Paris-Sous la Syrie, le Hezbollah. Tel est l'objectif sous-jacent de la stratégie saoudo- américaine dans la nouvelle épreuve de force contre le pouvoir baassiste suscitée par la controverse sur l'usage des armes chimiques en Syrie. Cauchemar de l'Occident, bête noire des Saoudiens et des Israéliens, le Hezbollah fait l'objet d'une manœuvre d'étranglement visant à neutraliser la seule structure arabe à tenir tête tout à la fois aux Etats-Unis, à Israël et à la dynastie wahhabite. Le seul à constituer une menace directe pour Israël en ce qu'il est seul acteur arabe disposant d'une base opérationnelle limitrophe d'Israël, à l'exception de la Syrie, hors service du fait d'une guerre intestine, et du Hamas, en phase d'égarement révolutionnaire dans la foulée de son ralliement aux pétromonarchies du Golfe et l'installation de son quartier général à Doha (Qatar), à 30 km de la base américaine du Centcom. Des trois partenaires de l'axe de la contestation à l'hégémonie israélo-américaine (Iran, Syrie, Hezbollah), l'axe subliminal du mal dans la stratégie atlantiste, le troisième acteur présente le meilleur rendement en terme de rapport qualité-prix, la meilleure rentabilité opérationnelle en terme d'efficacité en ce que l'Iran (80 millions d'habitants, puissance du seuil nucléaire et autonome géographiquement) constitue un aléa stratégique pour une attaque occidentale et la Syrie, un aléa politique, pour les multiples répercussions que l'effondrement du pouvoir d'Etat pourrait entraîner pour son environnement. L'anéantissement politique ou militaire du Hezbollah figure dans toutes les démarches de la diplomatie occidentale depuis le début du soulèvement populaire en Syrie. Cela est si vrai que la première proclamation officielle du premier chef de l'opposition syrienne off-shore, l'universitaire franco-syrien Bourhane Ghalioune, a porté sur la première mesure symbolique qu'il prendrait au début de son mandat présidentiel, à savoir la rupture des relations stratégiques avec le Hezbollah et de la relation spéciale de la Syrie avec l'Iran. La déclaration de Bourhane Ghalioune a plongé dans une profonde consternation ses parrains français en ce qu'elle a révélé prématurément les objectifs sous-jacents de la campagne de Syrie. Cet engagement a été consigné dans le protocole de Doha, la plateforme politique de l'opposition, signée en novembre 2012, sous la pression du Qatar, qui prévoit en outre de recourir à la négociation politique pour récupérer le plateau du Golan occupé par Israël depuis 1967. Autrement dit, un enterrement discret du contentieux syro-israélien en ce qu'il implique la renonciation à la guerre et la reconnaissance d'Israël, sans préjuger du résultat final des négociations syro-israéliennes. Un schéma identique au processus israélo-palestinien avec ses aléas identiquement dilatoires. 1 - La branche militaire du Hezbollah sur la liste des organisations terroristes de l'Union européenne. L'inscription de la branche militaire du Hezbollah sur la liste des organisations terroristes de l'Union européenne, en juin 2013, de même que la fixation de la date d'ouverture du procès des meurtriers présumés de l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri, au 13 janvier 2014, relève de cette manœuvre d'étranglement. Elles tendent, par leur programmation, à dresser un nœud coulant visant sinon à sa strangulation, à tout le moins à placer la formation politico-militaire sur la défensive en prévision de son implosion. La criminalisation du Hezbollah, à tout le moins sa branche militaire, a été faite sur la base de cette responsabilité présumée ou virtuelle dans un attentat en Bulgarie. L'attentat à la bombe a fait six morts, dont cinq Israéliens, en plus du kamikaze, l'été 2012, à Bourgas, au bord de la mer Noire. « L'attentat de Bourgas a été commis sur le sol européen contre un membre de l'Union européenne. Nous espérons que les Européens en tireront les conclusions qui s'imposent quant à la véritable nature du Hezbollah », précise le communiqué européen. La peur du terrorisme islamiste sur le Vieux Continent est inversement proportionnelle à sa réalité. Tel est, à tout le moins, l'un des enseignements de la première enquête sur le sujet de l'agence Europol. Selon le rapport Europol 2010 sur