Chaque jour qui passe nous apporte son lot de surprises, du moins pour les non avertis. La crise syrienne, qui perdure depuis deux ans et demi, a été marquée par moult rebondissements au point où beaucoup de diplomates se sont emmêlés les méninges dans la subtilité du jeu politique. Dans ce contexte, ceux qui semblent avoir manqué d'anticipation créatrice demeurent la France, l'Arabie Saoudite, la Turquie, Israël and Co. Dans ce «jeu de la mort» politique, la diplomatie américaine a pivoté in extremis, sauvée en cela par la Russie qui lui avait offert une sortie de crise honorable dans le dossier syrien. Aussi, le «pivotement» américain vers l'Asie pourrait contribuer au règlement des crises syrienne et iranienne, jugent certains observateurs, en mettant un terme aux affrontements chiites-sunnites instrumentés à des fins stratégiques. Ainsi, l'Iran retrouverait-t-il sa place géostratégique essentielle dans la région, avec la «modération» dans les relations internationales prônée par le président Rohani dans son discours aux Nations Unies fin septembre. Et cela, plusieurs pays l'ont compris, comme le montrent ces tentatives de rapprochement de Téhéran, de la part de la Turquie, et même le Qatar et l'Arabie, après avoir encouragé les Takfiristes à semer le chaos dans le Monde arabe. Ces pays, «victimes» de leur immaturité géopolitique, ont fini par s'apercevoir que leur onirisme avorté risquait de les ostraciser sur la scène politique. Cela dit, les islamistes takfiristes restent nombreux, encore soutenus par l'Arabie Saoudite pour les détourner de menacer le royaume des Saoud, désormais menacé dans son existence même. Ce sera la tâche la plus ardue d'en finir avec eux après la solution négociée de la crise syrienne. Avec le revirement du Qatar qui cherche à se rapprocher de la Syrie de Bachar Al Assad, on assiste à l'isolement des positions saoudiennes et israéliennes. Les deux pays ont, d'ailleurs, compris qu'ils n'étaient plus les alliés indéfectibles des Etats-Unis qui attendent d'eux des changements de position. La destruction du stock d'armes chimiques syriennes, constitué pour répondre aux armes de destructions massives israéliennes, notamment nucléaires, biologiques et chimiques, met Tel Aviv en position délicate face aux initiatives pour un Proche-Orient débarrassé de ces menaces. Simultanément au changement de stratégie américaine dans la région, l'Arabie Saoudite va devoir mettre un terme à sa croisade sunnite contre un axe chiite centré sur l'Iran et appuyé sur l'Iraq, la Syrie et le Liban. Il semble, d'ailleurs, que la brouille avec les Etats-Unis sur la question syrienne amène la monarchie à revoir ses fondamentaux, comme en attestent des visites récentes en Iran. Son refus d'occuper le siège où elle avait été élue à l'AG de l'ONU est à la fois un signe de son irritation et de sa prise de conscience des nouveaux rapports de force dans la région. (A suivre)