De nouveaux affrontements ont éclaté à Benghazi entre des groupes armés dont chacun voulait prendre le contrôle de la ville. Les combats, qui ont repris vendredi, ont fait au moins six morts et des dizaines de blessés. Selon des témoignages, les combats se déroulent depuis vendredi soir et des échanges de coups de feu nourris ainsi que des explosions étaient entendus depuis l'aube près du quartier général des forces spéciales de l'armée et dans le quartier al-Lithi, sur la route de l'aéroport. Sur les réseaux sociaux, les forces spéciales ont indiqué que des affrontements à l'arme légère les opposaient à un groupe de "hors-la-loi", faisant également état de tirs de roquettes. Elles ont, dans un premier temps, évoqué la mort de trois soldats, précisant que deux autres avaient été blessés et que les victimes avaient défendu "la légitimité de l'Etat avec courage et honneur". Plus tard, elles ont annoncé que trois autres soldats avaient été "liquidés" par "un groupe d'apostats", faisant ainsi clairement allusion à des islamistes extrémistes. Elles ont prévenu que serait "pris pour cible quiconque tire sur leurs forces". Le 8 juin, des affrontements entre des manifestants et des miliciens avaient fait 31 morts et une centaine de blessés à Benghazi. Les miliciens avaient été contraints de quitter leur QG sous la pression de la rue et des autorités. Le chef d'état-major par intérim, Salem al-Konidi, a, dans une déclaration à la chaîne de télévision Al-Aseema, dans la nuit de vendredi à samedi, mis en garde contre un "bain de sang" et une "catastrophe"à Benghazi."Si les forces spéciales sont attaquées, il y aurait un bain de sang (...) Il pourrait y avoir une catastrophe à Benghazi", a-t-il prévenu, affirmant ne pas connaître les assaillants ni leurs motivations.Vendredi, en début de soirée, des dizaines d'hommes, se présentant comme des manifestants pacifistes, ont délogé une brigade d'ex-rebelles, la "Première brigade d'infanterie", de son QG à Benghazi et ont incendié deux de ses véhicules. Le chef d'état-major a affirmé avoir ordonné à cette brigade de quitter son QG pour préserver des vies. Selon un témoin sur place, des manifestants ont tiré en l'air et lancé une roquette RPG sur le mur extérieur de la caserne sans faire de victimes. La "Première brigade d'infanterie" est formée d'ex-rebelles ayant combattu le régime de Mouammar Kadhafi en 2011. Elle affirme obéir aux ordres du ministère de la Défense. Selon des témoins, les assaillants ont attaqué par la suite un commissariat de police, des bureaux de gardes-frontières, des installations ainsi qu'un autre bâtiment administratif de la "Première brigade d'infanterie". Le week-end dernier, "Bouclier de libye", une brigade pro-islamiste, qui affirme dépendre aussi du ministère de la Défense, a été attaquée par des manifestants anti-milices et a été obligée d'évacuer son QG. Les protestataires affirmaient vouloir déloger les "milices" armées de leur ville, appelant les forces régulières à prendre le relais. Mais ces activistes affirment ne pas prendre part aux affrontements de vendredi soir et de samedi matin. Ils accusent "Bouclier de Libye" et des groupes d'islamistes d'avoir mobilisé leurs membres pour venger leur "défaite" du week-end dernier en s'attaquant aux forces régulières. Les autorités, qui peinent à former une armée et une police professionnelles, ont régulièrement recours à ces ex-rebelles pour sécuriser les frontières ou s'interposer dans des conflits tribaux. Le nouveau pouvoir en Libye n'a pas réussi à désarmer ou dissoudre les groupes des ex-rebelles, qui font la loi dans le pays, et tente de légitimer certains d'entre eux malgré l'opposition d'une grande partie de la population. Benghazi, la deuxième ville de Libye d'où était partie en 2011 la contestation qui a conduit à la chute du régime de Kadhafi, a été le théâtre, ces derniers mois, de plusieurs attaques contre des intérêts occidentaux et d'assassinats de responsables de sécurité, attribués souvent à des islamistes extrémistes dont le fief se trouve dans l'est du pays.