le risque terroriste dans l'Union européenne, sur 611 interpellations de terroristes effectuées, 219 (soit 35 %) sont dues à la France. Contrairement à une idée répandue, la majorité de ces 219 arrestations ne concernent pas des islamistes (94 arrestations dont 14 cas ont fini devant les tribunaux français) mais des séparatistes, en premier l'ETA, l'organisation séparatiste basque. De surcroît, comparaison n'est pas raison, mais force est de relever que la pénalisation du Hezbollah ne s'est accompagnée d‘aucune poursuite pour incitation à la haine raciale à l'encontre de Yat Beor, théoricienne d'Eurabia, marraine idéologique de Andrei Brevjik, le tueur d'Oslo, le plus sanglant attentat de la décennie 2010 en Europe, ni du moindre rappel à l‘ordre, même amical, à l'Arabie saoudite, dont quinze ressortissants ont participé au raid du 11 septembre 2011, contre les symboles de l'hyperpuissance américaine, qui a fait près de trois mille morts. 2 – La levée de boucliers des journalistes contre le fonctionnement du Tribunal spécial sur le Liban. Le Tribunal spécial pour le Liban, en charge d'identifier et de juger les assassins présumés de l'ex-Premier ministre libanais Rafic Hariri, a fixé la date d'ouverture du procès au 13 janvier 2014, précisant que cette date pouvait « être modifiée en fonction des nécessités de la procédure ». L'ouverture des travaux du Tribunal avait été fixée au 10 janvier 2013, date de l'implosion du gouvernement de Saad Hariri, héritier politique du milliardaire libano-saoudien. Son report d'un an, au 13 janvier 2014, viserait à coïncider avec la campagne pour l'élection d'un nouveau président de la République libanaise ou à la reconduction du mandat du titulaire, le général Michel Sleimane, alors que le Liban est sans gouvernement depuis près d'un an. La programmation des travaux du Tribunal international répondrait à une fonction dissuasive, telle une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête de la coalition hostile au camp saoudo-occidental, de manière à peser sur les tractations politiques en faveur du clan Hariri, dont le chef Saad, homme lige des Saoudiens, est en pleine déconfiture financière, absent du pays depuis deux ans. Le fonctionnement du Tribunal spécial sur le Liban a été émaillé de nombreuses irrégularités, mais les quatre affaires qui ont porté un coup irrémédiable à sa crédibilité sont l'arrestation arbitraire de quatre officiers de l'armée libanaise, la déposition d'une dizaine de faux témoins commandités par le clan Hariri, ainsi que la corruption de certains enquêteurs internationaux et la présence d'un fort contingent d'agents des services américains et britanniques parmi les enquêteurs (1). La démission d'une dizaine de membres de cette juridiction internationale a achevé de la discréditer, accréditant l'idée d'un procès politique sous habillage juridique. Devant tant de dérives, une cinquantaine de journalistes accrédités auprès de la juridiction ont publié un manifeste dénonçant la désinvolture de l'institution à leur égard, les manipulations dont ils font l'objet, de même que le cours de l'enquête, laissant apparaître le Tribunal comme un pantin aux mains des Américains. Cf. à ce propos l'article du journal libanais «Al-Akhbar» intitulé «Le tribunal en voie d'effondrement» http://www.al-akhbar.com/node/180980 Rafic Hariri était un ancien Premier ministre lorsqu'il a été assassiné, de même que Benazir Bhutto, au Pakistan. Le Libanais sunnite a eu droit à un tribunal international mais pas la Pakistanaise chiite, ni les assassins des dirigeants progressistes tunisiens sous le magistère du parti néo-islamiste En Nahda, Chokri Belaid et Mohamed Brahmi. Sur le plan proprement libanais, le prédécesseur de Rafic Hariri, Rachid Karamé (Tripoli), a été assassiné, lui, dans l'exercice de ses fonctions de Premier ministre, sans bénéficier de l'attention de la justice internationale. De surcroît, le statut de Rome a été ratifié le 17 juillet 1998 habilitant la Cour pénale internationale à se saisir des «crimes contre l'humanité, crimes de génocide et crimes de guerre». Il n'a pas qualité pour les crimes individuels. Il n'a été ratifié ni par les Etats-Unis, ni par Israël, les deux pays les plus impliqués, paradoxalement, dans le fonctionnement du