« Il faut casser le tabou du silence et mettre en place un mécanisme d'alerte d'enlèvement d'enfant. La loi devra le prévoir et faire en sorte que les médias, c'est-à-dire la télévision, relayent l'information dès que la police est saisie d'une plainte ou d'un signalement», estime Me Nadia Aït-Zaï. Le rapt ou l'enlèvement d'enfant est, hélas, un phénomène qui prend sournoisement de l'ampleur chez nous. On n'est plus face à des faits divers mais bien à une monstrueuse pratique dont on a du mal à expliquer les tenants et les aboutissants. L'avocate Nadia Aït-Zaï nous explique que «les causes du phénomène sont multiples. Beaucoup d'enfants sont livrés à eux-mêmes, responsabilisés trop tôt et trop jeunes. Ils jouent dans la rue sans surveillance et vont à l'école non accompagnés. Ils sont livrés ainsi aux prédateurs de passage ou même aux voisins ou parents mal intentionnés. Par ailleurs, la construction des grands ensembles et des nouvelles cités érigées ici et là a réuni des personnes qui ne se connaissent pas, tout en étant un lieu de passage à toute personne étrangère. Le danger s'accentue et l'inévitable arrive sans que personne ne s'en rende compte». Pour cette avocate, «ce n'est certainement pas la loi qui encourage ce phénomène. La loi pénale est rigide, elle est dissuasive, et tout individu sait qu'en commettant une infraction de quelque nature qu'elle soit est sanctionné. Il faut par contre donner le maximum de la peine incompressible pour donner l'exemple dans ce genre de cas. Lorsque l'on a voulu sanctionner les voleurs de téléphone portable d'une peine de trois ans, la mesure a été appliquée par tous les magistrats. Il faut en faire autant avec les auteurs d'enlèvement d'enfant et les agresseurs d'enfant. Donner le maximum de la peine, soit 20 ans, et pourquoi pas modifier la loi et porter la sanction à trente ans de réclusion criminelle». La loi n° 06623 du 20/12/2006 du code pénal prévoit dans son article 293 que quiconque, par violence, menace ou fraude, enlève ou fait enlever une personne, quel que soit son âge, est puni de la réclusion criminelle de 10 à 20 ans et d'une amende de 1.000.000 DA à 2.000.000 DA. Si la personne enlevée a été soumise à des tortures corporelles, le coupable est puni de la réclusion criminelle à perpétuité. Si l'enlèvement avait pour but le paiement d'une rançon, le coupable est également puni de la réclusion criminelle à perpétuité. «Le cas de Chaïma répond aux conditions prévues par l'article 293 ; elle a été enlevée par violence, elle a été soumise à des tortures corporelles et sexuelles ayant entraîné la mort, et l'auteur sera condamné à vingt de réclusion criminelle et ne bénéficiera pas d'une circonstance atténuante prévue par les alinéas 1 et 2 de l'article 294 du code pénal. Dans ce cas, il suffit d'appliquer la loi dans toute sa rigueur. Lorsque l'auteur est arrêté, il ne devra pas bénéficier de réduction de peine pour bonne conduite», estime Me Aït-Zaï. Pour elle, «il ne faut pas se taire ou se dire que cela n'existe pas chez nous ou alors que c'est une fugue. Il faut casser le tabou du silence et mettre en place un mécanisme d'alerte d'enlèvement d'enfant. La loi devra le prévoir et faire en sorte que les médias, c'est-à-dire la télévision, relayent l'information dès que la police est saisie d'une plainte ou d'un signalement, le tout coordonné par le procureur de la République. Ce mécanisme existe au Canada et en France, il faut s'en inspirer et ceci est de la responsabilité des pouvoirs publics qui assurent la sécurité des personnes».