Des centaines de manifestants ont continué de protester violemment jeudi dernier, en Egypte, au Yémen et en Irak notamment, contre un film islamophobe qui enflamme le monde arabo-musulman. Le président égyptien Mohammed Morsi s'est engagé à protéger les ambassades étrangères en Egypte, en dénonçant "actions illégales" de "haine" et des "provocations". Les représentations diplomatiques américaines au Yémen, en Egypte et en Libye sont depuis trois jours la cible d'attaques, qui ont coûté la vie mardi à l'ambassadeur des Etats-Unis à Benghazi (est de la Libye) et trois autres américains. Washington soupçonne toutefois dans ce dernier cas un attentat perpétré à l'occasion du onzième anniversaire du 11-Septembre et non une manifestation spontanée, selon un haut responsable américain. Le film amateur "Innocence of Muslims" ("Innocence des musulmans"), réalisé en Californie et diffusé sur Internet, n'en continue pas moins de susciter des réactions violentes. La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a dénoncé jeudi dernier un film "répugnant, condamnable", même si rien ne peut justifier la violence, a-t-elle ajouté. Au Caire, des affrontements opposaient pour la troisième journée consécutive la police anti-émeute à des manifestants près de l'ambassade des Etats-Unis. Les policiers ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser les émeutiers, tandis que des pierres volaient de part et d'autre. Contrairement à mercredi, les policiers sont cette fois parvenus à tenir la foule à distance de l'enceinte diplomatique. D'après le ministère égyptien de l'Intérieur, 16 manifestants et 13 policiers ont été blessés lors de ces affrontements, qui ont éclaté au cours de la nuit et se sont poursuivis dans la journée de jeudi. Douze manifestants ont été arrêtés. Au Yémen, plusieurs centaines de manifestants ont franchi l'enceinte de l'ambassade américaine dans la capitale, Sanaa, aux cris de "Mort à l'Amérique" et "Mort à Israël". La foule n'est pas entrée dans le bâtiment abritant les bureaux de la représentation diplomatique mais a descendu le drapeau et l'a brûlé. Selon un communiqué de l'ambassade, "tout le personnel est sain et sauf". Le président yéménite Abed Rabbo Mansour Hadi a présenté des excuses aux Etats-Unis pour ce qu'il considère comme un complot destiné à nuire aux relations entre son pays et Washington. En Irak, plusieurs milliers de partisans de l'imam chiite radical Moktada Al-Sadr ont brûlé des drapeaux américains jeudi à Bagdad. "Nous rejetons l'attaque contre le prophète Mahomet", pouvait-on lire sur des banderoles. "Non, non à Israël! Non, non à l'Amérique, scandaient les manifestants dans le fief chiite de Sadr City, situé dans le nord-est de Bagdad. Des manifestations ont également eu lieu au Pakistan et en Iran. En déplacement à l'Union européenne à Bruxelles, le président égyptien Mohammed Morsi a condamné "dans les termes les plus clairs" l'attaque du consulat américain de Benghazi. "Nous condamnons fermement tous ceux qui se livrent à de telles provocations" et "qui encouragent la haine", a déclaré M. Morsi, qui a demandé au président Barack Obama "de mettre un terme à de tels comportements". "Mais nous affirmons en même temps que cela ne peut justifier l'attaque d'ambassades ou de consulats. L'Etat égyptien est responsable de leur protection et le peuple égyptien ne se livrera pas à des actions illégales", a assuré le chef de l'Etat issu des Frères musulmans. Obama parle de sécurité avec la Libye et l'Egypte Le président américain Barack Obama a appelé les dirigeants d'Egypte et de Libye pour discuter de leur coopération dans le domaine de la sécurité après l'attaque meurtrière du consulat américain de Benghazi et une violente manifestation au Caire, a indiqué jeudi dernier, la Maison Blanche. M. Obama a demandé à la Libye de collaborer avec Washington afin d'arrêter et traduire en justice les auteurs des meurtres de l'ambassadeur américain et de trois autres Américains, et pressé l'Egypte de respecter ses engagements en matière de protection des légations des Etats-Unis et de leur personnel. L'appel téléphonique intervient après l'attaque mardi par des islamistes armés du consulat général des Etats-Unis à Benghazi (est de la Libye) où furent tués l'ambassadeur et ses trois concitoyens, quelques heures après que des émeutiers eurent escaladé le mur de l'ambassade américaine au Caire et arraché et déchiré le drapeau qui y flottait. Le président a appelé aujourd'hui le président égyptien (Mohamed) Morsi pour évoquer avec lui le partenariat stratégique entre les Etats-Unis et l'Egypte, a précisé la Maison Blanche, à propos du contenu de l'appel téléphonique passé mercredi soir par M. Obama. Obama a également déclaré à M. Morsi qu'il rejetait tout dénigrement de l'Islam, mais a souligné que rien ne justifiait jamais la violence contre des innocents et des actes mettant en danger le personnel et les installations américaines. Côté libyen, M. Obama s'est également entretenu pour la première fois avec le président du Congrès national général libyen, Mohamed Al-Megaryef, depuis son élection en août à la tête de l'assemblée, le remerciant de ses condoléances pour les morts américains. Moscou craint le chaos au Moyen-Orient après la mort d'Américains La Russie craint le chaos au Moyen-Orient après l'attaque meurtrière en Libye contre l'ambassade américaine et d'autres incidents en Egypte et au Yemen, a déclaré jeudi le président russe Vladimir Poutine. Nous avons peur que cette région tombe dans le chaos, ce qui pratiquement est déjà le cas, a déclaré M. Poutine, dans des propos diffusés par la télévision publique russe. Les assaillants à Benghazi se sont placés non seulement au-delà de la loi, mais aussi au-delà de la civilisation contemporaine, a-t-il ajouté. M. Poutine a appelé les autorités locales dans la région à faire preuve de plus responsabilité en matière de sécurité: Je voudrais dire aux dirigeants des nouveaux gouvernements, des nouveaux Etats où des changements importants ont eu lieu: ils ne doivent pas oublier leur propre responsabilité pour ce qui se passe sur leur territoire. Le FBI enquête sur la mort des 4 diplomates en Libye Le ministre américain de la Justice, Eric Holder, a déclaré jeudi dernier, que le FBI avait ouvert une enquête sur la mort de quatre diplomates américains, dont l'ambassadeur en Libye, tués dans l'attaque du consulat américain à Benghazi (est) mardi soir. M. Holder, qui se trouvait à Doha, au Qatar, a ajouté que les Etats-Unis voulaient travailler avec le gouvernement libyen pour traduire en justice les responsables de ces morts.Un responsable policier a déclaré mercredi que la police fédérale américaine dépêchait des équipes d'enquêteurs en Libye.