Tribunal spécial sur le Liban. L'internationalisation d'un crime interne, s'agissant de l'assassinat d'une personnalité n'exerçant aucune responsabilité internationale, et d'un crime commis sur le territoire d'un Etat souverain dont la victime en est le ressortissant, de même que l'instrumentalisation de cette justice à des fins politiques, placent le Liban sous un mandat de facto des puissances occidentales, à la merci d'un chantage permanent. La cause de la justice internationale est-elle servie par une falsification permanente des preuves ? Par une violation permanente des lois du pays hôte en ce que le Tribunal a été institué au mépris des procédures constitutionnelles du Liban sans approbation du président de la République, seule autorité habilitée à ratifier les conventions internationales, sans approbation du Conseil des ministres, ni ratification par le Parlement? 3 – Les manipulations de l'opinion De l'incident du Golfe de Tonkin en 1972 pour justifier l'extension américaine de la guerre du Vietnam à Hanoi, en 1972, à la couveuse d'une maternité koweïtienne saccagée par les troupes de Saddam Hussein pour promouvoir une coalition internationale anti-Irak, en 1990, à l'éprouvette de Colin Powell pour justifier l'invasion américaine de l'Irak, en 2003, les Occidentaux, habiles manœuvriers de la guerre psychologique, sont coutumiers des manipulations de l'opinion au point de disposer d'un rôle prescripteur d'une opinion occidentale militarisée par les campagnes d'intoxication répétitives des grands vecteurs d'information. En témoignent, dans le cas d'espèce, deux ténébreuses affaires. (Suite de la page 6) A- La mystérieuse interview du «Time» Se superposant à l'affaire des faux témoins du procès Hariri, le summum de la sophistication dans la guerre psychologique menée par les pays occidentaux pour déstabiliser le Hezbollah, a été la mystérieuse interview publiée par la revue américaine «Time» d'un des quatre inculpés, proclamant son innocence, assurant qu'il se trouvait au Liban et que s'il avait été reconnu coupable, le Hezbollah l'aurait déjà remis à la justice internationale. Le journal An Nahar, volant au secours de la stratégie américaine, lui a emboîté le pas, en indiquant que la personne qui avait été interviewée n'est autre que Hussein Ouneissi, alors que Nicolas Blanford, le correspondant du Time à Beyrouth, démentait avoir effectué l'interview. Le journaliste américain, grand spécialiste du Hezbollah, a assuré qu'il s'est borné à commenter les propos du soi-disant inculpé sur la base d'un texte fourni par la direction du Times sans en connaître la provenance. B- Imad Moughnieh et la responsabilité des attentats du 11 septembre 2001 Une mise en scène pour camoufler les informations procurées de sources israéliennes? Fait surprenant, Imad Moughnieh, chef de la branche militaire du Hezbollah, tué par une explosion à la voiture piégée à Damas, en 2008, ainsi que l'Iran ont été mis en cause dans les attentats du 11 septembre 2001 contre les symboles de l'hyperpuissance américaine. Le spécialiste des affaires du renseignement du journal israélien Yedioth Aharonoth, Ronine Bergman a soutenu cette thèse samedi 26 août 2011 dans une déposition faite devant un tribunal du district de Manhattan. Se référant à des responsables du renseignement américain, le journaliste israélien a affirmé qu'Imad Moughnieh aurait personnellement assuré la livraison des explosifs aux auteurs du raid. Information surréaliste pour quiconque connaît l'animosité que portent les salafistes wahhabites à l' égard de la formation, alors qu'il est de notoriété publique que quinze Saoudiens ont participé au raid destructeur. Curieux cheminement que cette information qui reviendrait à imputer la responsabilité des attaques du 11 septembre aux chiites et à blanchir rétrospectivement les sunnites, particulièrement les sunnites alliés de l'Amérique, les adversaires implacables tant de l'Iran que des chiites, qu'ils considèrent comme des parias de l'Islam, alors que les Etats-Unis ont envahi l'Afghanistan précisément pour châtier les Taliban de cette opération, de même que l'Irak laïc pour sa connivence supposée avec Al Qaïda, enfin le Pakistan pour l'élimination du chef d'Al Qaida, Oussama Ben Laden. Doublement curieux le