Un nouveau rapport d'Amnesty International dénonce des violations généralisées des droits humains dont sont victimes les migrants, aux mains de milices incontrôlées. Ils viennent du Burkina Faso, du Cameroun, de l'Erythrée, du Soudan, du Niger ou encore du Tchad. Fuyant les persécutions, la guerre ou la pauvreté, certains ont tenté leur chance en Libye, d'autres essaient de migrer encore plus au nord vers l'Europe. Sous le régime de Mouammar Kadhafi, leur sort n'était pas enviable. Il l'est encore moins après la révolution qui a entraîné la mort du dictateur. Dans un rapport intitulé «We are foreigners, we have no rights» (Nous sommes étrangers, nous n'avons pas de droits) publié hier, mardi 13 novembre, Amnesty International dénonce, comme de nombreuses autres organisations des droits de l'Homme avant elle, les persécutions dont font l'objet réfugiés, migrants, demandeurs d'asile et clandestins en Libye. Exploitations, insultes, coups, tortures... Fondé sur une enquête effectuée entre mai et septembre 2012, le rapport recueille les témoignages de nombreuses personnes détenues dans des centres, parfois construits spécifiquement pour accueillir les clandestins. Amnesty International en a visité neuf, où 2 700 personnes sont détenues pour une durée illimitée en raison d'"infractions relatives à l'immigration». Des femmes enceintes et des enfants en bas âge figurent parmi les prisonniers. «Dans la grande majorité des cas, les arrestations sont le fait de miliciens armés et peuvent être assorties de violences et de la confiscation de téléphones mobiles, d'argent ou d'autres biens de valeur», écrit Amnesty International. Après leur arrestation, dans la rue, à des check-points, à leur domicile ou alors qu'ils s'apprêtent à traverser la Méditerranée, les migrants «sont placés sous le contrôle du service de lutte contre l'immigration illégale, ou bien dans des locaux administrés de facto par des milices armées». D'après les témoignages, les détenus «se plaignent le plus souvent de la surpopulation, d'une nourriture inadéquate, d'un accès discontinu aux soins de santé, de l'absence d'activités de détente et de sorties à l'air libre, de brutalités, d'actes racistes, d'insultes et du manque d'hygiène». Pour avoir tenté de s'évader ou de s'être plaint des conditions de détention, les prisonniers sont brutalisés. Le pire est réservé à ceux qu'on soupçonne sans preuve d'avoir servi le régime de Mouammar Kadhafi. «J'ai été traîné à l'étage, dans le bureau des interrogatoires. Plusieurs hommes se sont mis à me frapper à tour de rôle après m'avoir menotté et contraint de m'allonger sur le sol. Ils se sont servis de tout ce qu'ils ont trouvé, des tuyaux d'arrosage et des bâtons, et m'ont envoyé des décharges électriques. Ils m'ont aussi infligé la falaqa [coups assenés sur la plante des pieds] et j'ai perdu connaissance», raconte un Tchadien détenu sans inculpation par une milice armée depuis avril 2012.