Aujourd'hui, nous sommes à l'aube d'une nouvelle transition de la société mondiale, avec de profonds bouleversements géostratégiques, ce qui supposera des ajustements sociaux douloureux et donc une nouvelle régulation sociale afin d‘éviter les exclusions. Pour cela, les politiques et les économistes doivent réhabiliter un facteur stratégique du développement, la morale. Car il existe des liens inextricables entre un développement durable et la morale – en fait la mise en place d'un Etat démocratique, l'indépendance de la justice - la récompense de l'effort –conditions sine qua non - d'une lutte efficace contre la corruption sous ses différentes formes. 1. Revenant d'une rencontre internationale, animée par d'importantes personnalités internationales, sur le thème « transition et tensions sociales dans le monde arabe » , j'ai pu constater que la majorité des participants des deux rives de la Méditerranée ont mis en relief le fait que la mise en place de nouvelles institutions occasionnent, à court terme, un ralentissement économique. Cela donne l'impression d'un chaos mais ne devant jamais oublier cela résulte fondamentalement des politiques passées des anciens dirigeants. Il existe un lien dialectique entre les dictatures dans certains pays arabes, l'islamisme radical et le terrorisme, menace planétaire qui se nourrit de la misère et du manque de morale des dirigeants. Les discours chauvinistes, soi-disant nationalistes de certains dirigeants arabes dénonçant des «complots de l'extérieur », ne portent plus au sein d'une population à majorité jeune, parabolée et ouverte sur le monde. Et il semble bien que les bouleversements actuels dans le monde arabe sont la conséquence du fait que les dictatures et les autoritarismes sont devenus, dans un monde complexe, de très graves menaces à la souveraineté et à l'indépendance de ces pays et, d'une manière générale, à la sécurité mondiale, malgré l'alibi paradoxal, slogan de ces dictatures : «Nous sommes les remparts de la lutte contre le terrorisme et demandons à l'Occident de nous aider à garder le pouvoir». Il a été admis, qu'à moyen et à long terme, les nouvelles institutions sous réserves qu'elles soient pilotées par des forces sociales de progrès animées par la tolérance, peuvent réaliser la symbiose citoyens/Etat dans le cadre d'une société plus participative et plus humanisée: la démocratisation ne se faisant pas par un coup de baguette magique, cela demandera du temps, comme cela a été le cas en Occident et en certains pays d'Asie et d'Amérique latine. La démocratisation avancera en fonction des rapports de force tant au niveau interne (lutte entre conservateurs/réformateurs) qu'international, et en tenant compte des anthropologies socioculturelles. C'est dans ce contexte qu'Il y a lieu de repenser impérativement le fonctionnement du système économique et politique international, et notamment les politiques de complaisance de l'Occident vis-à-vis de ces dictatures qui menacent la sécurité mondiale. Cela implique plus de moralité de la part des dirigeants de l'Occident, car s'il y a des corrompus, il y a des corrupteurs 2.Pour le cas algérien, il existe incontestablement une crise morale, une corruption socialisée accentuée par la faiblesse de l'indépendance de la justice et des institutions bureaucratiques de contrôle souvent gelées, qui se télescopent traduisant le statut quo du fait de la neutralisation des rapports de force . Certes , il y a une atténuation des tensions sociales que l'on diffère dans le temps par la distribution de la rente des hydrocarbures sans contreparties productives , bien comme le montre les récentes révoltes sociales notamment dans le Sud , cette distribution est fortement inégalitaire. D'ailleurs tous les segments de la société veulent leur part de rente, immédiatement, n'ayant plus confiance aux discours de leurs dirigeants quitte à conduire le pays au suicide collectif. Cela traduit le divorce Etat-citoyens dont d'ailleurs la non-participation réelle aux élections en 2O12 a atteint un taux exorbitant ce qui menace à terme le fondement même de l'Etat algérien. Cela pose la problématique de d'une mauvaise allocation des ressources financières, avec des impacts mitigés , dépensant sans compter, voilant la réalité par des données comme le taux de chômage , le taux d'inflation et le taux de croissance biaisés, tout cela ayant pour essence une gouvernance mitigée, l'Algérie étant en plein syndrome hollandais. Cela explique en grande partie ces dernières années, le peu d'écho de l'Algérie tant au niveau national qu'international, les différentes délégations notamment occidentales en crise d'endettement, avec des discours ambiguës, ne voulant pas froisser la susceptibilité des dirigeants ,mais connaissant parfaitement la réalité algérienne, étant attirés surtout par les réserves de change qui à cette allure s'effriteront comme un sucre au soleil avec l'épuisement inéluctable des réserves d'hydrocarbures horizon 2O2O-2O25 au moment où la population approchera 5O millions d'habitants. Certains officiels algériens du fait de l'absence n de morale et avec leurs discours contradictoires sont de moins en moins crédibles et les scandales financiers récents étalés par la presse internationale de tous les continents ayant terni l'image de l'Algérie. 3.-Et pourtant lors de ces rencontres internationales, la majorité des décideurs de ce monde reconnaissent que l'Algérie a d'importantes potentialités pour surmonter cette situation paradoxale, un Etat riche et une population de plus en plus pauvre, avec une concentration excessive du revenu au profit d'une minorité spéculative, la marginalisation de l'entreprise créatrice de richesse et le savoir , et ce sous réserve d'une nouvelle politique socio-économique et du renouveau de la gouvernance. Et là, on en revient toujours à la morale, (la vertu du travail ), intimement liée à l'Etat de droit et à la démocratisation de la société, surtout des responsables qui doivent donner l'exemple s'ils veulent mobiliser leur population et éviter l'anémisation de la société, porteuse de décadence ; un phénomène déjà analysé avec minutie par le grand sociologue maghrébin Ibn Khladoun.