de l'OIF a accepté l'adhésion du Qatar à la famille francophone. Sinon comment admettre qu'un pays qui n'a rien à voir avec la langue de Molière redevienne membre des pays qui partagent la langue française, expliquent-ils ? La population du Qatar est divisée comme suit: 40% de Qataris, Egyptiens, Marocains et Palestiniens, 18% de Pakistanais, 18% Indiens, alors que 14% sont de diverses nationalités. Sur le plan géographique, le Qatar se trouve dans la Péninsule arabique et ne possède aucune frontière avec les pays de la Francophonie. Il en est de même pour l'histoire, où ce pays était sous la coupe des Perses et du Bahreïn pendant des milliers d'années. Nous n'apprenons rien à personne en indiquant que le Qatar pourrait figurer parmi les pays anglophones en raison de sa colonisation par les Britanniques et n'est redevenu indépendant qu'en 1971. Aucune information n'a filtré que ce soit avant ou après le sommet de Kinshasa au sujet de l'adhésion du Qatar à l'OIF. Les dirigeants qataris auraient-ils au préalable signés en contrepartie un engagement visant à introduire à l'avenir la langue française dans l'enseignement ? L'élargissement de l'OIF par cette manière ne pourrait que dénaturer la Francophonie de sa véritable identité. En somme, la décision d'intégrer le Qatar dans l'Organisation francophone fait polémique dans la mesure où le richissime pays n'est pas passé par les étapes traditionnellement nécessaires pour obtenir ce statut. A ce sujet, les médias français s'interrogent également sur l'objectif de cette adhésion qui fait grincer des dents d'autant que la légitimité du Qatar à entrer dans la Francophonie n'est pas évidente. Le pays n'étant pas francophone même s'il possède de nombreux intérêts financiers dans le pays, ont-ils indiqué. D'autres journaux reprochent aux responsables du Qatar de vouloir développer davantage son influence en Afrique de l'Ouest musulmane et notamment sa propension à financer des écoles religieuses prenant parfois la place d'écoles de langue française. Selon des informations proches de l'OIF, il y a eu des négociations très serrées sur le Qatar. Mais les Qataris ont fait un lobbying terriblement efficace auprès de différents pays, notamment africains. Le Qatar aurait ainsi obtenu le soutien de Djibouti et de la Guinée, pour favoriser son entrée au sein de l'OIF. Le pays faisait notamment valoir qu'il accueillait de nombreux expatriés francophones et qu'une radio publique de langue française avait été financée au Qatar, selon une source informée des négociations. Ces nouvelles adhésions pourraient réveiller le débat, récurrent, sur l'élargissement constant de l'Organisation. Certains commentateurs reprochent en effet à l'OIF de perdre sa spécificité, au fur et à mesure qu'elle grossit en intégrant des pays qui ne sont pas considérés comme francophones.