cheminement que cette information qui consiste à confier à un ancien responsable des services de renseignements israéliens de charger l'Iran et le Hezbollah en se référant à des anciens responsables de la CIA. Que n'a-t-on cité directement les responsables américains, sans s'abriter derrière les Israéliens? Pourquoi une telle révélation si tardive ? Pourquoi avoir attendu dix ans pour révéler une information explosive détenue par les Américains eux-mêmes ? S'agit-il de déblayer la voie à une nouvelle campagne de diabolisation de «l'axe du mal» en vue de détourner l'attention sur la question palestinienne, en pleine offensive diplomatique pour la reconnaissance de l'Etat de Palestine à l'ONU. Les instances judiciaires de Manhattan paraissaient répondre aux mêmes motivations que le Tribunal spécial sur le Liban, mettant en cause le Hezbollah dans l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri sur la base des relevés des données téléphoniques, sans tenir compte du fait que le réseau libanais des télécommunications était infesté des taupes israéliennes, y compris au sein de la hiérarchie militaire libanaise et des services de sécurité. C - Le Hezbollah, rival de Pablo Escobar, le baron de la drogue latino-américaine et le projet éditorial d'Yves Mamou. Récidivant le lendemain, le Yedioth Aharonoth, toujours en phase d'inspiration aiguë, faisait état de l'installation d'une base du Hezbollah à Cuba, pour servir de tête de pont au déploiement du mouvement chiite pour l'observation et le repérage des activités américaines et israéliennes dans la zone des Caraïbes. D'autres informations de presse présentaient le Hezbollah comme le rival de Pablo Escobar, le baron de la drogue latino-américaine, le principal narcotrafiquant sur l'axe Amérique latine-Afrique. Préscience ou Omniscience ? Fuite téléguidée ou journalisme en service commandé ? Ou plus simplement l'effet de la sérendipité? La mise en cause du Hezbollah dans l'assassinat de Rafic Hariri a fuité dans la presse internationale (Der Spiegel, le Figaro), bien avant l'incrimination des supposés meurtriers. La télévision israélienne, luxe de précision, révélera l'identité des prévenus potentiels le jour même d'une rencontre au sommet entre le président syrien Bachar Al-Assad et le Roi Abdallah d'Arabie, le 30 juillet 2011, à Beyrouth, en vue d'aplanir leurs différends sur le Liban. Prescience ou Omniscience? Fuite téléguidée ou journalisme en service commandé? Ou plus simplement l'effet de la sérendipité? Comme en écho aux accusations israéliennes, le journaliste français Yves Mamou a programmé la sortie d'un livre «Une longue cuillère pour le diable», sur le rôle du Hezbollah dans le narcotrafic vers l'Afrique, en janvier 2014, date présumée de l'ouverture du procès Hariri. Sans doute alimenté par des informations des services israéliens ou frappé de strabisme divergent, le journaliste, ce faisant, a occulté le rôle souterrain d'Israël dans la criminalisation du Hezbollah et le contournement des pays arabes via l'Afrique. Le démantèlement d'un important réseau israélien en Tunisie, en 2012, relève de cette stratégie, dont l'objectif à terme est d'aménager la principale base opérationnelle du Mossad au Maghreb, dans ce pays en pleine transition politique, à la charnière de l'Afrique et de l'Europe, jadis chasse gardée occidentale. Le voyage en Israël des dirigeants du fantomatique gouvernement kabyle en exil, Ferhat Mehenni (président) et Lyazid Abid (ministre des affaires étrangères), dans la foulée du voyage d'intellectuels du Maghreb, Boualem Sansal (Algérie), Hassan Chalghoumi (Tunisie) et Nadia El Fanni (Tunisie), ne relèvait pas du hasard. Sous couvert de «dialogue des religions», il participait d'une opération de débauchage de personnalités médiatiques en vue d'en faire des relais potentiels dans la guerre psychologique que mène clandestinement Israël dans la déstabilisation de cette zone, en pleine turbulence politique... En superposition au harcèlement israélien des communautés libanaises d'Afrique, particulièrement au Nigeria et au Sierra Leone, en vue d'assécher, d'une part, le flux financier provenant des émigrés chiites vers leurs coreligionnaires du Sud-Liban et de fragiliser, d'autre part, le glacis constitué par l'immigration