Les évènements de ces derniers jours en Egypte avec leur lot de victimes nous font revivre le cauchemar qu'a connu l'Algérie le 5 octobre 1988, par ces troubles incessants, où se mêlent des coups de feu venant de nulle part et de partout. Madame Ashton, chargée des Affaires étrangères de l'Union européenne, vient de lancer ce 27 janvier, un appel à la retenue et au calme tandis que l'ambassade des Etats-Unis qui a été la cible d'attaques le 25, a gelé toute activité jusqu'à nouvel ordre. L'Egypte est-elle en train de récolter les fruits amers de cette chose que l'on surnomme «printemps arabe» ? Madame Clinton elle-même vient d'affirmer dans un mea culpa face au Congrès américain, que le terrorisme a été renforcé par les révoltes arabes. La secrétaire d'Etat US qui est sur le départ, s'expliquait devant le Congrès américain sur l'assassinat de l'ambassadeur américain suite à l'attaque de l'ambassade à Benghazi, ville qui connaît un regain de violence sans précédent poussant au départ tous les Occidentaux qui ont installé le chaos en Libye par leur guerre irresponsable. L'aveu tardif de Madame Clinton résume à lui seul l'impasse dans laquelle se trouvent les pays qui ont été balayés par un printemps aux allures d'hiver. Deux ans après la destitution de Moubarak provoquée par ce qu'on pourrait appeler un coup d'Etat populaire, l'armée égyptienne est toujours dans la rue, que ce soit au Caire ou à Port Saïd où règnent l'anarchie et le chaos. Les Egyptiens qui aujourd'hui doivent utiliser des tickets de rationnement pour se procurer du pain, font face à une situation économique dramatique. Le délabrement total du secteur du tourisme, principale richesse du pays, provoque le départ de tous les investisseurs étrangers ou nationaux vers des cieux plus cléments que ceux de la confrérie des Frères musulmans. Le nouveau pharaon d'Egypte que les USA ont ramené de Californie et qui possède la double citoyenneté égyptienne et américaine, n'a pas hésité à enfreindre la Constitution pour s'octroyer des pouvoirs divins. Le régime de Morsi est une caisse de résonnance et l'antichambre de l'émir bedonnant du Qatar ; celui-ci a d'ailleurs déclaré que les présidents égyptien et tunisien ne pouvaient prendre aucune décision sans le consulter au préalable. Morsi, qui a rejoint définitivement le harem du bouffi du Qatar, a prouvé son allégeance illimitée en s'alignant sur l'opposition qatarie à l'intervention française au Mali. Rappelons-nous l'offensive israélienne à Ghaza, où Morsi, le serf de Cheikh Hamad al Thani, a vendu la bande de Ghaza aux Israéliens, avec la complicité du laquais de Doha, Khaled Mechaal. L'Egypte est désormais divisée et agonise sous les yeux du monde, impuissante à réagir quand il s'agit de damner le pion à ces serviteurs inconditionnels des Occidentaux que sont les islamistes, contrairement à la Syrie où ces mêmes Occidentaux arment et forment des mercenaires sanguinaires qu'ils trimballent d'aéroport en aéroport pour accomplir un djihad version Mac Do. Les Frères musulmans égyptiens nous montrent à quel point la déliquescence a rongé les sociétés arabes qui confient leur sort à des apprentis sorciers, dont l'incompétence et la traîtrise se dissimulent dans le commerce politico-religieux. Où sont ces jeunes blogueurs formés par Otpor, ces «révolutionnaires du clavier», dont on a tant vanté les mérites, ces sauveurs des nations arabes qu'ils ont soulevées «spontanément» avec la bénédiction de la CIA, invités privilégiés des plateaux de télé de tous les pays ? Ces héros factices ont prouvé qu'ils sont juste des pantins qui sèment le désordre et la fitna dans les sociétés arabes. Le règne ténébreux des Frères musulmans sur l'Egypte vient d'enterrer ce qu'il reste du prestige de ce grand pays arabe dont la longue histoire regorge de trésors inestimables appartenant au patrimoine humain. Mes ancêtres de la redoutable tribu Kotama qui sont partis, conquérants, de ma ville Fedj m'zala, l'actuelle Ferdjioua, vers Le Caire qu'ils ont bâtie sous la dynastie fatimide, doivent être consternés depuis leur repos éternel en voyant la grande Egypte dirigée par un monarque insignifiant aux ordres d'un émirat microscopique, lui-même à la botte d'Israël et des Occidentaux. Allons-nous assister en direct, impuissants et médusés, à la destruction des pyramides et du sphinx qui symbolisent une grande civilisation, comme cela s'est produit en Afghanistan avec la démolition des bouddhas géants ou dernièrement avec les images de ces fanatiques acharnés et incultes saccageant les mausolées des saints de l'Islam à Tombouctou au Mali ? La situation de l'Egypte, comme d'ailleurs celle de la plupart de ces pays traversés par le typhon qu'on appelle «printemps arabe», se détériore de jour en jour sous les yeux des empires occidentaux cautionnant ces hordes de nouveaux vandales qui s'attaquent aux joyaux de la civilisation arabo-musulmane. Sa position géopolitique au cœur du monde arabe connaît une instabilité incontrôlable dont l'issue est incertaine. Le désert du Sinaï voit des groupes terroristes se balader librement, commettre des attentats et communiquer activement avec d'autres phalanges, celles notamment qui règnent en maîtres en Libye et qui viennent de frapper sur le sol algérien à In Amenas. La venue au pouvoir des Frères musulmans en Egypte, qui n'est rien d'autre qu'un lifting politique, et l'absence totale du rôle de l'Etat, marquent l'avènement d'usurpateurs manquant de projets en vue de construire une société éclairée et cohérente. Le sectarisme de la confrérie et du président Morsi est un obstacle majeur à toute avancée démocratique en Egypte. L'opposition égyptienne délabrée, séduite par le mirage d'une liberté à laquelle elle a cru naïvement lors de cette fausse couche printanière, se retrouve acculée face à sa défaillance et à son insuffisance de lucidité, à la traîne du processus historique qui la condamne à la figuration plutôt qu'à l'avant-garde du combat politique. Loin du rêve généreux de Cheikh Imam qui a chanté sa terre dont les geôles sont remplies de ses cris de joie et de tristesse, l'Egypte navigue tel un radeau perdu au milieu d'un océan d'incertitude. «Il est plus facile de trouver un Dieu qu'un homme en Egypte» (proverbe égyptien).