Le nouveau wali d'Alger, Abdelkader Zoukh, a vite compris que sa première tâche consiste au nettoiement de la capitale qui est dans un état d'insalubrité jamais enregistré. Où que le regard porte, en pleine voie publique, ce sont des déchets, des sachets plastiques, des bouteilles vides, des crachats qui jonchent les rues...en un mot, la saleté est parout. Le wali a décidé de commencer par enlever ces ordures. Pour pallier à cette situation, il a annoncé une enveloppe de 10 milliards de DA alloués à cette campagne de nettoiement au niveau de la capitale qui durera un mois. Il y a un peu plus d'une année, le slogan «Nettoyons les villes» avait surpris par le ton avec lequel il a été lancé, se voulant l'expression de la détermination et de l'assurance de réussir. La situation actuelle, qui a empiré par rapport à l'an dernier, prouve que personne n'a pris au sérieux ce slogan. Le nouveau wali ayant décidé de le concrétiser directement sur le terrain par une campagne de «grande envergure» et, prenant la presse à témoin, a fixé à cette opération son but : «la protection du citoyen et la préservation de la beauté de la capitale à l'image des autres capitales du monde». Le défi est immense connaissant le niveau de clochardisation atteint par certains quartiers, y compris au cœur d'Alger. De fait, l'action est menée comme une opération de guerre...contre la saleté : 12 000 agents et 1 000 camions ont été mobilisés, fait savoir le wali, et le directeur général de Netcom ajoute que son entreprise contribue avec 4 000 agents et 400 camions. Sur les 369 points noirs recensés, à éliminer, Netcom en a une centaine sur le «front » dont elle est chargée, c'est à dire 29 communes. Toutes les communes sont aussi sales les unes que les autres, il ne faut pas croire que la «palme» revient à Baraki, Dar El-Beida, Bab El-Oued et Rouiba parce qu'elles ont été choisies pour entamer la campagne. Les autres communes suivront très prochainement . Toutefois, il est important d'inscrire le «nettoiement» dans une action plus large visant à faire émerger, à nouveau, le sens du civisme chez les Algérois qui n'aspirent qu'au calme et à la tranquillité, dans un environnement propre, moins qu'aux «loisirs» bruyants sur la voie publique. Depuis quelques années, la situation s'est dégradée au point où plus personne ne sait plus ce qu'est la chaussée, le trottoir, la placette, le jardin public, le square. Ces espaces publics, aux fonctions spécifiques, sont occupés, sans consultation de la population et selon une démarche qui échappe à toute logique et à toute rationalité, par des activités «sans queue ni tête», décidées d'en haut (l'ordre vient de «très haut», dit-on parfois aux riverains pour décourager toute velléité de protestation contre les nuisances sonores). Oui, l'ordre de poser des haut-parleurs sous les fenêtres des habitants et de les assourdir de décibels, viendrait d'«en haut». Les terrains de sports et les salles de spectacles qui ne manquent pas au centre d'Alger ne servent finalement à rien. C'est dans la rue que ça doit se passer, contrairement à l'enseignement qui est dispensé dans les écoles. Il ne faut pas s'étonner de savoir que la phrase qui revient le plus souvent chez les petits et les grands est : «c'est à ne rien comprendre !» D'un côté, un discours officiel et de l'argent public consacrés à la protection de l'environnement, de l'autre des actions tout aussi «officielles» qui engendrent des nuisances urbaines. C'est dans cette incohérence qu'il faut chercher et corriger les causes de cette tendance à l'incivisme chez nombre d'Algérois. L'introduction de l'éducation environnementale dans le système d'enseignement et les nombreuses campagnes de sensibilisation sur la propreté ont forgé dans la population un sens civique réel mais qui n'est pas mis en œuvre. Tout le monde connaît les éco-gestes (ne pas jeter les ordures n'importe où, par exemple, ou ne pas cracher par terre), l'indifférence est totale. Pourquoi ? L'expérience a montré que sans l'adhésion de la population aux décisions de proximité qui la concernent, les campagnes de nettoiement restent sans lendemain. C'est donc à ce niveau qu'il faut investir : créer les conditions pour que le sens du civisme qui existe chez les Algériens soit mis en action.