chiite libanaise en Afrique face à la colonisation rampante des terres entreprises par Israël en Afrique, de l'ordre de 20 fois la superficie de la Palestine. Pour le lecteur arabophone, cf. La Tunisie, plateforme du Mossad au Maghreb du journal libanais « Al Akhbar». http://www.al-akhbar.com/node/166000 Sur le jeu d'Israël en Afrique et la colonisation des terres africaines: http://www.renenaba.com/le-jeu-de-la-france-defense-du-pre-carre-en-tandem-avec-israel/ Et le jeu du Mossad au Nigeria http://www.al-akhbar.com/node/190431 4-Bandar versus Nasrallah: La lutte finale entre le «prince du Djihad» et «le Seigneur de la résistance». Le Hezbollah est avec le Hamas les deux organisations arabes inscrites sur la liste noire de l'Union européenne, alors que Jobhat an Nosra en est dispensée sans doute en raison du fait que la formation salafiste opérant en Syrie sur la base d'un financement saoudien ne se préoccupe guère de la libération de la Palestine. Mais par rapport au Hamas, le Hezbollah dispose d'un avantage comparatif incontestable en termes de crédibilité dissuasive en ce que le Hezbollah est la seule instance arabe à proclamer son attachement effectif au combat pour la libération de la Palestine, matérialisé par ses combats contre Israël et son attachement à la célébration de la Journée mondiale d' «Al Qods», commémorée chaque année le dernier vendredi du mois de Ramadan, en l'absence de la moindre participation sunnite, alors que la Palestine est dans sa très grande majorité peuplée de sunnites et d'une minorité chrétienne arabe, dont la population ne comporte aucun chiite, et que la responsabilité de la défense des Lieux Saints Musulmans incombe aux vingt pays arabes qui se réclament du sunnisme, la branche majoritaire de l'Islam. Alors qu'Israël parachève la phagocytose de la Palestine, démarche ultime avant l'estocade finale, la reconnaissance d'Israël comme «Etat juif», verrouillant ainsi toute revendication future des Palestiniens à un hypothétique «Droit au retour» sur la terre de leurs ancêtres, le Hamas s'est curieusement engagé dans le combat anti- Assad, plutôt que de se lancer à la reconquête de sa terre natale, la Palestine, en un tragique dévoiement de sa stratégie. A- Bandar, le capo di capo de la contre-révolution arabe Fruit d'une copulation ancillaire du Prince Sultan Ben Abdel Aziz, l'ancien «Great Gatsby» de la vie diplomatique américaine s'est imposé comme l'homme fort du Royaume du fait de la maladie d'une large fraction de l'équipe dirigeante frappée de pathologie handicapante, que cela soit le Roi Abdallah d'une lourde cardiopathie que le prince héritier Salam, atteint d'Al zheimer, voire même le ministre des Affaires étrangères Saoud Al- Faysal. Intronisé par le général David Petraeus, en personne, avant que l'ancien chef du renseignement américain ne soit emporté par un jeu de galipettes inconsidérées, une affaire d'embedded à l'américaine, Bandar passe pour être le nouvel homme providentiel de la stratégie saoudo-américaine, et, pour beaucoup d'observateurs occidentaux cités par le journal néo-conservateur «The Wall Street Journal», l'ancien «Great Gatsby» de la vie diplomatique américaine, le Bandar Bush par excellence, l'homme des rétrocommissions des transactions militaires saoudiennes, du retentissant scandale Tornado pourra réussir là où la CIA a échoué, avec ses cargaisons ininterrompues d'armes, d'argent et sa capacité de mise sous tutelle des combattants islamistes (...) (Suite de la page 7) «Un combattant expérimenté apte à créer les conditions de la chute d'Assad», soutient le Wall Street Journal à propos de Bandar, selon «Al Qods Al Arabi» en date du 29 août 2013. Face à l'enlisement du conflit syrien, aux dérives djihadistes en Libye et en Tunisie, à la montée en puissance des Frères musulmans en Egypte, l'Arabie saoudite a repris le commandement des opérations imposant un pro-saoudien à la tête de l'opposition offshore syrienne, Ahmad Jarba, un chef de tribu appartenant à la même confédération tribale que le Roi Abdallah, le clan Al-Shammar, épaulant l'armée égyptienne à évincer le néo-islamiste Morsi de la tête de l'Etat égyptien, imposant un prince à demeure en Jordanie, pour le financement et le ravitaillement de l'opposition syrienne offshore. Depuis le début des soulèvements arabes, l'Arabie saoudite a réussi à constituer une majorité de blocage des monarchies arabes au sein de la Ligue arabe, avec l'apport de deux confettis de l'Empire français, l'enclave militaire franco-américaine de Djibouti et les Comores, mis en échec la contestation antimonarchique à Bahreïn et évincé le néoislamiste égyptien Mohamad Morsi, une menace à l'ordre monarchique héréditaire islamique. Elle s'emploie à exclure le Hezbollah du futur gouvernement libanais, en voie de constitution depuis six mois. B – Nasrallah versus Bandar : 4-0 Mais le sauveur suprême de l'Occident et de l'Islam wahhabite présente un piètre bilan dans sa confrontation avec le Hezbollah. Par quatre fois, Bandar mordra la poussière face Hassan Nasrallah. En 2006, où la riposte balistique victorieuse du Hezbollah libanais face à l'aviation israélienne, de même que la destruction du navire amiral de la flotte israélienne, ont semé la consternation dans le camp saoudo-américain, fragilisant l'héritier politique du clan Hariri. En 2007, avec la neutralisation du camp palestinien de Nahr el Bared, (nord du Liban), dont le chef de file des djihadistes Chaker Absi, à la solde de l'Arabie saoudite, voulait faire une zone de non-droit, en vue de parasiter le Hezbollah sur son arrière- garde. En 2008 avec l'affaire du réseau des transmissions stratégiques du Hezbollah qui s'est soldée par une capitulation en rase campagne de ses adversaires, particulièrement le chef druze Walid Joumblatt, à l'époque le fer de lance du clan Hariri. Enfin en 2013, en Syrie, en complément de la perte considérable représentée par l'assassinat de sa dague sécuritaire, le capitaine Wissam Hassan, chef de la section des renseignements des forces de sécurité intérieure libanaise, dynamité trois mois après la décapitation de la hiérarchie militaire syrienne. Dernier intervenant sur le champ de bataille syrien, après les escouades de djihadistes de Tchétchénie à la Tunisie en passant par la Belgique, le Kosovo et la France, de même que les Moudjahidines Khalq, formation de l'opposition iranienne islamo- marxiste, et le clan Hariri, le Hezbollah a opéré un retournement spectaculaire de la situation à Qoussayr, renversant le cours de la bataille de Syrie. «Par ses brillantes performances non seulement à Qoussayr, à Lattaquieh et Homs, mais aussi dans sa contribution à la défense de la base aérienne de Ming, assiégée dans le nord de Syrie, Hassan Nasrallah a bien mérité le titre de «Seigneur de la résistance», admettra Mohamad Hassanein Heykal, l'ancien confident de Nasser. Cf. I-Nasrallah, Le seigneur de la résistance par Mohamad Hassanein Heykal http://www.al-akhbar.com/node/190273 Invincible à ce jour, artisan de deux dégagements militaires israéliens du Liban sans négociation ni traité de paix, ferme soutien du Hamas face aux offensive israéliennes, le Hezbollah demeure, n'en déplaise aux esprits chagrins, le phénomène majeur politico-militaire de l'histoire arabe contemporaine. En comparaison, le Hamas, unique mouvement de libération nationale de confession sunnite, a déserté la Syrie après 16 ans d'hospitalité, par alignement sectaire, pour installer son QG à Doha, à 35 km de la base du Centcom, la plus importante base du tiers monde des Etats-Unis, le protecteur d'Israël, la caution de tous les assassinats extrajudiciaires des pères fondateurs du mouvement palestinien. Beaucoup lui savent gré de ce repositionnement. Mais à en juger par la fureur de la branche militaire du mouvement, beaucoup le déplorent fortement, comme en témoignent les pourparlers intensifs menés à Téhéran, fin juillet, entre le Hamas et ses deux anciens alliés chiites, l'Iran et le Hezbollah, pour restaurer une collaboration stratégique. Songeons au sort respectif du Vietnam et de la Palestine. L'un réunifié par la force de la volonté, l'autre pulvérisée par la force de la désunion et de la servilité. 5 – Le remake du duo franco-américain de 1982 Depuis la chute du Chah d'Iran en 1979, six armadas occidentales ont été dépêchées face aux pays de la zone (face à Beyrouth, en 1982, dans le Golfe lors de la guerre des pétroliers entre l'Irak et l'Iran, face à l'Irak, en 1990, de nouveau face à l'Irak, en 2003, face à l'Iran en 2007, puis de nouveau face aux côtes libanaises et syriennes en 2013). Cobelligérants de l'Irak contre l'Iran, la France et les Etats-Unis en avaient lourdement pâti en termes de représailles terrestres avec le double attentat du Drakkar (PC français) et du Quartier Général des Marines, faisant près de 400 morts, ainsi que l'assassinat de l'ambassadeur de France au Liban, Louis Delamare, et deux autres attentats contre l'ambassade américaine à Beyrouth, décapitant l'Etat-Major de la CIA au Moyen-Orient. Chef de file de la nouvelle coalition en gestation, les Etats-Unis et sa roue dentée française, en un remake du duo franco-américain de 1982, paraissent avoir tiré les enseignements de la précédente expérience, en préconisant contre la Syrie non pas un châtiment céleste, mais une punition aérienne, s'imaginant pouvoir, par ce subterfuge, s'épargner des représailles terrestres. Un châtiment qui engloberait rétrospectivement le passif de 1982. Delamare, Drakkar and Co. Une vengeance en somme. En 1982, lors du siège de Beyrouth, Saoud Al Faysal, l'inamovible chef de la diplomatie saoudienne, se réjouissait que les Israéliens, en faisant le siège de Beyrouth, débarrassent de ses «voyous» la capitale rebelle libanaise, et Alexander Haig, secrétaire d'Etat de Ronald Reagan, se félicitait que le port de Beyrouth demeure «sous contrôle de l'Occident». Si le camp contestataire à l'hégémonie israélo-américaine, la Chine et la Russie ont perdu deux de leurs ravitailleurs pétroliers à la faveur du «printemps arabe», la Libye et le Soudan, l'Occident, lui, a perdu le monopole de la navigation dans la Méditerranée avec l'installation d‘une base russe à Tartous et la présence de la balistique du Hezbollah, l'ombre portée de l'Iran, sur les rives libanaises de la Méditerranée, plaçant les bâtiments de la flotte atlantiste à portée de leurs missiles. Trente ans après, le beau-frère de Saoud al Faysal, le ténébreux Bandar, se lance à la chasse des renégats de l'Islam, dans une bataille décisive contre celui qu'il désigne comme son principal ennemi, non pas Israël, mais la Syrie et son allié indéfectible, le Hezbollah, un mouvement libanais, chiite certes, mais tout autant un mouvement musulman et arabe. Alors que le pape François prie et jeûne pour la paix en Syrie, le prédicateur atlantiste, le millionnaire égypto-qatariote, Youssef Al Qaradawi, le prédicateur atlantiste implore les Américains de bombarder la Syrie, signe indiscutable d'un dérèglement moral. Le vœu secret des Occidentaux est qu'une des «bombes intelligentes» de l'armada atlantiste ne projette dans l'au-delà un homme qui leur a tenu la dragée haute depuis deux ans, mis un terme à l'unilatéralisme américain en vigueur sur la scène internationale depuis deux décennies avec le double veto russo-chinois au Conseil de sécurité, infligeant un magistral camouflet à l'ensemble de la diplomatie occidentale, et révélé, enfin, par défaut, les turpitudes de l'opposition qui se propose de prendre sa relève. Du cannibalisme à la prédation des pubères syriennes, au djihadisme erratique, au démantèlement du site chrétien de Maaloula, une cité antique de la banlieue de Damas, parlant araméen, la langue du Christ. De par sa subite programmation, le ciblage de la Syrie apparaît d'ailleurs rétrospectivement comme un dérivatif à la déconfiture de la diplomatie occidentale en Egypte, en ce qu'il offre la possibilité d'éviter un affrontement avec l'Arabie saoudite, principal souteneur du putsch militaire égyptien, en promouvant une convergence saoudo-occidentale sur leur ennemi commun, la Syrie, déjà abondamment diabolisée par les médias occidentaux. Dans ce combat au flou contour, aux gesticulations tonitruantes, aux résultats aléatoires, un double constat s'impose : -Sous peine d'implosion, sous peine d'anéantissement de l'axe de la contestation à la Pax israélo-américaine, le Hezbollah ne saurait souffrir la moindre défaite. Sous peine de marginalisation du cercle dirigeant saoudien, sous peine de discrédit définitif de sa personne et de son Royaume, Bandar, lui, ne saurait souffrir un nouveau revers. L'histoire retiendra de cette séquence un Hezbollah, promu au rang de phénomène politico-militaire majeur de l'histoire arabe contemporaine, avec, en contrechamp, une Arabie saoudite, le principal ravitailleur énergétique de l'économie occidentale, le principal exportateur du djihadisme erratique et ses excroissances métastatiques (Al Qaïda, Jobhat An Nosra), la plus formidable machine autodestructrice des Arabes, sans la moindre concession sur la Palestine. Références 1-TSL Hariri : Dans une allocution télévisée dimanche 3 juillet 2011, Cheikh Hassan Nasrallah a fait diffuser une séquence vidéo montrant un des enquêteurs internationaux, l'Allemand Gerhard Lehman, vice-président de la commission d'enquête, monnayant ses informations, en train d'empocher une somme d'argent. Daniel Bellemare, de son côté, a personnellement œuvré à la levée de la Note rouge placée sur Mohammad Zouheir Siddiq auprès d'Interpol, annulant ainsi les poursuites engagées contre lui en sa qualité de «faux témoin» du procès. Ancien garde du corps d'un opposant notoire au régime de Damas, le général Rifa'at Al Assad, propre oncle paternel du président Bachar al Assad, Siddiq résiderait au Caire sus la protection des services égyptiens. Les notes Wikileaks ont révélé des rencontres périodiques entre les enquêteurs internationaux et l'ambassade américaine à Beyrouth visant à obtenir des instructions sur le cheminement de l'enquête. Un panel d'enquêteurs en rapport avec la CIA -Robert Baer, conseiller du procureur, spécialiste des affaires islamiques, ancien officier de la CIA, avait été envoyé au Liban pour traquer Imad Moughnieh, le responsable de la branche militaire du Hezbollah. Dans une interview à la chaîne de télévision d'Abou Dhabi, Bauer a avoué avoir consacré quinze ans de sa mission auprès de la CIA à travailler pour le kidnapper. En 1985, il avait participé à la tentative d'assassinat de Sayed Hussein Fadlallah, un attentat qui a tué et blessé plus de 300 personnes. -Nick Caldas, australien d'origine égyptienne, ancien responsable des investigations au sein de la commission d'enquête internationale. Lié à la CIA, il avait été auparavant dépêché en Irak pour créer un service de renseignements irakien sous l'autorité de l'administration américaine du pays. -Michael Taylor, Britannique, responsable des investigations au TSL, un ancien chef des Services de renseignements britanniques, il est spécialisé dans la lutte contre le «terrorisme islamique». -Darrel Mendez, américain, responsable des poursuites au bureau du procureur, «ancien des Marines et lié à la CIA et au FBI». -Doreid Bcherraoui, Libano-Français, conseiller juridique du procureur, a été le premier à lancer, via les médias, des accusations contre la Syrie et les services libanais. Hostile au Hezbollah, il passe pour être responsable de plusieurs décisions du Bureau du procureur dans l'affaire des faux témoins. Le chantage a ainsi occulté le débat sur le passif de l'ère Hariri, qui hypothèque, lui, l'avenir du Liban, à savoir : Une dette publique de cinquante milliards de dollars Une évaporation de recettes du ministère des finances de l'ordre de quinze milliards de dollars, sous le gouvernement du tandem Hariri-Siniora. Trente millions de m2 de superficie du territoire libanais vendus à des inconnus, vraisemblablement à des investisseurs originaires des pétromonarchies du Golfe, en infraction avec la législation du pays. Près de deux cent mille naturalisés sunnites, entraînant un bouleversement de l'équilibre démographique du pays dont le système politique repose sur une répartition confessionnelle du pouvoir. A propos du Hezbollah et de son chef, Sayyed Hassan Nasrallah Nasrallah, Le seigneur de la résistance par Mohamad Hassanein Heykal : http://www.al-akhbar.com/node/190273 Hassan Nasrallah l'indomptable : http://www.renenaba.com/hassan-nasrallah-lindomptable/ Wissam Hassan, la dague du dispositif sécuritaire saoudien au Proche-Orient : http://www.renenaba.com/wissam-al-hassan-la-dague-du-dispositif-securitaire-saoudien-au-proche-orient/ A propos du remake de 1982 et des attentats antioccidentaux du Liban, le drakkar français et le PC des marines américains. http://www.renenaba.com/panorama-il-y-a-dix-ans-eclatait-la-guerre-du-liban/ http://www.renenaba.com/au-large-du-liban-la-plus-importante-armada-de-lapres-guerre/ http://www.renenaba.com/la-plus-importante-concentration-navale-de-lhistoire-contemporaine-au-large-du-golfe-arabo-persique/